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Années 1950 : Le guide de survie d'Alice (Chapitre 3)

 


Lundi 16 octobre 1950


Nous sommes autour de la table pour le petit déjeuner en famille, comme tous les matins. Seuls Victor, Aliénor et papa manquent à l’appel, étant déjà sur la route du Pensionnat. Il est déjà huit heures moins le quart et, selon l’horloge de Bonne-maman, les aînés de la famille devraient arriver dans un petit quart d’heure à leur école, s’il n’y a eu aucun problème sur la route.

 

Ce matin, je suis de mauvaise humeur. Le fait d’avoir été punie hier soir ne m’a guère plu et je suis très grognon. Je mets plus de temps que d’habitude à déjeuner et à une demi-heure du départ pour l’école, je n’ai pas entamé ma deuxième tartine.

-          Lili, dépêche-toi de finir de déjeuner ! me gronda maman. Il est hors de question d’arriver en retard à l’école !

-          Je ferai comme j’en ai envie, répondis-je.

-          Plaît-il ?! s’exclama maman en s’arrêtant net. Que viens-tu de dire ?!

-          J’ai dit que je ferai comme j’en ai envie ! répétai-je avec courage ou folie.

Je fus tout de suite sortie de table et reçus instantanément une bonne claque sur les fesses.

-          L’insolence n’amène que des ennuis, Alice !

Je fondis en larmes, maman n’y étant pas allée de main morte.

-          Je vais vérifier que tes frères et sœurs se préparent correctement puis je reviendrai vers toi ! Tu as tout intérêt à passer à la vitesse suivante si tu ne veux pas recevoir une autre volée dès ce matin ! Jusqu’à dimanche, Bonne-maman et Bon-papa ne sont pas là pour nous assister papa et moi. Il va donc falloir que vous y mettiez tous du vôtre !

La réplique de maman me fit passer l’envie de la tester au petit déjeuner. Malgré mes pleurs, je réussis à finir de manger. Lorsque maman revint, je débarrassais mon couvert.

-          Va faire ta toilette, Lili, je me charge de nettoyer la table. Et fais vite !

 

Après m’être lavée au bidet et m’être habillée pour l’école, maman me coiffa. Pourtant, j’étais toujours de mauvaise humeur et je n’avais aucune envie d’aller à l’école. Bras croisés, je faisais la moue.

 

Tout le monde fût prêt à partir, sauf moi qui restais en haut des escaliers, refusant de descendre mettre mes chaussures et mon manteau. Tous mes frères et sœurs s’apprêtaient à sortir, seul Clément prenait du temps à mettre ses chaussures, des souliers neufs qui ne s’étaient pas encore faits à ses pieds.

-          Alice, ça suffit ! Me gronda maman. Descends immédiatement te préparer ! Je vais finir par perdre patience !

Je restai en haut des escaliers. Maman vint me chercher et me fit descendre en me tirant l’oreille.

-          Tu viens d’épuiser mon stock de patience, Alice ! Dépêche-toi de mettre tes chaussures !

Je résistai en me massant l’oreille que ma mère venait de lâcher. Voyant que je faisais toujours ma tête de mule, maman m’avertit :

-          Je sens que tu vas prendre une bonne fessée d’ici quelques secondes !

-          Non maman ! priai-je, ayant eu mon quota ce matin.

-          Oh que si ! Si tu ne te dépêche pas tout de suite, je te jure que c’est ce qui va arriver ! Si ton père n’était pas aussi indulgent avec toi, jamais tu ne te permettrais un pareil comportement ! Tu filerais droit, comme les autres !

Les larmes aux yeux, je m’affairai à mettre mes chaussures et mon manteau et nous partîmes pour l’école, à l’heure.

 

Même si je fis tous les efforts du monde pour me tenir correctement, tout ne se passa pas comme je le souhaitais ce matin : Evelyne, une camarade de classe, m’envoya une boulette de papier à la figure, que je lui retournai. La classe se transforma très vite en champ de bataille et lorsque maman se détourna du tableau, elle hurla :

-          Arrêtez ça immédiatement !

Tout le monde se tut et on ne vit plus aucune boule de papier en l’air.

-          Qui a commencé ça ?! Qui ?!

-          C’est Alice, m’dame ! dirent Evelyne et ses amies.

-          Non, c’est Evelyne, madame ! rétorquèrent mes amies.

Une petite guerre existe depuis la rentrée entre Evelyne Mallard et moi. Elle ne m’aime pas car elle est fille de paysans pauvres alors que je suis fille de la famille la plus aisée et respectée de la région. Pourtant, nos parents sont très amis depuis longtemps. Tellement, qu’Evelyne est la filleule de mon père. Pourtant, elle est ma pire ennemie !

-          Venez à mon bureau, toutes les deux ! ordonna maman.

-          Mais, je n’ai rien fait ! protestai-je. C’est cette idiote qui a commencé !

-          Ne me traite pas d’idiote, compris ?! me gronda Evelyne.

-          Je dis ce que je veux ! rétorquai-je.

-          Silence ! cria maman. Venez à mon bureau, toutes les deux, j’ai dit !

Je sortis de mon bureau et m’avançai, Evelyne m’imitant.

Il est très rare que ma mère lève la main sur l’un de ses élèves (elle ne l’a fait que deux fois en douze ans de carrière), mais étant sa fille, j’ai beaucoup plus de risques de recevoir une volée que les autres !

Maman fit un pas en avant et je fermai les yeux, de peur qu’elle ne m’attrape et que je passe un sale quart d’heure. Mais la maîtresse d’école attrapa plutôt Evelyne et lui colla une claque sur le derrière, tellement salée qu’elle résonna dans toute la classe.

-          Tu pourras bien croire que j’ai des yeux derrière la tête, gronda maman à Evelyne, mais je sais que c’est toi qui as commencé à embêter Alice ! Je rendrai visite à tes parents après l’école pour leur parler de ton comportement en classe ! Au piquet !

Evelyne s’exécuta, des larmes coulant sur ses joues.

-          Maintenant, je veux tous les élèves en file indienne devant mon bureau, cahier en main ! Tous ceux à qui il manque une page seront coupables d’avoir participé à la bataille et écoperont d’une punition !

Tous les élèves s’exécutèrent, parfois à contrecœur.

-          Alice, pour avoir répondu à Evelyne au lieu de m’avoir rapporté sa bêtise, tu me feras trente lignes d’écriture pour demain. Sans fautes et sans ratures. Je te laisserai la faire signer à ton père.

Moi qui commence tout juste à savoir écrire correctement, cela allait me prendre une éternité pour faire cette punition ! Une chose est sûre : il fallait à tout prix que papa l’ignore !

Les trois quarts de la classe écopèrent de la même punition. L’ambiance n’allait pas forcément être très chaleureuse dans les chaumières ce soir !

 

A la fin de la matinée, maman annonça que nous passerions tous au tableau demain pour une interrogation orale sur la leçon d’aujourd’hui. Tout le monde redoute les interrogations orales de ma mère : à chaque mauvaise réponse, nous perdons un point entier sur la note finale ; et les mauvaises notes n’amènent que des ennuis !

 

Le midi, à table, papa ignorait encore tout de ma punition et il valait mieux que cela en soit ainsi.

 

Après le repas, j’attrapai mon frère dans un coin :

-          Jacques ! lui dis-je.

-          Qu’est-ce qu’il y a, Lili ?

-          J’ai un service à te demander ! Maman m’a donnée une punition à faire et je me demandais si tu pouvais la faire à ma place !

-          Combien de lignes y’a-t-il ?

-          Trente. Mais c’est juste de l’écriture…

-          Trente ! s’exclama Jacques. Mais Lili, tu crois que je n’ai que ça à faire ?!

-          Je t’en supplie, Jacques ! Tu écris beaucoup plus vite que moi ! Et si tu le fais, je te promets que les prochains bonbons que Bonne-maman m’achètera à la boulangerie seront pour toi !

-          Marché conclu, je te ferai ta punition. Tu viendras me dire ta phrase quand je rentrerai de l’école.

Je sautai dans les bras de mon frère.

-          Tu es le meilleur frère du monde ! lui dis-je.

-          Je sais. Bon maintenant laisse-moi, il faut que j’aille aider maman et Clément à faire la vaisselle.

 

Mes grands-parents partis en voyage, c’est ma cousine Anne-Marie qui vient me garder tous les après-midis de la semaine.

 

Au réveil de ma sieste, Anne-Marie m’emmena en balade à vélo, empruntant celui de maman après avoir eu son autorisation, ce que j’appréciai grandement. Nous ne rentrâmes qu’en même temps que ma fratrie et je leur racontais que j’avais passé une excellente après-midi à rouler à vélo sur les petits chemins de Provence.

Anne-Marie nous fit goûter et faire nos devoirs. Jacques fût très discret et fit ma punition en trois fois moins de temps que moi si j’avais eu à la faire. Je le remerciai encore une fois et l’embrassai sur la joue. Puis, je partis cacher ma punition dans mon cartable et allai prendre mon bain, maman venant tout juste de rentrer après être passée voir les parents d’Evelyne.

 

Peu avant le dîner, oncle Marcel passa chercher Anne-Marie, sa fille. Papa lui proposa un verre de whisky, oncle Marcel accepta.

 

Oncle Marcel est le directeur de l’école des garçons. Il est le grand frère de maman et l’a d’ailleurs pratiquement élevée, leurs parents ayant rejoint très tôt le Seigneur.

Sortant des toilettes, je devais absolument passer par le salon pour aller me laver les mains dans la salle de bains du rez-de-chaussée ; mais je craignais qu’oncle Marcel dise quoique ce soit sur la punition que maman m’avait donnée (puisqu’il était au courant, sa fille Lucie, dans ma classe, ayant été punie aussi) ; et que papa soit mis au parfum.

Entendant les hommes discuter vivement à propos de la situation politique du pays, je pris mon courage à deux mains et me dirigeai telle une fusée vers la salle de bains. Ce fût lorsque j’en ressortis qu’oncle Marcel me lança :

-          Alors ma petite Lili, n’as-tu pas trop mal à la main ?

-          Comment ça ? Tu devrais avoir mal à la main, ma Lili ? me demanda papa.

De toute évidence, oncle Marcel est un sadique qui a envie que je me fasse punir.

-          Non, c’est parce que nous avons beaucoup écrit en classe ce matin, dis-je.

-          Et surtout parce que ta mère t’a donné une punition ! ajouta mon oncle. Comme aux trois quarts de la classe !

-          Une punition ?! me gronda papa. Comment se fait-il que je ne sois pas au courant ?! Ariane !

Maman arriva de la cuisine, sur l’appel de papa.

-          Mon ange, tu as donné une punition à Lili ? demanda le médecin à sa femme.

-          Exactement, répondit maman. Elle a participé à une bataille de boulettes de papier. Elle n’en était pas l’initiatrice mais elle a été punie comme tous les élèves qui y ont participé.

-          Et tu me l’as caché ?! me gronda papa.

-          Je… J’a… Je craignais de prendre… Je craignais que vous me donniez une fessée, alors, je n’ai rien dit, bégayai-je en baissant la tête.

-          Il est vrai que depuis trois jours, tes fesses n’ont que peu de répit, répliqua papa, parce que tes bêtises n’en ont pas moins ! Je ne t’aurais pas fessée pour une simple bataille de boulettes de papier mais je me tâte désormais à le faire car je ne supporte pas que l’on me cache des choses !

Une goutte de sueur perla sur mon front et ma bouche devint complètement sèche.

-          Cette punition est-elle faite ?! me demanda maman.

Je hochai la tête.

-          Va me la chercher et dépêche-toi ! m’ordonna-t-elle. Je t’ai demandé de la faire signer par ton père !

Je courus la chercher dans mon cartable, le cœur battant à cent à l’heure. Lorsque je tendis la punition à papa, il tiqua un peu et la donna à maman, qui confirma les soupçons de son mari :

-          Nous prends-tu pour des imbéciles, Alice ?! Nous avons beau avoir dix enfants, nous savons reconnaître l’écriture de tous ! Ce n’est pas ton écriture, Alice ! Il n’y a que Jacques pour avoir une telle application dans les majuscules !

-          Qu’as-tu dit à ton frère pour qu’il fasse ta punition ?! me demanda papa.

-          Qu’il aurait les prochains bonbons que Bonne-maman m’achèterait, avouai-je, la voix tremblotante, signe que je n’allais pas tarder à pleurer.

Jacques fût immédiatement appelé à venir dans le salon. Lorsqu’il vit la punition dans les mains de maman, il se raidit.

-          C’est ton écriture, n’est-ce pas ?! le gronda maman.

-          Oui maman, répondit mon frère, les yeux rivés vers le sol.

-          Je te sais extrêmement serviable, mon fils, mais de là à faire la punition de ta sœur à sa place et en plus à nous cacher tout ça, c’est inédit chez toi ! gronda papa à Jacques.

-          Papa, reprit Jacques. J’ai juste eu de la peine pour Lili. Elle est encore petite, elle commence tout juste à savoir écrire et ces trente lignes lui auraient pris une éternité, contrairement à moi qui suis plus grand et plus rapide.

Papa sembla d’accord avec Jacques. Cependant, maman, impassible, dit :

-          Ce n’est pas toi qui as chahuté en classe, dit maman. Si j’ai puni ta sœur, c’est qu’il y a une bonne raison !

-          Il est vrai que trente lignes, c’est peut-être un peu sévère pour une enfant de cinq ans, admit papa.

-          C’était soit ça, soit une fessée pour tous les élèves qui avaient participé à cette bataille, se justifia maman. J’ai préféré donner des lignes.

-          Tu es trop bonne, ma sœur, dit oncle Marcel qui a l’habitude de lever la main sur ses élèves dès que l’occasion se présente.

-          Quoiqu’il en soit, c’était à Lili de faire cette punition, dit papa. Pas à toi, Jacques !

Mon frère ne répondit pas. Maman déchira la punition devant nos yeux et gronda :

-          Demain après-midi, Lili fera cette punition. Et toi Jacques, en rentrant de l’école, tu me copieras cent fois : « Je ne dois rien cacher à mes parents » ! Vous aurez intérêt à ce que cela soit fait !

-          Et pour nous avoir caché la punition de ta petite sœur, tu es privé de sortie jusqu’à la fin de la semaine, Jacques ! annonça papa.

Maman afficha une mine ahurie, tandis que Jacques fondait en larmes en priant :

-          Papa, je vous jure que c’est la première et la dernière fois que cela se produit ! Je vous en prie !

-          Je crois que cette privation est amplement méritée, il n’y a aucune discussion à avoir ! gronda le médecin.

Jacques, qui n’a vraiment pas l’habitude d’être puni (cela devait être la troisième fois de toute sa vie !) et dont le passe-temps favori est de sortir jouer avec ses amis, ne put s’arrêter de pleurer.

-          File dans ta chambre, maintenant ! gronda papa à Jacques sans tenir compte de ses pleurs.

Mon frère s’exécuta, pleurant toutes les larmes de son corps. Le médecin me dit alors :

-          Tu peux aller jouer, Lili.

-          Pardon ?! s’exclama maman.

-          Qu’as-tu, ma chérie ? demanda papa à sa femme.

-          Ta fille chahute en classe, rentre à la maison avec une punition qu’elle te cache, fait du chantage à son frère pour qu’il la fasse à sa place, et tout ce que tu trouves à lui dire, c’est « tu peux aller jouer ? » !!

-          Elle fera ses trente lignes demain après-midi, se défendit papa.

-          Et tu trouves cela juste ?! Alors que Jacques, qui n’a fait qu’aider sa sœur par pitié, est consigné !

-          Ariane, Lili est encore petite et…

-          Elle est bien assez grande pour te mener en bateau, Jean-Pierre ! Cela se voit comme le nez au milieu de la figure ! Eh bien puisque tu n’es pas décidé à punir ta fille, je vais le faire !

Maman m’attrapa le poignet et je priai instantanément :

-          Nan, maman ! Pitié ! Papa, au secours ! Au secours, papa !

Malgré mes supplications, mon père ne bougea pas et les cinq claques qui tombèrent sur mon derrière m’arrachèrent de grosses larmes. Néanmoins, même si je pleurais, j’entendis parfaitement maman me gronder :

-          Je n’accepte absolument pas le fait que tu te sois servie de l’extrême gentillesse de ton frère pour te sortir d’une situation qui te déplaît ! C’est intolérable, Alice ! Jacques est sûrement le plus serviable de cette famille et je pense qu’il subit déjà assez de brimades de la part de Léonie et Gabrielle pour que tu te mettes à le persécuter ! Car oui, lui faire du chantage et tenter de l’amadouer pour qu’il fasse ta punition à ta place, c’est de la persécution ! C’est une très grosse bêtise, ça, Alice ! Et ça méritait amplement une bonne fessée, contrairement à ce que ton père peut penser ! File au piquet, maintenant ! Et que l’on n’entende plus parler de toi pour ce soir !

J’obéis, une main essuyant mes larmes, l’autre me massant les fesses.

 

Au dîner, je n’ouvris pas la bouche. Même si la douleur avait disparu, j’étais encore persuadée que maman me faisait la tête.

 

Une fois rassasiée, j’allais me laver les dents et me préparer pour aller dormir. Je descendis dans le salon pour écouter l’histoire collective racontée tous les soirs, soit par maman, soit par papa. Puis, nous fîmes la Prière du Soir tous ensemble dans la chapelle. Ensuite, j’allais me coucher ; maman vint m’embrasser et papa vint me border. Seul avec moi, il en profita pour me dire :

-          Tu sais ma Lili, tout à l’heure, j’ai pris une mauvaise décision.

-          Ah bon ? demandai-je. Vous parlez du fait que vous ne m’avez pas aidée quand maman m’a punie ?

-          Non, je parle du fait que j’aurais dû te punir, au lieu que maman ne le fasse. C’était injuste de punir uniquement ton frère alors que tu avais fait le plus gros de la bêtise. Je voulais donc te dire que cette situation ne se reproduira pas. C’est compris ?

-          Oui.

-          Oui qui, Alice ?

-          Oui papa.

-          Bien. Tâche de te tenir correctement à l’école, alors. Car je ne laisserai pas passer la prochaine fois. En attendant, fais de beaux rêves ma Lili. Bonne nuit !

-          Bonne nuit, papa.

-          Je t’aime.

-          Je vous aime aussi, répondis-je, avant que mon père ne ferme la porte de ma chambre.

Ce n’était pas le premier petit recadrage de la part de mon père, et sûrement pas le dernier. Je m’endormis donc sans aucun souci !


A suivre...

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  Mercredi 9 octobre 2019.                   Pas de grasse matinée ce matin : Héloïse nous réveilla à neuf heures pour que nous puissions travailler un peu sur nos cours. J’étais grognon au possible en me réveillant, comme cela m’arrive rarement. En m’asseyant à table au petit déjeuner, je fus agacée par Anaïs, toujours pleine d’énergie et en forme le matin. Je déteste les gens du matin. Ou les gens. Ou le matin.                   Après m’être préparée et habillée pour la journée, je remontai dans ma chambre et me sentis toujours aussi grognon. Je ne savais pas encore pourquoi mais j’avais l’impression que cette journée allait être désagréable au possible. Personne n’avait intérêt à me voler dans les plumes : je m’étais levée du pied gauche !                 J’ouvris mes cahiers et commençai à travailler. Soudain, seulement quelques minutes après avoir commencé mes devoirs, j’entendis : -           Louise ! Anaïs ! Marie ! Descendez immédiatement ! Héloïse avait l’air f

Le tutorat de Little Princess - Partie 3 (Préambule)

  * 2 exclusions pour insolence (abusives, les exclusions. Je le précise quand même…) * excès de vitesse quotidiens * textos au volant * médicament pris occasionnellement * devoirs non faits * couvre-feu respecté mais plus par réelle fatigue que par volonté Voilà le palmarès. Depuis l’arrêt du tutorat avec Thomas puis avec Antoine, voilà le palmarès. Mon palmarès.                   Evidemment, Yves, mon nouveau tuteur n’est pas content. Mais pour le moment, je suis loin de sa main et je me fiche complètement qu’il soit content ou non : je fais ce que je veux quand je veux où je veux.                   Cependant, cela risque de me coûter cher. Selon le tableau mis en place, à l’heure actuelle j’en suis à exactement cinquante-cinq minutes de fessée et deux cent dix claques supplémentaires. J’attends de voir. Je sais qu'Yves ne peut pas tout punir : cela fait beaucoup trop de choses (vous allez me dire que c'était ce que je disais pour Thomas et au final il

Journal d'une étudiante accueillie (Chapitre 24).

  Je sais que beaucoup d'entre vous attendaient ce chapitre... Certains me le réclamaient même récemment alors qu'il était en cours d'écriture ! Le voici... C'est mon petit cadeau de Noël en avance... Régalez-vous ! Peace. L.P. Lundi 7 octobre 2019.      Ce matin, mes sœurs et moi pûmes nous reposer convenablement puisque nos professeurs étaient tous les deux absents. Nos parents partirent au travail sans nous réveiller, pensant sûrement que nous étions épuisées à la suite des émotions d’hier soir.                 En m’habillant, je pris le temps d’admirer mon popotin dans le miroir : plusieurs bleus s’étaient formés sur ma lune ronde, justifiant la difficulté que j’avais éprouvé à m’asseoir dans mon lit au réveil. Tom ne m’avait pas loupée ; mais alors, vraiment pas ! J’appris par mes sœurs que Dana n’avait guère été plus gentille avec elles : les deux instruments préférés de notre mère, à savoir le martinet et le tapetapis avaient été de sortie ; ils ont paraît-il f

Les aventures de Little Princess avec son nouveau tuteur (séance 1)

                   Depuis plus d’un an, j’avais un super tuteur (que nous appellerons Gabriel). Tout se passait bien entre Gabriel et moi, et un réel équilibre s’était créé entre lui et mon fiancé (que nous appellerons Hugo), qui se chargeaient ensemble de ma discipline.                 Et puis un jour, ça n’a plus été et nous avons dû cesser notre relation. Si Hugo et moi gardons notre forte amitié avec Gabriel, le tutorat prit fin. Retour à la case départ. Il fallait de nouveau trouver un tuteur.                 C’est pour cela que je postais une annonce ici même. Cette annonce était de ce type :   « À la suite d’un superbe tutorat d’un an, nous avons été contraints de nous séparer… Quel dommage… ! Mais mes études n’étant pas terminées (encore 3 ans !) j’ai toujours besoin d’un tuteur ! Je suis donc une jeune (enfin plus si jeune que ça, en fait !) étudiante de 28 ans, recherchant un tuteur / une tutrice : –          de minimum 30 ans (difficile d’accepter l’autorité de

Années 1950 : le guide de survie d'Alice (Chapitre 2)

  Dimanche 15 octobre 1950        Neuf heures : maman vient me réveiller. Le dimanche, nous allons à la messe qui débute à dix heures et demie. Du coup, maman nous lève relativement tôt pour pouvoir vérifier que tout le monde est bien apprêté pour le Seigneur.          A la messe, nous nous consacrons entièrement au Seigneur. Victor et Gus font partie des enfants de chœur qui servent la messe aux côtés du père Antoine (qui n’est autre que le grand frère de papa), ils se doivent d’être irréprochables !        L’église est le seul endroit où j’arrive à me tenir sage longtemps car j’aime beaucoup chanter. Cependant, je n’aime vraiment pas la sortie de messe. Mes parents et grands-parents ont toujours des tas de gens avec qui discuter et moi, ça m’ennuie beaucoup ! Victor et Nono proposèrent alors de nous ramener à la maison pour que les adultes puissent continuer à discuter tranquillement ; papa accepta.          Lorsque nous rentrâmes à la maison, nous effectuâmes les mêmes

Un joli fantôme du passé (Chapitre 19)

  -           Quoi ?! s’exclama Manon. Depuis quand tu as une petite copine ?! -           Cela fait plusieurs mois maintenant, répondit papa. Peut-être cinq ou six. Je voulais être sûr que cela fonctionne. Il est maintenant temps de vous la présenter. -           Cinq ou six mois, et tu ne nous en parles que maintenant ?! s’offusqua mon frère. -           Je vous signale qu’avant d’être votre père, je suis un homme qui a le droit à sa vie privée ! milita papa. -           Non ! protesta Manon. Non et non ! C’est ton tout premier job d’être notre père ! Tu nous as toujours dit que tes enfants passaient avant tout ! -           C’est le cas, se défendit papa. Cela ne veut pas dire que je dois tout vous dire ! -           Bien sûr que si ! insista Romain. -           Ah oui ?! rétorqua papa. Et vous me dîtes tout, vous ?! Un silence suivit. Mon frère finit par le briser : -           Ce n’est pas pareil ! Il y a des trucs qu’on ne te dit pas pour te protéger ! -