Il
était bientôt vingt-trois heures et je me tenais à la fenêtre du salon donnant
sur la rue. Le rideau coincé dans ma main crispée, je guettais l’arrivée d’une
voiture. Mon cœur fit un bond dans ma poitrine lorsqu’un 4X4 bleu nuit reconnaissable
entre mille se gara devant la maison. Valentin en sortit, ainsi que Trent,
Manon et Romain. Je lâchai le rideau et dit à Alma :
-
Ils sont là.
- Ça va bien se passer ma puce, me rassura-t-elle.
Je n’étais pas aussi rassurée qu’elle.
On
sonna à la porte. Alma alla ouvrir, je la suivis, peu fière de ma fugue. La
porte d’entrée s’ouvrit sur Valentin. Mon père avait pleuré : il avait les
yeux rouges et boursoufflés et ses joues étaient encore humides.
-
Bonjour madame,
je viens chercher Z…
Son
regard s’arrêta sur moi. Alma se décala, laissant Valentin me foncer dessus. Il
me serra fort dans ses bras, tellement fort que je crus suffoquer. Puis, ce
câlin terminé, il me pencha sous son bras et me colla dix claques monstrueuses
devant tout le monde.
-
Ne me refais plus
jamais ça ! gronda-t-il avant de me prendre à nouveau dans ses bras.
Ok,
c’était mérité. C’était la honte de les avoir prises devant Trent et Alma, mais
c’était mérité.
-
Je suis désolée,
papa ! lui dis-je en fondant en larmes. Je suis tellement, tellement
désolée !
Nous pleurâmes dans les bras l’un de l’autre et je vis que la scène
émouvait Alma dont les larmes lui montaient aux yeux.
-
Je te jure que si
tu me refais un coup pareil, je te tue ! me dit Valentin sans me lâcher.
L’homme
d’affaires finit par se résoudre à me lâcher. Romain me prit à son tour dans
ses bras, puis Manon, puis Trent. Néanmoins, je voyais bien que tout le monde
était fâché contre moi, ce qui était légitime.
Alma servit un thé à tout le monde
et Valentin en profita pour me poser la question :
-
Pourquoi as-tu
fugué, Zoé ?
-
Parce que j’en ai
marre d’être traitée comme une gamine ! J’ai dix-neuf ans ! Je veux
pouvoir faire mes propres expériences sans craindre de prendre une fessée
!
-
Quand c’est la
vie qui t’apprend les choses, crois-moi, ça fait bien plus mal qu’une
fessée ! me dit Romain. Tu devrais le savoir mieux que quiconque ! Je
pense que tu aurais volontiers troqué quelques fessées accompagnées d’un foyer
aimant contre tes années de galère avec ta mère !
Mon
frère avait raison. Pour éviter de l’avouer, je lançai :
-
De toute façon,
vous ne me connaissez pas ! Ça ne fait que deux ans que je vis avec vous !
Vous ne connaissez rien de moi !
-
Ta couleur
préférée est le violet, dit Valentin. Pas le violet vif mais le violet
crépusculaire qui se rapproche du mauve. Tu aimes manger tes céréales dans du
lait, mais il faut mettre d’abord les céréales et ensuite le lait, sinon tu
trouves que ça n’a pas le même goût. Tu ne mets jamais les mêmes chaussettes car
tu penses que c’est du temps de perdu de chercher les mêmes alors que personne n’y
fera attention. Tu n’aimes pas les jeux de hasard, tu préfères les jeux de
réflexion car tu souhaites garder ton destin en mains. Tu n’accordes pas ta confiance
facilement. Tu préfères le soir au matin car c’est la nuit que ta créativité se
développe. Tu manges toujours tes pâtes et ton riz avec une cuillère à soupe car tu
trouves que la fourchette n’est pas pratique. Tu es toujours de mauvaise humeur
le dimanche car c’est le jour de la semaine que tu hais ; par contre, ton
jour préféré est le vendredi car il annonce le week-end. Ton chanteur préféré
est Ed Sheeran, ta chanteuse préférée est Zaho. Tu es également fan de Stromae.
Ton plat préféré est…
-
Stop, papa. J’ai
compris.
Je
venais de prendre une vraie claque. Je n’avais rien dit de tout cela à mon père
et pourtant, tout était exact.
-
Ne dis plus
jamais que je ne te connais pas, conclut-il. Ne dis plus jamais que nous ne te
connaissons pas, Zoé. Tu fais partie de notre famille ! Nous te
connaissons par cœur. Je te connais par cœur. D’ailleurs, je te connais
tellement bien que je me sens vraiment idiot de ne pas avoir prédit ta réaction ;
je savais que tu voudrais échapper à la punition que je t’ai donnée cette
semaine. Les questions que tu te poses par rapport à Trent te prennent la tête
et c’est pour cela que tu as voulu t’évader dans un bar étudiant. Le fait que
je te punisse sévèrement était trop pour toi et j’aurais dû le prévoir.
Je
ne répondis pas. Valentin me connaissait mieux que je ne me connais moi-même !
-
C’est pourquoi je
lève toutes les punitions en cours, annonça mon père sous les yeux ahuris de
Romain et Manon.
-
Tu n’as jamais levé
une punition ! Tu n’as jamais fait ça ! s’exclama Manon. Il n’a jamais
fait ça ?! demanda-t-elle à Romain.
Mon
frère secoua la tête en signe de négation.
-
Si j’avais su, j’aurais
fugué plus souvent ! dit ma sœur.
-
Tu veux atterrir
sur mes genoux ?! la menaça Valentin sans complexe devant Alma.
-
Sans façon, répondit
la médecin les yeux rivés au sol.
-
Tu peux choisir
de rentrer à la maison ou de continuer à vivre dans la rue, Zoé, me dit mon
père à ma plus grande surprise. Si tu rentres avec nous, tu dois savoir que tu
devras quand même aller t’inscrire à l’auto-école, aller à la fac et rattraper
les cours que tu auras loupés, et continuer à te plier aux règles de la maison.
Tu ne seras jamais à l’abri d’une fessée, bien qu’elle sera toujours justifiée.
Cependant, tu continueras d’être aimée de façon incommensurable et inconditionnelle,
d’être choyée, nourrie, logée et blanchie. Si tu préfères rester vivre dans la
rue, permets-moi juste de pouvoir venir te rendre visite de temps en temps et de
pouvoir t’apporter de la nourriture, des vêtements et le nécessaire à ta survie.
Nous allons te laisser seule pour prendre ta décision ; nous t’attendrons
dans la voiture. Si tu ne nous as pas rejoints dans la voiture dans quinze
minutes, alors nous partirons sans toi. A toi de faire ton choix, mon bébé.
Ma
famille sortit de la maison après avoir dit au revoir à Alma et l’avoir
remerciée pour son accueil. Je restai seule à réfléchir dans le grand salon d’Alma
tandis que la vieille dame s’affairait à la vaisselle en cuisine. Vivre dans la
rue casserait tous mes rêves, toutes mes possibilités de carrière. Il pourrait
m’arriver n’importe quoi : je pourrais me faire agresser, violer,
kidnapper et personne n’en dirait rien. Et puis, il me manquerait le plus
important : l’amour.
Huit minutes après la proposition de
mon père, je fis un long câlin à Alma pour la remercier et montai dans la
voiture de mon père. Avant de démarrer le véhicule, il me dit :
-
Je suis heureux
que tu aies pris la décision de venir avec nous, Zo. Sache que si tu avais pris
la décision inverse, je t’aurais quand même ramenée à la maison par la peau des fesses !
Je
ris. Valentin poursuivit :
-
Oh, et une fois
que nous serons arrivés à la maison, attends-toi à recevoir une déculottée de
la part de ton frère et ta sœur.
Mon
rire s’effaça. C’était justifié vu la frayeur que je leur avais flanquée, mais ça
ne rendait pas la chose envieuse pour autant !
L’homme
d’affaires démarra la voiture et nous nous en allâmes.
Je passai cinq minutes sur les
genoux de Manon, et cinq autres minutes sur les genoux de Romain. Ils me
collèrent chacun une déculottée bien corsée avant de m’envoyer au coin. Puis,
alors que je pensais la punition terminée, ils me firent tous deux allonger à
plat ventre sur le lit, trois coussins relevant mes hanches. Romain s’empara de
la tawse, Manon prit le paddle en bois. Ils se postèrent de part et d’autre de
moi, Romain à ma gauche et Manon à ma droite. Ils me prévinrent que j’allais
prendre cinquante coups ; vingt-cinq de chaque : je devais compter et
leur promettre de ne plus fuguer après chaque coup.
Mon
frère et ma sœur alternaient : je prenais un coup de tawse, puis un coup
de paddle en bois, puis un coup de tawse… Ce fut tellement douloureux que je me
mis à pleurer, puis à mettre mes mains pour me protéger : mais Romain les
bloqua.
-
Vous ne m’aimez
pas pour m’infliger cela ! lançai-je dans mon désespoir que cette fessée s’arrête.
-
C’est le prix que
tu as à payer pour nous avoir fait mourir pendant toute une journée ! me
gronda Manon. Nos cœurs se sont arrêtés de battre à la minute où nous nous
sommes rendu compte que tu n’étais plus là ! Tu n’as vraiment plus intérêt
à refaire un coup pareil !
Ma fratrie me délivra et je ne fus pas mécontente de
retrouver ma chambre. Néanmoins, Trent faisait la tête.
-
Tu m’as
abandonné, Zoé ! Tu as brisé le pacte que nous avions fait de toujours
être là l’un pour l’autre !
-
Je suis désolée,
dis-je.
-
Ça ne suffit pas !
Alors
que je m’étais allongée à plat ventre sur le lit, Trent baissa mon jegging. Je
crus un instant qu’il voulait embrasser mes fesses tuméfiées ou leur mettre de
la pommade ; mais au lieu de ça, je sentis une énorme claque s’abattre sur
ma fesse gauche.
-
Aïe !
criai-je. Mais qu’est-ce que tu fais ?!
-
Je te donne une
fessée.
-
Quoi ?! Tu
rigoles, là ?!
-
Non, je ne rigole
pas. Tu es allée trop loin, Zoé ! Et puisque je ne veux pas que tu
recommences…
-
Trent, arrête !
Ce n’est vraiment pas drôle !
-
Je te l’ai dit,
je ne rigole pas. Je sais que si je te donne une fessée, ça te dissuadera de fuguer
une nouvelle fois. Alors je me fais violence.
Je
me débattis vivement ; Trent se mit alors à califourchon sur moi et m’asséna
des claques toutes plus douloureuses les unes que les autres. Je ne savais pas que
mon mec tapait aussi fort !
Je
le priais d’arrêter, lui promettant une énième fois de ne plus le refaire quand
il s’arrêta enfin. Nous étions tous les deux en nage. Je croyais que c’était
moi qui portais la culotte dans notre couple : mon petit ami venait de me
prouver le contraire. Alors que j’essuyais mes larmes il descendit de sur mes
reins, capta mon regard et me dit :
-
Je te donnerai
une fessée chaque soir pendant une semaine à chaque fois que tu briseras la
promesse que nous nous sommes faits.
-
Tu veux dire que
tu vas me claquer le derrière toute la semaine ?!
-
Oui.
-
Oh Trent, non !
Ne fais pas ça…
-
Tu as brisé notre
pacte, Zoé ! me dit mon homme. Tu te rends compte à quel point c’est grave ?!
-
Oui mais…
-
Non, coupa-t-il.
Tu ne te rends pas compte. Si c’était le cas, tu ne serais pas en train d’essayer
de négocier ; tu trouverais même qu’une semaine n’est pas cher payé.
-
Tout le monde m’est
tombé dessus, ce soir. Veux-tu bien attendre que mes fesses se remettent avant
de commencer la semaine ?!
-
Et la marmotte met
le chocolat dans le papier alu.
-
Tu connais cette
expression ? m’étonnai-je. C’était une pub française !
-
Ta sœur me l’a apprise.
Allons nous doucher, maintenant.
En
me savonnant, je pensai au fait que Trent jouait bien son jeu : cette
semaine, j’allais être beaucoup trop préoccupée par les fessées qu’il me donnerait
que par ses soi-disant « oncles » et mes questions qu’il évite soigneusement.
C’était à moi de rester concentrée malgré les claques qui tomberaient sur mes
fesses.
Si, en faisant cette fugue, on m’avait
dit que l’homme de ma vie se mettrait à me donner la fessée, jamais je ne l’aurais
cru ! Quatre bourreaux pour mon derrière dans une seule maison, ça commençait à faire vraiment trop ! Une chose est sûre : le mot "fugue" est définitivement rayé de mon vocabulaire !
A suivre…
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