Gabriel est donc venu me voir
mercredi dernier.
Nous étions très heureux de nous retrouver. Depuis
fin août, la séparation avait été très longue. Gabriel fait partie de ces gens
tellement ancrés dans mon cœur que ce dernier se serre dès qu’ils s’éloignent
de moi. Mes émotions décuplées et moi, on a du mal à gérer ça.
Mon frère de cœur et moi nous offrons un restaurant
et discutons énormément de la vie en règle générale. Puis, je lui fais visiter
la maison dans laquelle Hugo et moi allons emménager. Gabriel est heureux pour
nous, et je suis heureuse de lui montrer cela : Gabriel fait partie de
notre famille intime et j’ai besoin de partager avec lui chaque événement dans
ma vie.
Alors que nous finissions la visite dans une des
trois chambres de la maison, je lançai à Gabriel :
-
Bon, on va se boire un verre dans un café ?
-
Il faut qu’on discute, avant, me répond-il.
Je soupire de désespoir puis
lui demande :
-
Tu as lu mon article « Remise en question » ?
-
Je l’ai lu.
-
Et qu’en penses-tu ?
Après avoir soupiré à son
tour, Gabriel me répondit :
-
Je pense comme Hugo. Ce n’est déjà pas glorieux
quand tu as un cadre, alors quand tu n’en as pas… Après, j’ai ma part de
responsabilité là-dedans.
-
Pourquoi tu dis ça ?
-
Je me suis engagé auprès d’Hugo et toi, et je ne
suis pas assez là.
-
Tu ne nous as jamais promis la régularité,
rappelai-je. On le savait dès le départ qu’avec ta vie ultra speed, ce serait
compliqué…
-
Oui mais je me suis quand même engagé. Et je suis
pas assez présent. Donc j’ai ma part de responsabilité là-dedans.
-
Je ne suis pas d’accord avec toi.
-
Ah mais tant pis… Je sais que j’ai une grande
part de responsabilité !
Cela m’embêtait énormément que
Gabriel pense cela. De mon point de vue, j’étais la seule responsable.
-
Par contre, ce qui m’embête, c’est que tu ne
cherches personne d’autre pour me seconder, m’avoua-t-il.
-
Si, bien sûr que si ! me défendis-je. Je
dois voir quelqu’un le 30 novembre…
-
Pourtant, tu dis que tu veux arrêter…
-
Exact. Mais si je décide de ne pas le faire,
autant ne pas perdre plus de temps que nécessaire.
-
Et… Tu le sens comment ce nouveau candidat ?
-
Il a compris que j’étais un gros poisson. Il a compris
que la situation était sérieuse. Il a l’air intelligent, il sait de quoi il
parle.
-
Mais ?
-
Mais j’ai peur qu’il ne soit pas à la hauteur. C’est
toujours le même problème. Et il n’y a qu’avec une première séance que je le saurais.
Et ça aussi, ça m’saoule. J’suis pas une poupée qui prête ses fesses au premier
venu…
Gabriel sait combien c’est
compliqué pour moi de prendre une fessée. Je me passerais déjà volontiers d’une
séance lors d’un tutorat, alors une séance d’essai…
-
Mais effectivement, c’est la seule façon de le
savoir, confirma mon frère de cœur. Je suis conscient que depuis que tu as
stoppé avec Thomas, tu es allée de déception en déception et que c’est compliqué
de retrouver la motivation à chaque fois…
-
Absolument ! On me fait espérer pour qu’au
final ça ne colle pas… Je préfère les candidats qui ne me promettent rien,
plutôt que ceux qui me font espérer pour rien.
-
Je sais.
-
C’est à cause de tout ça que je cherche une
solution alternative, dis-je.
Il y eut un silence de
plusieurs secondes, puis Gabriel me lança :
-
Et si je ne venais pas à Noël ?
-
Comment ça ? dis-je après avoir accusé le
coup de poignard en plein cœur.
-
Si ton tableau n’est pas vert, je ne viens pas.
-
Tu sais très bien que ça ne va pas marcher,
dis-je. Le chantage, ça ne fonctionne pas. Ça aura l’effet inverse. Je me dirai
« Puisqu’il ne vient pas, à quoi bon faire des efforts ? ». Ça
va me déprimer plus qu’autre chose, ce sera totalement contre-productif.
-
Oui, je me doutais que ça ferait l’effet inverse
mais je tente quand même… Et si je ne viens plus du tout ? Tant que ton
tableau n’est pas vert, on ne se voit plus.
-
Pareil, insistai-je. Ça fera l’effet inverse.
-
Bon, il ne reste plus qu’une solution alors…
Lucie, trouve un truc. Et trouve-le
maintenant. Trouve-le immédiatement sinon dans dix secondes t’en prends une.
-
Attends ! dis-je pour gagner du temps. On n’a
pas exploré toutes les possibilités !
-
Je n’en vois pas d’autre.
-
Il y a une solution à laquelle j’ai pensé :
demander à mes élèves. Le matin et le midi, leur demander de me faire penser à
prendre mes médicaments. Vu qu’ils sont vingt-trois, y’en a forcément un qui
pensera à me le dire. Et ils seront heureux d’avoir cette responsabilité.
-
C’est une bonne idée, ça ! Oui, tu peux
essayer ça !
-
Le problème, c’est pour les trois jours de la
semaine où je ne vais pas en classe…
-
En effet.
-
Le week-end, Hugo est là. En général, il pense à
me préparer mes médicaments. Mais le mercredi…
-
Attends, tu te fiches de moi, Lucie ?! UN
jour dans la semaine ! Tu dois faire l’effort d’y penser UN jour dans la
semaine ! Ça va aller, non ?!
-
Oui… Au pire, ce n’est pas grave si je ne prends
pas mes médocs seulement un jour par semaine, si ?
Je vis Gabriel monter en
pression. Il me dit :
-
Punaise, t’as failli passer au travers… !
Alerte ! Alerte !
Lucie, trouve un truc ! Viiiite !!!
-
Nan, nan !! me défendis-je. Attends !!
C’est bon, je vais faire l’effort d’y penser. Promis.
Sur le coup, ni Gabriel ni moi
pensâmes au fait que j’étais en arrêt de travail pour une luxation du genou. Je
ne retournerai au travail que le mardi 29 novembre, si tout va bien d’ici là.
-
Tu sais, je culpabilise quand ton tableau est
rouge, me dit mon tuteur. Je me dis que c’est ma faute.
Je me jetai dans ses bras pour
le rassurer :
-
Mais non ! Pas du tout ! Ce n’est pas
ta faute du tout !
-
Pourtant, je culpabilise quand même !
L’ampoule à idées s’alluma
dans ma tête.
-
Ça aussi, ça pourrait marcher. Je serais capable
de faire plus d’efforts pour éviter que tu culpabilises.
Le fait que mon grand frère se
flagelle à cause de moi ne serait pas supportable.
Après un long moment dans les bras l’un de l’autre à
se dire tout l’amour fraternel que nous avions l’un pour l’autre, nous partîmes
sur ces nouvelles solutions : demander à mes élèves de me rappeler de
prendre mes médicaments, et penser à la culpabilité que ressent Gabriel chaque
fois que je n’ai pas envie de faire d’effort.
Avant de sortir de ma maison, Gabriel me dit :
-
Je suis sur Paris la semaine prochaine. Si je vois
que ça ne fonctionne pas et que ton tableau est toujours rouge, on repassera
aux anciennes méthodes !
Message reçu. J’allais
vraiment me démener pour éviter d’avoir à prendre une fessée. Au final, ma psy
dit peut-être vrai : c’est parce que je ne veux vraiment plus la prendre
qu’elle sera doublement efficace. Il va falloir que je me motive. D’ici ma
reprise du travail, il va falloir que je pense à Gabriel à chaque fois que « j’ai
la flemme ».
Depuis une semaine, le tableau n’est pas entièrement
rouge mais il n’est pas entièrement vert non plus. Il est disons… Plus coloré
qu’à la normale. J’espère que mes efforts sont visibles car j’essaie vraiment d’en
faire. Pour ce qui est des médicaments (item qui importe le plus à mon meilleur
ami), sur 7 jours, j’en suis :
-
Médicaments du matin : 3 rouge (non pris),
2 orange (pris mais pas à la bonne heure), 2 vert (pris).
-
Médicaments du midi : 4 vert (pris), 3
rouge (non pris).
Il va également falloir que je
fasse attention à mon sommeil car c’est toujours le manque de sommeil qui déclenche
mes crises intestinales. Je vais donc partir à la recherche d’une solution très
costaude qui puisse enfin me faire accepter ce p*tain de couvre-feu. Des idées ?
A suivre…
Coucou,
RépondreSupprimerTu soulèves des questions bien difficiles.
Je pense que tu as besoin d'un cadre.
Gabriel pourrait-il débarquer à l'improviste lorsqu'il constate que tu dérapes beaucoup trop à son goût ? Sans être prévenue, tu ne peux plus contrôler ce qu'il va te dire ou non. Tu as juste à remplir ton tableau et espérer qu'il ne débarque pas un soir à la maison.
A défaut de faire des efforts pour toi même, fais les pour ceux qui t'aiment et le projet bébé 😁. Avoir un enfant va changer ta vision des choses et tu vas devoir prendre soin de toi pour que ce petit être, la chair de ta chair puisse grandir avec une maman en pleine forme.
Bon courage
😘
Hello !
SupprimerAh, finalement tu as changé d'avis :) En tout cas, j'ai parlé de ton commentaire à Gabriel et débarquer à l'improviste pourrait être une bonne solution, effectivement ! Nous allons essayer :)
On verra lorsque cela m'arrivera :) En attendant... il faut que je continue à trouver des solutions ! ^^
Merci pour ton com !!