Depuis début 2023, j’ai décidé de consulter une naturopathe en plus de ma psy pour m’aider à gérer mes émotions. J’ai donc rencontré Sophie, une naturopathe-relaxologue-massothérapeute (oui, ça en fait des diplômes !) pour une première fois à la suite d’un chèque cadeau qu’une amie proche m’avait offert à Noël.
Dès
que j’ai rencontré Sophie, ça a tout de suite matché : c’est comme si nous
nous connaissions depuis toujours. Depuis cette première séance, nous ne nous
quittons quasiment plus ; et le week-end dernier, j’ai pu fièrement lui
présenter mes amis les plus proches, dont Gabriel.
Ma dernière séance avec Sophie
remonte à environ trois semaines : je lui parlais de ma souffrance
vis-à-vis de l’anarchie qui règne dans ma vie, tout ça parce que je n’arrive
pas du tout à me discipliner. M’auto-contraindre est très compliqué pour moi,
tout comme m’auto-frustrer. C’est même quasi-impossible.
-
Le problème, me
disait Sophie, c’est qu’à chercher et repousser des limites qui n’existent pas
pour toi, tu vas finir par te tuer. Je sais de quoi je parle.
-
Comment ça ?
interrogeai-je.
-
J’étais comme toi
avant d’être mère. Je n’avais aucune limite et je flirtais clairement avec le
danger extrême. Je ne compte même plus le nombre de fois où j’ai fini à
l’hôpital avec une jambe dans le plâtre ou autre ! Mais le jour où je suis
devenue mère, ça m’a calmée. Je me suis dit qu’un petit être dépendait de moi
pour vivre. Tu dois te dire qu’Hugo est adulte et que même s’il t’arrive
quelque chose, il s’en remettra même avec difficulté ; mais un père ou une
mère, on en a qu’un(e). Ça ne se remplace pas. Donc le rôle de mère m’a calmée.
Cela étant, je ne te dis pas que je suis totalement calme, hein ! J’ai
toujours besoin d’un garde-fou.
-
Un
garde-fou ? demandai-je souhaitant avoir des précisions.
-
Oui, mon mari.
C’est lui, mon garde-fou. Dès que je franchis une limite, il me passe une
soufflante très corsée et je me ratatine sur place. Heureusement qu’il est là.
Il te faut un garde-fou, Lucie, sinon, tu vas te foutre en l’air. Et même quand
tu seras mère, il faudra que tu gardes ce garde-fou. Pas aussi régulièrement
aujourd’hui, j’en suis certaine ! Mais quand même. Il faut toujours une
piqûre de rappel aux gens comme nous. Il faut que tu te trouves ton garde-fou,
Lucie !
-
J’en ai un,
avouai-je. Mais…
-
Mais quoi ?
me demanda Sophie.
-
Si j’entre dans
les détails, il faut que je t’en parle, expliquai-je. Il faut que je te dise ce
que c’est. Et j’ai trop honte pour en parler.
-
Tu crains que je
te juge ? se renseigna Sophie. Parce que crois-moi, je suis la dernière
personne qui te jugera !
-
Ça, je
sais ! dis-je en étant intimement convaincue de l’idée. C’est juste que
j’en ai vraiment honte…
-
Lucie, tu connais
le nombre de personnes qui défilent dans ce cabinet avec des vices tous plus
complexes les uns que les autres ?! Et pour canaliser ces vices, y’en a
qui plongent dans l’alcool, dans la drogue, dans le sexe, dans les jeux à
gratter, dans les sports extrêmes… Alors je crois que je peux tout entendre. Et
pour que nous puissions avancer, j’ai besoin de connaître le truc qui te
maintient sous contrôle, même si c’est un contrôle très restreint.
-
J’en ai tellement
honte, So’…
-
Tu te drogues,
c’est ça ?
-
Non ! Enfin,
avec tous les cachetons que je prends – ou devrais prendre – par jour, on
pourrait le croire ! ris-je pour détendre l’atmosphère.
-
Alors tu es une
nympho ?
-
Non, ris-je à nouveau. Oh
que non…
-
Alors quoi ?
-
J’ai un…coach. Un coach de vie. C’est lui qui me canalise.
-
Qu’est-ce qu’il y
a de honteux là-dedans ?
-
C’est…la façon
dont il me canalise qui est honteuse.
Je
me rendis compte que je n’avais pour ainsi dire jamais dit à haute voix ce qui
allait suivre.
-
Pourquoi ?
-
Parce que… parce
que ça passe par un châtiment corporel.
-
Du genre SM ? se renseigna innocemment Sophie sans jugement aucun.
-
Non, pas du
tout ! Enfin, ça pourrait s’en rapprocher mais… non. C’est totalement
différent. Il…il me donne la fessée.
Ça
y est, la bombe était lancée et le mot était dit. Que c’était difficile !
-
Ah ! dit
Sophie en croyant avoir compris. Tu aimes recevoir la fessée, alors !
-
Absolument pas.
Justement. C’est un garde-fou, comme tu l’as si joliment expliqué tout à
l’heure. Et d’ailleurs, ça me pèse énormément. Puisque je ne sais pas me mettre
des limites, il faut que quelqu’un m’en mette. Ça fait bientôt quatorze ans que
je cherche des alternatives, sans succès. Il n’y a que ça qui fonctionne.
-
C’est sur ce
thème, ton blog ?
-
Oui. J’écris sur
ce thème pour tenter de comprendre le mécanisme, sans succès. Et en même temps,
j’adore écrire donc… Ça ne me dérange pas d’écrire là-dessus. Mais s’il y a bien
une chose qui est sûre, c’est que je ne voudrais pour rien au monde être à la
place de mes héroïnes.
-
Je te crois sur
parole. Ton langage corporel et le ton dans ta voix l’indiquent, me dit Sophie
qui m’étudiait du regard. C’est d’ailleurs parce que ça ne t’est pas agréable
que ça fonctionne. Un garde-fou doit être désagréable pour garder correctement.
-
Oui, approuvai-je
à contrecœur. Je suppose que c’est la douleur mélangée à l’humiliation qui me
calment vraiment. Le problème, c’est que mon tuteur ne peut pas être avec moi
H24 ; et dès que je sais que je suis à l’abri d’en reprendre une, je
retombe immédiatement dans mes travers. Du coup, c’est un cercle vicieux. Je
trouve que ça rend la fessée totalement inefficace. Et je me demande pourquoi
je continue de m’infliger cela. Et en même temps, si j’arrête définitivement,
ce sera la descente aux enfers pure et simple.
Maintenant
que j’avais craché le morceau, je ne m’arrêtais plus. Sophie était
effectivement dépourvue de tout jugement. Elle me répondit :
-
Tu fais confiance
à ton tuteur ?
-
Oui. Je lui
confierais ma propre vie, celle de mon mari et celles de tous ceux que j’aime.
Il est mon meilleur ami, mon confident, mon grand frère et mon exemple.
-
Waouh, dit
Sophie. Ah ouais, quand même !
-
Ouais. Tu ne sais
pas tout ce qu’il représente pour moi. Il est indispensable à ma vie.
-
Comment
s’appelle-t-il ?
-
Gabriel.
-
Tu lui fais donc
pleinement confiance, essaie donc de te décharger un peu sur lui. Il sait ce
qu’il fait.
-
Le problème,
c’est qu’on est très complices. C’est donc compliqué pour lui de sévir. Ce
n’est pas comme s’il n’avait qu’un rôle.
-
Je vois. C’est le
grand frère un peu laxiste, quoi ! dit Sophie en souriant.
-
Alors euh… Vu les
trempes qu’il est capable de me mettre, le mot « laxiste » ne me
viendrait pas à l’esprit ; mais il est vrai qu’il laisse passer des choses
qu’un tuteur détaché affectivement ne laisserait pas passer.
-
Comme quoi ?
-
Ben… Si je
compare avec mon tuteur précédent que j’avais pris parce que Gabriel n’était
plus assez dispo, avec lequel je n’avais presque pas d’affect, il était mille
fois plus sévère. Il me reprenait pour chaque faute commise, pour chaque jour,
sans rien laisser passer. Avec Gabriel, c’est différent. Parfois, je ne prends
pas mes médocs parce que j’ai la flemme, et parce que je me dis que de toute
façon, il m’en collera une pour mes fautes globales et pas pour celle-ci en
particulier. Du coup, je ne fais pas d’efforts.
-
Je vois, dit
Sophie en réfléchissant. Et si vous instauriez un barème ? Genre cinq
claques par non-prise de médicaments ?
-
Le problème est
que Gabriel est musicien, il est toujours en tournée à droite à gauche. On ne
se voit que trois à quatre fois par an ; et quand on se voit, ça ne
conduit pas systématiquement à une fessée (hormis ces derniers temps)… Si on
instaure un barème, en trois mois, il sera irréalisable. On va arriver à un
truc genre 5.000 claques. Le truc complètement bidon.
-
Vous n’avez qu’à
instaurer un barème assez petit pour qu’il soit réalisable – genre trois
claques par faute – mais quand même présent pour que tu le vois gonfler et que
ça te dissuade. Ainsi, même quand Gabriel n’est pas là, tu as un truc pour te
dissuader. Il est du genre à tenir sa parole ?
-
Oui, il n’a
qu’une parole, affirmai-je. Quand il a décidé de me tomber dessus, il le fait,
sauf cas de force majeure.
-
Donc ça pourrait
marcher, dit Sophie. En tout cas, le principal est que tu aies un
garde-fou ; et au passage, je le trouve plutôt sain. Je te trouve
courageuse de te l’infliger et je trouve cela sain. Ça fait partie de
l’éducation. Aujourd’hui, on a beau en faire tout un patacaisse : une
claque sur les fesses, c’est de l’éducation.
-
Ben j’en ai honte
quand même…
-
Je ne vois pas en
quoi, réfléchit Sophie.
-
Par exemple hier,
j’ai une élève qui a été très dissipée en classe. J’ai mis un mot dans son
cahier de liaison, et elle s’est mise à pleurer. A la sortie, sa maman est
venue me demander pourquoi elle pleurait. Après que je lui ai expliqué la
situation, elle a fortement grondé sa fille en lui disant que si elle
recommençait, elle prendrait une fessée devant moi. Et là, dans ma tête, je me
suis dit : « Moi aussi, j’en prends. J’en prends peut-être aussi
fréquemment qu’elle. Et j’ai trente ans, pas huit. ».
-
Je vois ce que tu
veux dire, Lucie, comprit Sophie. Néanmoins, c’est ta méthode. Aussi
infantilisante et douloureuse soit-elle, c’est ton garde-fou et il fonctionne à
peu près. Vu dans l’état dans lequel tu es en ce moment, il faudrait sûrement
chercher à le renforcer à distance ; mais au moins, tu as un garde-fou qui
fonctionne.
Cette
discussion avec Sophie m’avait laissée dubitative. J’aurais presque préféré
qu’elle me dise d’arrêter tout de suite, que ce n’était clairement pas un bon
plan. J’aurais aimé qu’au moins une personne, parmi toutes celles qui
sont au courant, me dise d’arrêter cela tout de suite ; mais Sophie se
rallia aux autres.
J’omis de dire à ma nouvelle amie
naturopathe qu’au fil des années, j’avais un peu « dédiabolisé » la
fessée. Je me disais que c’était un mauvais moment à passer (sauf avec Thomas
avec lequel c’était un trèèèèès long moment particulièrement insupportable) et
qu’une fois la punition terminée, on ne me ferait plus suer avec ça jusqu’à la
prochaine fois. Ce garde-fou fonctionnait-il toujours, du coup ?
Ce week-end, c’était le baptême
d’Hugo. Mon mari, qui s’est converti à la foi catholique il y a quelques
années, a pris la décision de se faire baptiser. Pour l’évènement (et la fête
qui suivit), tous nos proches étaient invités dont Gabriel.
Je
n’avais pas revu mon grand frère depuis Noël. Trois mois et demi de séparation.
Malgré le fait que nous nous parlions quasi-quotidiennement, mon meilleur ami
me manquait énormément. J’étais donc toute contente d’aller le chercher à la
gare vendredi.
Durant ces trois mois et demi,
j’avais pris la décision seule d’arrêter de remplir le tableau. Gabriel n’avait
rien dit. Ce truc était constamment rouge et j’avais clairement la flemme de
continuer à le remplir. J’espérais aussi que sans preuve à l’appui, Gabriel ne
me tombe pas dessus.
Retrouvailles avec Gabriel
obligent : nous nous prîmes un petit apéro, Gabriel, Hugo et moi, ainsi
que mon petit frère âgé de dix ans. J’étais comblée, entourée des trois hommes
qui comptent le plus dans ma vie. Mon petit frère était tout content de me
raconter qu’il avait mangé dans un fast-food le midi ; puis il me demanda
innocemment :
-
Et toi, t’as
mangé quoi ce midi, Lucie ?
-
Je n’ai pas
mangé, avouai-je.
Hugo
et Gabriel me fusillèrent instantanément du regard. Ma maladie intestinale
m’oblige à me nourrir à heures fixes, même si je ne mange pas beaucoup. Sauter
un repas aggrave les choses. Je ris nerveusement pour détendre l’atmosphère.
-
Et pourquoi
ça ?! me demanda Hugo d’un ton ferme.
-
Parce que je
n’avais pas faim, répliquai-je sans me démonter.
-
Tu n’avais pas
trop mal au ventre ? me demanda mon adorable petit frère.
-
Non, ça allait,
répondis-je.
-
Tu ne dois pas
sauter de repas ! me gronda Hugo.
-
Je n’avais pas
faim ! me défendis-je, agacée. Je n’allais pas me forcer à manger !
-
Ben si !
insista mon mari.
-
Ben nan ! rétorquai-je
en campant sur mes positions.
Hugo
se tourna alors vers Gabriel et lui dit :
-
Demain matin, je
dois m’absenter toute la matinée, si tu veux en profiter…
-
Oui, merci !
répondit Gabriel.
Je
savais que c’était du bluff. Gabriel n’était pas en colère. Il était mécontent,
peut-être un peu chagriné ou déçu, mais pas en colère. Or, qu’il démente si
j’ai tort, il ne m’a jamais punie sans colère.
Hugo ramena mon frère chez mes
parents et je restai seule à la maison avec Gabriel pour quelques minutes.
C’est là que je me rendis compte que je n’étais pas allée chercher mes
médicaments à la pharmacie. Or, il y en avait un qui me manquait, sans lequel
je ne pouvais pas passer une nuit paisible.
-
Appelle Hugo pour
qu’il passe à la pharmacie en revenant de chez tes parents ! me dit
Gabriel.
-
Ce n’est rien,
Gab ! Ce n’est pas grave si je dors mal !
-
Ben si,
Lucie !
Gabriel
s’empara de son téléphone et appela Hugo. Nous entendîmes alors le téléphone de
mon mari sonner juste à côté de moi : Hugo ne l’avait pas emmené avec lui.
-
C’est pas grave,
Gab. Je vais mal dormir, ce sera ma faute.
-
Je vais te
trépasser.
Gabriel
et sa faculté à toujours inventer de nouveaux mots pour me dire qu’il va me
coller une fessée…
-
Quand ça ?
demandai-je en souhaitant le titiller.
-
Ben demain
matin ! répondit-il.
Je
savais pertinemment qu’il bluffait. Je le sentais monter en pression mais ce
n’était toujours pas la colère nécessaire à l’administration d’une fessée.
A l’église, durant la célébration du Vendredi Saint où nous nous rendîmes, je priai néanmoins le Ciel pour ne pas trop souffrir cette nuit. Lorsque nous rentrâmes à la maison, il y avait une boîte toute neuve du médicament manquant à l’appel dans l’armoire à pharmacie. Je fus bouche bée. J’avais cherché toute la journée une boîte, ayant la flemme d’aller à la pharmacie. Par la suite, ne trouvant pas de boîte et pensant à autre chose, j’avais complètement oublié d’y aller. J’avais retourné toute la maison sans rien trouver et voilà qu’après une prière à l’église, une boîte neuve apparaissait comme par magie.
Puisque
ce n’est pas la première fois que ce genre de choses nous arrive à Hugo et moi,
mon mari me lança un : « Ça t’étonne encore ? » avant de me
faire un large sourire. Oui, j’étais toujours aussi étonnée. Gabriel ne
comprenait strictement rien à ce qui venait de se passer.
Le lendemain matin, Hugo partit à
ses rendez-vous et Gabriel et moi fîmes la grasse matinée. Je me levai néanmoins
avant lui. Lorsqu’il me rejoignit, j’étais en train de cuisiner pour le repas
du soir, puisque nous serions douze à table. Jusqu’à ce qu’Hugo rentre deux
bonnes heures plus tard, Gabriel et moi discutâmes de tout et de rien. J’étais
contente de pouvoir partager un moment seule avec lui, un moment autre que
cuisant. Gabriel est avant tout mon confident et des instants comme ceux-ci me
le rappellent.
Au repas du midi, je mangeai peu,
étant encore barbouillée. J’étais néanmoins très heureuse, le visage rayonnant
d’avoir eu raison sur le fait que Gabriel n’était pas en colère. Je n’avais
donc pas eu à craindre pour mes fesses, malgré l’aveu que j’avais fait à mon
grand frère de ne pas avoir pris mes médicaments le matin-même. J’étais
tellement guillerette – et ma joie m’était impossible à cacher – que je lançai à
Hugo :
-
Tu vois, je ne me
suis pas fait démonter !
-
Ah bon ? s’étonna
mon mari.
-
Eh non !
-
Oui enfin, ne jubile
pas trop ! me dit-il. Gab’ n’est pas encore reparti.
-
Nan mais laisse
tomber ! dis-je à Hugo. C’est mort, j’te dis !
-
Pas forcément, me
dit Gabriel. Il suffit que je me mette une bonne fois en colère et…
Je
me tus, ce qui satisfit Hugo.
-
Pour être tout à fait
honnête, reprit mon grand frère, le fait que tu aies trouvé une boîte en
rentrant de l’église m’a calmé. Je me suis dit qu’il y avait quelqu’un qui
veillait sur toi.
-
Parfait ! conclus-je.
Continue de te dire ça, c’est parfait !
-
J’suis pas sûr
que ce soit une bonne chose, soupçonna Gabriel.
-
Si, c’est une
très bonne chose ! rayonnai-je.
Je
voyais dans les yeux de Gabriel qu’il était en train de changer d’avis. Quant à
mon mari, il n’osait pas le demander clairement mais il espérait que Gabriel me
remette d’équerre pour que je me redresse un peu niveau santé et qu’il puisse
cesser de s’inquiéter pour moi à chaque seconde que Dieu fait.
-
Je dois encore m’absenter
en début d’après-midi de toute façon, annonça Hugo. Il faut que j’aille
chercher le matelas pour la chambre d’amis.
-
Gab’ ira avec toi
pour t’aider, dis-je en sentant le vent tourner.
-
Pas besoin, dit
Hugo. Je vais y arriver seul.
-
Parfait, je resterai
là avec Lucie alors, dit Gabriel.
Ok,
ça ne sentait pas bon du tout, là. J’avais beaucoup trop rayonné :
désormais, la pluie menaçait de tomber.
Hugo partit, je me retrouvai
seule avec Gabriel. Après avoir échangé quelques mots et m’avoir fait
comprendre que j’allais passer un mauvais moment, il se déplaça au milieu du
canapé et me dit :
-
Aller, viens là.
Je
le priai et refusai de venir.
-
T’as dit toi-même
que quelqu’un veillait sur moi. On n’a plus besoin de faire ça !
-
Je pense quand
même que si. Viens là !
-
Mais nan c’est
bon ! insistai-je. On n’a plus besoin !
J’étais
également assise sur le canapé mais je m’étais décalée le plus loin possible de
Gabriel.
-
Lucie, il faut
que je le fasse. Surtout si mardi ça ne fonctionne pas, ça va être une catastrophe.
Tu vas encore plus te laisser aller.
Mardi,
je devais rencontrer un potentiel candidat à mon tutorat, pour seconder
Gabriel. Cependant, je ne sens pas du tout ce mec et j’avais fait part à
Gabriel que c’était mal parti.
-
Tu n’as pas
envie, dis-je. Tu n’as pas envie de le faire, moi non plus, donc on ne va pas
se forcer !
Gabriel
savait pertinemment que s’il ne le faisait pas, je fêterais cette non-fessée en négligeant
encore plus ma santé. Je serais beaucoup trop fière d’y avoir échappé. Je le
savais aussi ; mais ça ne rendait pas les choses plus faciles.
Gabriel
n’attendit pas longtemps avant de m’attraper le poignet et de me tirer à lui.
Mes articulations étant on ne peut plus fragiles, je ne pus lutter comme je l’aurais
voulu : le but n’était pas que je me déboite le poignet et le musicien ne
m’aurait pas lâchée.
Avant de recevoir la première
claque, je sentis ma robe être troussée. Je me mis en condition et serrai les
dents en me disant : « Bon, t’en as reçu plein. Ce n’est clairement
pas la première et sûrement pas la dernière. Dans dix minutes, c’est fini. ».
La dernière fessée remontait à trois
mois et demi, une semaine avant Noël. J’avais
d’ailleurs failli en reprendre une nouvelle le jour du réveillon mais le temps
nous avait manqué, heureusement pour moi. Gabriel s’était contenté de me tirer
fortement l’oreille en me réprimandant car j’avais, le lendemain de la dernière
fessée, fait un excès de vitesse de 20km/h. Le lendemain d’un recadrage.
Gabriel était furieux. Le pire était que je n’avais absolument pas fait exprès :
j’étais en train de chanter à tue-tête la chanson qui passait à la radio et
lorsque je m'étais reconcentrée sur ma conduite et avais regardé le compteur, j’étais très
au-dessus de la limitation de vitesse.
La première claque s’abattit sur ma
culotte. Heureusement pour moi, les trois mois et demi séparant ma bêtise au volant
avaient complètement fait oublier cet écart au volant à Gabriel, ce qui jouait en ma
faveur. Il n’allait me punir « que » pour ma non-régularité concernant
mes médicaments ; et c’était déjà quelque chose.
Dans le précédent article de cette
rubrique, je racontais que la dernière fessée, celle du 17 décembre, avait été
vécue comme une première fessée : j’avais perdu mon endurance ainsi que toute
mon expérience concernant la gestion d’une tannée. Je ne m’attendais pas à ce
que cela se réitère.
Après m’avoir mis une quinzaine de claques sur la culotte, Gabriel baissa mon dernier rempart et là… Ce fut atroce pour moi ! Je n’avais vraiment, mais alors vraiment plus l’habitude de recevoir une fessée ! Le tutorat avec Thomas où je recevais une énorme raclée tous les dix jours me tuerait à coup sûr aujourd’hui. Une simple déculottée – attention, je dis « simple » mais il faut quand même préciser que Gabriel est un tuteur redoutablement endurant et sévère ! – me mettait dans un état pas possible. La douleur était insupportable ! La douleur était vraiment insupportable ! Chaque claque me brûlait énormément et cette tannée était une horreur ! J’étais à deux doigts de fondre en larmes, moi, la nana tellement endurante qu’elle pleure après quinze minutes de claques gigantesques !
Pour ma défense, Gabriel était vraiment en colère pour le
coup, et il ne retenait absolument pas sa main. Néanmoins, ce passage sur ses
genoux était sempiternel et atrocement douloureux.
Cela
ne me réussissait pas, finalement, de prendre une fessée tous les 4-5 mois. Je
n’avais plus l’habitude de ça. Moi qui me réjouissais de ne plus en recevoir
(ou très peu), j’avais oublié que quand ça tombait, ça tombait bien !
Après cette série de l’enfer, Gabriel
s’arrêta quelques secondes pour me réprimander. Je lui promis que j’allais m’améliorer.
Je peux vous jurer que je mis toute ma force et ma sincérité dans cette
promesse. J’étais prête à lui promettre tout ce qu’il voulait du moment qu’il s’arrêtait.
Mais il recommença ; et là, je fondis en larmes. J’avais une main qui ne
pouvait se faufiler jusqu’à mes fesses et l’autre qui soutenait mon torse. Ni l’une
ni l’autre ne pouvaient venir à la rescousse de mon derrière ; et quand
bien même : Gabriel les aurait très vite neutralisées. Depuis le temps qu’il
pratique (et surtout qu’il pratique avec moi !) il sait très bien y faire.
Je pleurais vraiment ; de toute façon, je n’avais plus que ça à faire.
Quand il me lâcha, ce fut la vraie
délivrance. Je crus d’ailleurs que, comme les dernières fois, je m’en sortirais
« juste » avec un très long passage sur ses genoux, si atroce soit-il.
Mais non, il m’envoya au coin. Un mélange de choc et de révolte me fit lui
lancer un : « T’es pas sérieux, là ?! ». Il me répondit qu’il
était très sérieux. A ce moment précis, il y eut une bataille intérieure très
intense. Je ne me souvenais pas en avoir eu une aussi intense en pareille circonstances.
J’étais tiraillée entre l’idée de lui désobéir et de
refuser catégoriquement d’aller au coin ; et l’idée de lui obéir parce que
j’avais déjà trop souffert. Je vous jure que si je n’avais pas déjà eu tant mal
sur ses genoux, j’aurais désobéi. Vraiment. Seulement, je n’étais pas du tout d’attaque
à prendre une autre rouste.
J’optai
alors pour un mélange des deux : je m’appuyai nonchalamment contre le mur.
Gabriel me gronda et me redressa en me mettant les mains sur la tête et en me
disant : « C’est comme ça qu’on se tient ! ». Je pris une
bonne claque sur la fesse droite, claque que j’accusai immédiatement. Je déteste
prendre des claques quand je suis debout, combien de fois faudra-t-il que je le
dise et que je l’écrive ?!
Dès
que Gabriel eut le dos tourné, j’enlevai mes mains de la tête. Alors que j’avais
séché mes larmes, je fis semblant de repleurer pour pouvoir cacher mon visage
dans mes mains et ainsi qu’il me laisse tranquille avec ce truc de mettre mes
mains sur la tête. (Quand Gabriel lira ce passage, je ne donne pas cher de ma peau ! Espérons qu'il ait oublié dans trois mois...)
Gabriel
cherchait quelque chose, je l’entendais marcher. Je pensai qu’il était à la
recherche d’un des quelques instruments qu’Hugo a caché dans la maison. Gabriel
cherchait dans le placard de l’entrée et il n’était pas loin du but : sur
la plus haute étagère se trouvait le tapetapis. Il y avait également le
martinet dans la chambre, la brosse en bois dans la chambre d’amis… S’il avait eu
le temps, cela aurait pu se transformer en véritable chasse au trésor !
Là encore, j’étais tiraillée. Puisque je l’entendais chercher, j’hésitais entre coopérer ou non. De toute façon, il était certain que j’allais prendre une autre tannée. Si je coopérais, alors que j’éviterais la main ; et dans mes souvenirs, le tapetapis n’était pas si atroce. Le problème était que je ne pouvais pas me fier à mes souvenirs puisqu’à cette époque-là, j’étais encore très endurante, ce qui n’est plus le cas. Donc soit je coopérais pour éviter la main mais en acceptant que le tapetapis soit pire, soit je ne coopérais pas en espérant que ce ne soit pas trop long. Je décidai de ne pas coopérer. J’aurais dû.
Gabriel me pencha sous son bras et
je pris une série tellement atroce que j’en pleurai vivement. Si je vous dis :
« J’ai vraiment eu mal ! », c’est un euphémisme. Ce fut
horrible ! Cette fessée debout – qui, j’avais l’impression, ne se finissait pas !
– a clairement fini de me détruire le derrière.
Je confirme que je n’ai plus aucune endurance. Ce que
je venais de prendre, je l’ai pris des centaines de fois. Avec un Thomas, ou avec
un Gabriel méga-en-colère, ce que j’avais pris aujourd’hui n’aurait été qu’un
apéro. Pourtant, lorsque Gabriel me lâcha et que je fondis en larmes en me réfugiant
dans ma chambre d’amis pour pleurer, j’eus toutes les peines du monde à m’asseoir.
Je ne comprends pas ce qui m’arrive. Je ne comprends pas comment se fait-il que je ne sache
plus du tout encaisser une fessée. Suis-je devenue une chochotte ou est-ce
parce que Gabriel tape encore plus fort qu’avant ?
Toujours est-il que lorsque je me réfugiai
dans la chambre d’amis pour pleurer (et profiter de l’imprimante qui y est
installée pour imprimer quelques trucs), j’étais ultra vexée, honteuse et
douloureuse. Je n’avais même pas osé regarder Gabriel dans les yeux tellement j’avais
honte, alors qu’avant je ne me gênais clairement pas pour le provoquer du regard.
Lorsque je fis mon retour dans la
pièce à vivre, ce fut mon meilleur ami qui vint vers moi et qui m’enlaça. Moi,
j’étais partie dans l’idée de faire mine de passer à autre chose. Néanmoins, dans
les bras de Gabriel, je me laissai aller à finir de pleurer. J’avais envie de
lui dire que je le détestais mais c’était tout le contraire : ce mec me
sauvait la vie. Il me la sauve depuis que je le connais.
J’ai eu mal aux fesses pendant deux
jours entiers. Depuis samedi, jour où j’ai reçu cette rouste, je n’ai pas
oublié un seul médicament.
En décembre, Gabriel m’avait dit vouloir
s’attaquer au couvre-feu. Je suis très contente que son emploi du temps ne le
permette pas car c’est clairement un combat impossible. Je suis également très
contente qu’il lâche du lest sur les excès de vitesse. Néanmoins, puisqu’il est
peu disponible, nous avons fait un pacte lui et moi : je dois continuer à
lui chercher si ce n’est un remplaçant, un second, pour que mon fameux
garde-fou reste efficace. Alors je cherche à reculons car ça ne me plait pas
des masses de me dire que je risque de prendre des tannées plus souvent. En tout
cas, si vous souhaitez être candidat, vous savez où me trouver !
A
suivre…
Au niveau de l'école je me retrouve un peu dans ce que u évoques.
RépondreSupprimerQuand je dit à un élève qu'il va avoir un mot dans son cahier de liaison et qu'il me dit mais maîtresse je vais être puni, je pense aussi aux punitions que je peux avoir de mon côté.
C'est assez étrange