– J’en ai plus qu’assez de toi ! Tu passes ton temps à me pourrir
la vie !
– Ben voyons ! Parce qu’évidemment, ce n’est pas toi qui pourris la mienne !
– Comment oses-tu me parler sur ce ton ?! cria ma mère en titubant, sa
bouteille de vodka à la main.
– Si tu en as tant marre que ça de moi, il ne fallait pas faire d’enfant ! Tu
t’en serais mieux portée et moi aussi ! Je n’aurais pas existé et je n’aurais
jamais eu une mère telle que toi !
– C’est ton père qui a insisté pour avoir un enfant ! Je n’étais pas prête à ça
!
– Tu vas me faire croire que tu ne pouvais pas lui dire « non » ?!
– Je l’aimais, Zoé !
– Oui ! Plus que tu ne m’as jamais aimée ! C’est certain !
– De toute façon, cela fait des mois que ça ne va plus entre toi et moi !
– Et donc ?! Tu vas me foutre à la porte ?!
– J’ai retrouvé ton père ! Tu pars vivre chez lui !
Je crus qu’on venait de me jeter un seau d’eau glacée à la tête.
– C’est une blague ?! Je ne le connais même pas !
– Toi qui m’as toujours posé des questions sur lui dès que tu as su parler,
c’est l’occasion d’y répondre !
– Si tu n’as jamais répondu à mes questions, c’est qu’il y a sûrement une
raison !
– Tu crois vraiment que j’allais te parler de l’homme qui m’a quittée pour une
autre, m’abandonnant avec notre fille de six mois que je n’avais même pas
désirée ?!
Ma mère but deux gorgées de vodka.
– Arrête de boire ! grondai-je. Tu es pitoyable !
Elle attrapa une enveloppe qu’elle me jeta à la figure.
– Tiens ! C’est ton billet de train, avec une lettre de ton père ! Tu pars dès
demain ! Va faire tes bagages. Et n’oublie rien : je veux que tu fiches le camp
de chez moi et que tu ne reviennes plus jamais !
Je ramassai l’enveloppe que j’avais laissée tomber à terre et montai dans ma
chambre. Je m’assis sur mon lit, pris une grande inspiration puis ouvris
l’enveloppe. Effectivement, il y a avait tout ce qu’il fallait pour que je
parte de Nantes et arrive à… Aix-en-Provence. C’est à Aix-en-Provence qu’IL
habite. Je regardai à nouveau dans l’enveloppe et découvris une feuille blanche
pliée en trois, sur laquelle mon prénom était inscrit. Je l’ouvris fébrilement.
Zoé,
Ma fille, mon bébé, ma chair, mon sang.
Je n’arrive pas à croire que tu vas lire cette lettre. Je peux enfin entrer en
contact avec toi, après ces 17 longues années.
Je suis ravi de t’accueillir chez moi. Plus les jours passent, plus je suis excité
à l’idée de faire ta connaissance.
Je t’attendrai dans le hall de la gare. Je crois que nous avons beaucoup de
choses à nous dire.
Je t’embrasse,
Papa.
Papa ?! Je ne connaissais absolument pas ce gars, et il se permettait de signer
« Papa » ?! De colère, je déchirai cette lettre. En effet, nous avons beaucoup
de choses à nous dire. Et pas forcément de bonnes choses. Cela fait 17 ans que
j’ai une longue liste de reproches toute faite à lui balancer à la figure.
19h. J’ai fini ma valise. Je n’emporte pas grand-chose, juste
les objets auxquels je tiens énormément et mes vêtements préférés. IL doit bien
avoir une machine à laver, non ?
Je descends dans le salon, ma mère est en train de décuver sur le canapé. 17
ans que j’assiste quotidiennement à ce spectacle navrant. J’ouvre le frigo,
choppe un plat de pâtes et le fais réchauffer. Je dîne seule en surfant sur mon
smartphone.
Cela fait 1 an que je suis déscolarisée. L’école, ce n’était pas pour moi. J’ai
fini ma 2nde générale, puis au moment de passer en 1ère, j’ai refusé de
retourner au lycée. J’ai toujours été marginale, en marge des autres, sans
cesse à me poser des questions existentielles. Le système scolaire n’est pas
fait pour moi. Parfois, j’ai même l’impression que le monde entier n’est pas
fait pour moi.
Je n’ai qu’une seule amie, Ashley. Mais elle est partie vivre à Sidney avec ses
parents. Depuis plusieurs mois, nous ne correspondons que par Skype. Son départ
m’a vraiment fait mal. Mais j’ai tout gardé pour moi, comme d’habitude.
Le lendemain, 11h. Ma mère me dépose à la gare de Nantes.
– Bon ben, salut, dis-je.
– Ouais, salut, répondit-elle.
Il n’y eut pas de bise, pas d’émotion, rien du tout. Nous nous regardâmes
quelques secondes, puis elle tourna les talons. Je soupirai et entrai dans la
gare en direction du tableau d’affichage. Je partais pour une nouvelle vie et
j’étais stressée à en mourir.
Après plusieurs heures de voyage, j’arrive à Aix-en-Provence. Ça
change de la Loire-Atlantique. Il fait chaud et beau, mais je n’en attendais pas
moins en plein mois de juillet.
Dans le hall de la gare, un homme tient une pancarte avec « Zoé » écrit dessus.
Je suppose que c’est pour moi. IL est très grand, brun aux yeux gris. Je suis
également brune aux yeux gris. Je n’ai jamais ressemblé à ma mère et pour cause
: j’étais en train de découvrir que j’étais le portrait craché de mon père.
Je m’arrête à quelques mètres de lui et je reste plantée là, avec mes bagages,
me demandant ce que je devais faire. IL m’aperçut et s’exclama : « Oh mon Dieu
! ». Puis, IL courut vers moi et me serra dans ses bras.
– Ma fille ! Ma toute petite fille…
Je le laissai faire mais ne l’enlaçai pas en retour.
– Laisse-moi te débarrasser de ta valise, dit-il après m’avoir lâchée.
– Non, c’est bon.
IL n’insista pas.
– Tu dois être fatiguée après tout ce voyage. As-tu mangé ?
– Non.
– Alors allons-y.
IL m’emmena dans un restaurant non loin de la gare. Je me retrouvai face à face
avec l’homme que j’avais toujours détesté. Il ne cessait de me fixer.
– La dernière fois que je t’ai vue, tu avais six mois. Tu étais un magnifique
bébé et je…
– Pourquoi tu m’as abandonnée ?! grondai-je.
– Tu ne connais pas toute l’histoire, Zoé.
– Je viens d’avoir 17 ans. Pas une seule fois, en 17 ans, tu n’as essayé de me
retrouver ?!
– J’ignore ce que t’a raconté ta mère mais…
– Ma mère est une conne ! Tu m’as abandonnée aux mains d’une alcoolo ! Comment
as-tu pu faire cela à ton propre enfant ?!
– Zoé, je te demande juste de mettre ta colère de côté quelques instants et de
m’écouter. Tu pourras ensuite juger. Tu peux faire cela ?
J’hochai la tête.
– Bien. Tout d’abord, je m’appelle Valentin et j’ai 50 ans. Lorsque j’ai
rencontré ta mère, en 1996, je sortais d’une relation extrêmement douloureuse.
J’étais déjà père de deux enfants et leur mère venait de quitter le domicile
familial du jour au lendemain. Je les élevais seul.
– Tu as fait exactement la même chose avec ma mère !
– Zoé, s’il te plaît, écoute-moi.
Je me tus.
– Lorsque j’ai rencontré ta mère, ça a vraiment été le coup de foudre. Nous
nous aimions énormément, et elle apparaissait vraiment comme la mère idéale
pour mes enfants. Nous avons vécu 5 ans de pur bonheur, nous nous sommes
mariés… Et tu es née, en juillet 2002.
– Oui, ça je sais quand je suis née. Merci !
– Deux ou trois semaines après ta naissance, ta mère m’a avouée qu’elle n’avait
jamais voulu d’enfant et qu’elle vivait mal le fait d’être mère de famille.
Elle a très vite plongé dans l’alcool. J’ai fait tout ce que j’ai pu pour
l’aider à en sortir mais je n’ai pas réussi. Quand tu as eu cinq mois, elle
nous a mis dehors mes premiers enfants et moi, et elle t’a gardée. J’ai réclamé
ta garde en justice plusieurs fois, je ne l’ai jamais obtenue. Je voulais
tellement te récupérer, que j’ai fini par la harceler. Elle a porté plainte et a
eu gain de cause : je ne pouvais plus vous approcher, ni toi, ni elle. Alors
pour tenter de garder contact avec toi, je passais par la poste, mais tout ce
que je t’envoyais me revenait systématiquement. Ta mère m’a empêché de te voir
grandir.
– Elle a dit que tu étais parti pour une autre.
– Je n’ai jamais refait ma vie, depuis.
Je tombais de haut. Ma mère était donc la pire garce que la terre ait portée.
– Je…J’étais persuadée que tu m’avais abandonnée…
– Et ma plus grosse crainte était que tu penses cela, alors que ma plus grosse
blessure, qui ne sera jamais réparée, est de ne pas avoir pu te voir grandir !
Je n’ai pas vu tes premiers pas, tes premiers mots, tes anniversaires, ta
première rentrée…Je n’étais pas là quand tu étais malade, que tu avais peur,
que tu avais froid, que tu avais besoin d’amour…
Valentin commençait à avoir les larmes aux yeux. Il était vraiment touchant.
Mais je restai quand même sur mes gardes.
– C’est fou comme tu me ressembles, Zoé. Et c’est fou comme tu ressembles à ton
frère et à ta sœur.
– Ils…ils vivent toujours avec toi ?
– Oui, bien sûr ! Manon a 25 ans et elle est en 5ème année de médecine ; et
Romain a 24 ans et il fait des études dans le commerce international.
– Et toi, tu fais quoi ? demandai-je.
– Je suis PDG d’une boîte qui concerne le commerce automobile franco-allemand.
Je préfère ne pas t’encombrer avec les détails, tu trouverais sûrement cela
ennuyeux ! Et toi, ma fille ? Raconte-moi tout !
– Tout quoi ?
– Tout ! L’école, tes amis, tes loisirs, tes projets…
– J’ai été jusqu’en 2nde générale, je l’ai terminée et je devais passer en 1ère
L. Mais j’en avais marre de l’école alors j’ai arrêté.
– Quoi ?! Ta mère t’a laissée faire ?!
– Ma mère passe son temps à décuver ou à s’amuser avec des…gars.
– Je vois. Et tes amis ?
– Il n’y avait qu’Ashley, ma meilleure amie. Mais elle est partie vivre à
Sidney.
– Tes loisirs ?
– J’aime beaucoup dessiner. Et je suis passionnée de lecture.
– C’est un très bon point, ça ! Et tes projets, en as-tu ?
– J’aimerais faire des études de lettres, ou une école d’art… Je ne sais pas
trop encore… Je n’aime pas trop l’école alors…
– Très bien.
Mon père me prit les mains, me regarda droit dans les yeux et me dit :
– Toi et moi, on ne pourra jamais rattraper le temps que ta mère nous a volé,
et je ne pourrai jamais combler toutes les blessures que tu as eues depuis ta
tendre enfance. Mais maintenant que je t’ai retrouvée, il est hors de question
que je te lâche. Laisse-moi t’aider à reprendre ta vie en mains, d’accord ?
– D’accord.
– Bien. Dès demain, nous chercherons un lycée qui veuille bien t’accepter en
1ère L et…
– Mais papa, je ne veux pas reprendre l’école !
– Tu…tu…tu viens de m’appeler « papa » ?
– Oui…c’est…sorti tout seul.
J’avais senti comme un soulagement, après 17 années à avoir eu besoin de le
dire. Valentin se leva, fit le tour de la table et me serra dans ses bras.
– Je n’aurais jamais pu espérer meilleures retrouvailles ! Ma toute petite
fille adorée…
Après cette séquence « émotions », le PDG se rassit et reprit :
– Donc nous chercherons un lycée et puis nous…
– Je ne veux pas reprendre l’école !
– L’école, c’est trop important, Zoé ! Il est hors de question que tu restes
déscolarisée ! Il faut que tu fasses quelque chose de ta vie ! Je sais que tu
as eu l’habitude de te débrouiller toute seule depuis ton plus jeune âge, mais
tu as seulement 17 ans et il est temps que je me mêle de ton éducation. Ta mère
n’a pas assuré, mais moi je vais le faire ! Alors tu vas retourner au lycée. Et
tu vas avoir une vie digne de ce nom ! La vie, ce n’est pas que la débrouille,
l’angoisse et la peur, Zoé. La vie, c’est beaucoup plus que ça ! Tu me fais
confiance ?
– Ben… Je ne sais pas trop… On ne se connaît pas alors…
– C’est vrai, ria Valentin. Mais je te le demande : fais-moi confiance.
– D’accord.
– Ne prenons pas de dessert, il faut qu’on rentre. Manon et Romain sont
impatients de faire ta connaissance !
Nous montâmes dans la voiture de mon père, la plus jolie voiture dans laquelle
j’étais montée depuis ma naissance. J’avais l’impression qu’après 17 ans de
cauchemar, la vie me souriait enfin.
Valentin se gara dans l’allée d’une immense maison. Moi qui
avais toujours été obligée de dormir avec ma mère dans le clic-clac du salon,
dans notre 40m2, voilà que je découvrais que mon père était blindé de thunes et
avait une maison digne d’un palace.
– C’est… trop beau pour moi ! m’exclamai-je.
– Qu’est-ce que tu racontes ?! Tu es ma fille ! Rien n’est trop beau pour mes
enfants. Aller, entrons !
La porte d’entrée s’ouvrit sur une immense salle totalement décorée avec des
guirlandes et des ballons. Un jeune homme et une jeune femme coiffés tous les
deux d’un petit chapeau de fête pointu, s’écrièrent : « SURPRISE ! JOYEUX
ANNIVERSAIRE ZOE !! » dès qu’ils me virent entrer. J’en fus…bouche bée. Mis à
part à l’école durant une heure, on ne m’avait jamais fêté mon anniversaire. Il
arrivait même à ma mère de l’oublier, les jours où elle n’était pas sobre…
C’est-à-dire la plupart du temps.
– Nous avons quatre jours de retard, désolés ! dit Valentin en refermant la porte
d’entrée.
C’était donc pour ça qu’il n’avait pas voulu prendre de dessert au restaurant !
Je comprenais tout…
– Salut, je suis Manon ! dit ma sœur, enfin, demi-sœur, en venant m’embrasser.
– Et moi c’est Romain !
Mon frère et moi nous fîmes également la bise, puis nous nous installâmes à la
table de la salle à manger. Valentin arriva, un énorme gâteau entre les mains
et tous les trois chantèrent « Joyeux anniversaire ». Je soufflai mes 17
bougies et ils applaudirent.
– La famille est enfin réunie, dit Valentin, plein d’émotions. Mon rêve vient
de se réaliser !
Manon prit un selfie, puis Romain s’éclipsa quelques instants. Il revint les
bras chargés de cadeaux.
– Joyeux anniversaire, petite sœur ! s’exclama-t-il.
Jusqu’à maintenant, il n’y avait qu’Ashley qui m’offrait quelque chose à mon
anniversaire et quelque chose à Noël. Ma mère m’offrait un cadeau aussi, quand
elle n’oubliait pas. Là, j’avais sous les yeux pas moins de cinq cadeaux, que
je n’osais déjà pas toucher.
– Le papier cadeau est joli, dit mon père. Mais je suis persuadé que tu vas
préférer ce qu’il y a à l’intérieur !
Je souris puis ouvris le premier cadeau : un smartphone dernier cri flambant
neuf.
– Oh là là…m’exclamai-je. C’est…c’est trop !
– Je ne veux plus jamais te perdre, dit Valentin. Au moins comme ça, je suis
sûr de toujours garder contact avec toi. Et puis tu mérites mieux que le vieux
coucou qui gît dans la poche de ton jeans.
– Ouvre les autres, m’ordonna Romain.
Le 2ème cadeau était une attestation d’inscription à l’auto-école. Mon père
m’offrait le permis !
Puis j’eus une télé écran plat pour mettre dans ma chambre (MA chambre !) et un
ordinateur portable.
Je déballai le dernier cadeau et tombai sur une boîte d’archives.
– Euh… C’est quoi ?
– Ce sont toutes les lettres que je t’ai envoyé depuis que l’on s’est quittés,
et qui me sont revenues. Je savais que le moment viendrait où l’on se
retrouverait et je voulais que tu les aies.
Je lâchai la boîte et sautai dans les bras de Valentin. Ma mère n’était pas
affectueuse pour un sou, c’est Ashley qui m’a appris à faire des câlins. Je
n’en avais jamais fait à un membre de ma famille, c’était une première.
– Avant de manger le gâteau, il faut que je te montre quelque chose, me dit
Valentin lorsque je fus décollée de lui.
Il me prit par la main et m’emmena à l’étage, en face d’une porte sur laquelle
mon prénom était écrit.
– Voici ta chambre, ma puce.
J’ouvris la porte et découvris une magnifique chambre, remplie de jouets.
– C’est quoi tous ces jouets ? demandai-je.
– Ce sont tes cadeaux de Noël et d’anniversaire, que je n’ai pas pu t’offrir
avant. J’aurais bien gardé tes chocolats de Pâques mais…je crains que la date
soit dépassée ! ria Valentin.
J’hallucinai de toutes ces choses. C’était donc véritablement ma mère qui
m’avait menti, berné, raconté des mensonges… et elle m’avait fait la pire chose
que l’on puisse faire à son enfant : le priver d’un père aimant et volontaire !
Le gâteau terminé, je me couchai dans MA chambre, dans MON lit,
espérant de tout cœur que tout ceci ne soit pas un rêve.
Le lendemain, je me réveille dans MA chambre et descends dans la
cuisine. Le petit déjeuner est prêt.
– Salut la marmotte ! me lance Romain.
– Laisse ta sœur tranquille, dit Valentin. Avec toutes ces émotions, elle a
bien mérité une bonne nuit ! Comment vas-tu ma chérie ?
– Ça va ! Manon n’est pas là ?
– Elle est en stage ce mois-ci, répondit Romain. Bon, t’as faim ?
Nous déjeunâmes tous les trois et apprîmes à nous connaître. D’ailleurs, après
le petit déjeuner, Valentin s’éclipsa pour passer un coup de fil et je restai
seule avec Romain. Il avait vraiment l’air d’être un chouette gars. Il
m’expliqua que ça avait été dur pour lui de savoir qu’il avait une petite sœur
qu’il ne connaissait pas et un père qui avait un manque constant. Romain se
souvenait de ma naissance, il gardait même toujours sur lui une photo de lui
avec moi, bébé, dans ses bras.
Lorsque Valentin revint de son coup de fil, il m’annonça :
– Bonne nouvelle ! Le lycée européen accepte de te prendre en 1ère L dès
septembre ! Il faut juste que tu fasses une lettre de motivation !
– Papa, je ne retournerai pas au lycée.
– Si, tu vas y retourner.
– Non.
– Zoé, je suis ton père, tu me dois obéissance. Tu retourneras au lycée dès
septembre.
– Non mais attends, tu te prends pour qui ?! On se connaît depuis à peine 24h
et tu veux déjà m’imposer des choses ?!
– Ne me parle pas sur ce ton, s’il te plaît ! gronda Valentin. Je sais que tout
cela est nouveau pour toi. Je sais que l’on ne se connaît pas. Je sais que l’on
s’est terriblement manqués. Mais cela ne veut pas dire que je dois tout te
passer. Tu me fais une lettre de motivation, fin de la discussion ! Si tu ne
sais pas en faire, je veux bien t’aider.
– Je ne la ferai pas !
– Dans ce cas, tu montes dans ta chambre et tu redescendras quand la lettre
sera écrite.
– Pas question.
– Zoé, s’il te plaît. Ne m’oblige pas à te flanquer une fessée.
Beug instantané dans mon cerveau.
– Attends, tu viens de dire quoi, là ?
– Tu as 17 ans et ce n’est pas toi qui décide dans cette maison. C’est moi.
Puis ta sœur, puis ton frère, lorsque je suis absent. Mais pas toi. Si tu ne
m’obéis pas, je te punis. Si tu ne respectes pas la punition, il y en a une
plus sévère. Donc soit tu montes dans ta chambre et tu m’écris cette lettre –
ou non, mais sache que je suis plus têtu que toi – soit je t’allonge sur mes
genoux et je te donne une bonne fessée. Ce que je n’ai vraiment, vraiment pas
envie de faire. Alors ne m’y oblige pas, s’il te plaît, Zoé. Monte dans ta
chambre.
– Tu déconnes, là ?! m’exclamai-je.
Valentin me soutint un regard autoritaire.
– Il déconne, là ? demandai-je à mon frère.
– Non, il ne déconne absolument pas, me répondit-il.
– Oh là là… Mais vous êtes barges ! m’exclamai-je. J’ai 17 ans ! Pas 5 !
– Il n’y a pas d’âge pour recevoir une fessée. Tu montes dans ta chambre donc ?
insista le PDG.
– Non !
– Une fois.
– Mais ça ne va pas la tête, faut te faire soigner !
– Deux fois.
– Mais wesh… Calme-toi, là !
– Trois fois. Tant pis pour toi.
Alors que j’étais posée à côté de Romain dans le canapé, Valentin m’attrapa par
le bras et m’en sortis sans effort. Puis, il s’assit sur le fauteuil, me
bascula en travers de ses genoux et commença à me claquer les fesses sur ma
robe.
– Aïe ! Aïe ! Mais arrête ! Arrête, putain ! Aïe ! Aaaaaaaaïe ! Stop !
Il s’arrêta un moment et me demanda :
– Tu montes dans ta chambre ou je passe à une fessée déculottée ?!
– Je monte, c’est bon !
– Bon !
Mon père me laissa me relever. Avant de me laisser partir, il m’attrapa la main
et me gronda :
– Je n’aime pas le ton sur lequel tu me parles quand tu es punie, Zoé !
J’espère vraiment que ça ne se reproduira pas ! Dans ta chambre, maintenant !
Je fermai la porte derrière moi et me mis à pleurer sur mon lit.
Mon père avait l’air hyper gentil comme ça mais en fait, c’était un vrai barjot
!
J’ai toujours rêvé d’avoir un père présent, aimant, qui m’aide
dans toutes les étapes de la vie et qui m’impose en même temps des limites pour
me sécuriser. Ce père était là, bien réel, bien vivant et je venais de me
mettre en colère après lui. Lui comme moi allions devoir mettre de l’eau dans
notre vin. Enfin surtout moi, j’avais l’impression !
Ayant séché mes larmes, je me mis à écrire ma lettre de motivation.
On frappa à la porte.
– Entrez !
– Coucou ma chérie, me dit Valentin. Alors, ça avance ?
– J’ai presque terminé.
– Super.
Mon père fût ravi de la lettre. L’idée de retourner au lycée ne m’enchantait
pas mais ce n’était pas le problème pour l’instant.
– Zoé, tu sais si je t’ai donné une fessée, ce n’est pas pour t’embêter. C’est
juste pour t’apprendre qu’il y a des règles que tu dois respecter ici.
– J’ai compris, papa.
– C’est pour ton bien. A mon avis, ce n’est pas la dernière que tu prendras.
– Je sais papa…
– D’accord ma puce, dit-il en m’embrassant sur le front. Je ne t’embête pas
plus longtemps, alors. Je suis fier de toi, pour la lettre de motivation.
Je souris. C’était la première fois que l’on me disait cela. « Je suis fier de
toi ». Je sentais que ma nouvelle vie aux côtés de ma nouvelle famille allait
me plaire !
A suivre...
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