Vendredi 24 septembre 2021.
-
Tu n’es pas au travail ?! lançai-je
froidement à mon père lorsque je le découvris dans la cuisine aux alentours de dix
heures du matin.
-
J’ai pris ma matinée pour que nous puissions
discuter, me répondit Valentin.
-
Discuter de quoi ?!
-
De ce qui s’est passé hier soir.
-
Il n’y a rien de plus à dire. Trent et moi, c’est
terminé.
-
Zoé…
-
Tu es de son côté, en plus ?! grondai-je.
-
Tu me parles autrement ! me recadra mon
père. Il n’est pas question d’être d’un côté ou de l’autre ! Ton frère, ta
sœur et moi pensons qu’il est normal que Trent ait eu du mal à parler de ces
choses-là…
-
C’est bien ce que je dis, vous êtes de son côté !
aboyai-je en me levant.
-
Zoé, tu me parles autrement ! réitéra mon
père. C’est la dernière fois que je te reprends ! Et où vas-tu ?!
-
Faire mes valises ! rétorquai-je à pleine
voix. Puisque tout le monde est contre moi, j’me casse de cette baraque !
-
Pardon ?! vociféra Valentin dont la colère
avait grimpé en flèche.
-
T’as très bien entendu ! J’me casse !
Valentin me retint par le
bras. Je tentai de me débattre mais sa poigne n’avait pas de faiblesse.
-
Tu veux partir ?! gronda-t-il. Parfait !
Mais ce sera à mes conditions !
-
Et quelles sont tes conditions ?! répondis-je
agressivement.
-
Va faire tes bagages ! ordonna vivement l’homme
d’affaires. Je t’attends dans la voiture dans trente minutes. Et n’essaie
surtout pas de me la mettre à l’envers en faisant une fugue ou autre, sinon je
te colle une rouste dont tu te souviendras toute ta vie ! Tu as compris ?!
EST-CE QUE TU AS COMPRIS ?!
-
Oui ! répondis-je, tout aussi énervée, bien
que déstabilisée par les cris de mon père.
J’ignorais totalement où mon
père voulait m’emmener et je n’étais plus trop sûre de vouloir quitter la
maison si c’était pour aller dans un endroit bien pire. Cependant, je ne
voulais pas céder devant mon père, ni devant personne d’autre !
En faisant mes bagages dans ma chambre, Trent me posa
tout un tas de questions auxquelles je restai totalement muette : je ne
lui adressai même pas un regard. Il devait sûrement se dire que je déménageais
pour de bon dans la chambre d’amis.
Ma colère était à son paroxysme. Petit copain de
merde. Famille de merde. Maison de merde. Vie de merde !
Ne souhaitant quand même pas que mon père me tombe
dessus de façon mémorable, je me rendis à la voiture trente minutes plus tard. Mon
père s’était installé sur le siège conducteur. Après avoir ouvert la portière,
je lui lançai :
-
J’peux marcher et prendre le bus si tu me donnes
l’adresse !
-
Pose tes fesses dans cette voiture, Zoé ! gronda-t-il.
Dépêche-toi !
Apparemment, lui comme moi n’étions
pas redescendus en pression. Le voyage s’annonçait sympathique…
Les minutes et les kilomètres
passaient et mon appréhension aussi. Je n’avais aucune idée d’où m’emmenait mon
père. Je finis par craquer et lui demander :
-
C’est encore loin ?!
-
Non.
-
Où est-ce que tu m’emmènes ?!
-
Je te le dirai une fois sur place.
-
Nan, tu m’le dis maintenant !
-
…
-
Tu vas m’le dire, oui ou merde ?! m’emportai-je.
Valentin attendit presqu’une
minute avant de trouver un endroit où se garer. Il enclencha le frein à main,
recula son siège d’un coup sec et appuya sur le bouton de ma ceinture afin de
la libérer. Il m’attrapa ensuite par les cheveux et me bascula sur ses genoux.
Heureusement que son 4x4 dernier cri était spacieux ; j’avais failli me
prendre le volant en pleine tête. Mon père me claqua les fesses avec une telle
intensité que même mon jean ne freinait pas autant la douleur que ce que j’espérais.
Il était clairement furieux et lorsqu’il me gronda, il ponctua chaque syllabe d’une
énorme claque :
-
Tu-vas-a-rrê-ter-de-me-par-ler-comme-à-un-chien-Zoé !
Je-suis-ton-père ! Pas-ton-a-mi ! Com-pris ?!
-
Oui, oui ! J’ai compris ! dis-je en
gigotant autant que je le pouvais.
Mon père me lâcha et je me redressai
sur un derrière brûlant. Je me recoiffai légèrement et bouclai à nouveau ma
ceinture. Valentin redémarra la voiture en me prévenant :
-
Si je dois encore m’arrêter à cause de ton insolence,
je te sors de la voiture et je te colle une déculottée. Peu importe s’il y a du
monde ou pas.
Je ne mouftai plus jusqu’à la
fin du voyage.
Une bonne demi-heure plus tard, Valentin se gara devant
une espèce de manoir au milieu des champs.
-
Descends de la voiture, m’ordonna mon père.
J’obéis. Un homme sortit du
manoir habillé comme un valet de pied du début du XIXème siècle. A sa
suite, un autre homme sortit du bâtiment : il devait mesurer un mètre
quatre-vingt-cinq, habillé bon chic bon genre. Puis, une femme suivit, habillée en bonne de la même époque que le valet. J'en déduis que ce n’était clairement pas un
endroit pour les classes moyennes.
Valentin s’avança
vers les deux hommes et la femme et leur serra la main à chacun. Le valet de pied me tendit
sa main gantée, je lui donnai ma main et il me la baisa. Surprise, je la
retirai aussitôt. L’autre homme me fit également un baise-main. La femme, elle, me salua d'un signe de tête.
-
Miss Duhamel, c’est un plaisir de vous
rencontrer, dit le valet.
-
Tu peux m’expliquer, s’il te plaît ?
demandai-je à mon père en m’efforçant d’être aimable.
-
Tu as voulu partir de la maison ? Eh bien
tu pars. Mais ça – il désigna le manoir – ce sont mes conditions. Dans ce bâtiment,
tu as un petit appartement qui t’attend. Tu n’y vivras pas seule : un précepteur vivra avec toi – il désigna l'homme BCBG.
Les domestiques seront là pour répondre au moindre de tes besoins ; ton précepteur
sera là pour te surveiller jour et nuit. Il veillera à ce que tu suives les
cours à la fac, à ce que tu fasses tes devoirs, à ce que tu ne fasses pas de fugue,
à ce que tu te comportes correctement et convenablement, à ce que tu ailles à l’auto-école,
etc. Si tu ne te comportes pas correctement, ton précepteur te sanctionnera. Et
crois-moi Zoé : si j’apprends en venant te rendre visite que ton
précepteur t’a sanctionnée, je te filerai un doublon.
-
Tu as préparé ça en une heure ce matin ?! m’étonnai-je,
bouche bée.
-
Non, répondit Valentin. Vois-tu ma fille, je te
connais mieux que tu ne te connais toi-même ; je savais que ce ne serait
qu’une question de temps avant que tu me tapes une crise d’ado à retardement et
que tu veuilles t’enfuir de la maison. Le coup que tu m’as fait l’a d’ailleurs
prouvé ; si j’avais eu le bon timing, jamais tu n’aurais passé une journée
dans la rue. Ta sœur m’a fait pareil, c’est pourquoi elle a passé deux mois dans
un endroit comme celui-ci lorsque nous étions en France, avant de demander à
rentrer à la maison. Tu veux partir de la maison, ce sont mes conditions. Soit
tu vis ici, soit tu vis à la maison. Il n’y a pas d’autre alternative pour toi,
Zoé. Tu pourras demander à rentrer à la maison quand tu le souhaiteras à partir
de la fin du mois d’octobre – en espérant que ta crise soit passée. Pour le
moment, Nick et Anita vont s’occuper de tes bagages et te faire faire un tour du propriétaire.
Pierre-Louis t’attendra dans votre appartement.
Valentin me serra dans ses bras
et m’embrassa sur le front tandis que les domestiques enlevaient mes deux valises
de la voiture.
-
J’aimerais que tu n’oublies pas que je t’aime,
me dit mon père avant de monter dans sa voiture et de démarrer.
Je regardai
la voiture familiale s’éloigner au loin et je retins mes larmes de me monter
aux yeux. J’avais fait le choix de partir, il fallait l’assumer.
-
Venez miss, je vais vous faire visiter ! me
dit gentiment Nick après s’être débarrassé de mes bagages.
-
Vous êtes français ? m’étonnai-je en l’ayant
entendu parler dans la langue de Molière.
-
Oui, votre père a demandé des domestiques français, ainsi qu’un précepteur français pour que vous ne perdiez pas votre
langue maternelle. Si vous voulez bien nous suivre, miss…
Le manoir était immense. Le
hall d’entrée, surplombé par un énorme lustre en cristal, ouvrait sur un
immense escalier de marbre.
-
A qui appartient ce manoir ? demandai-je à mes domestiques.
-
Comment cela ? s'étonna Nick. Je ne comprends pas…
-
Ma question est pourtant claire, rétorquai-je
froidement.
-
Miss, c’est votre père qui est à l’initiative de
cet établissement, avoua Anita. Votre père possède ce manoir. Vous êtes ici chez vous.
Je n’en revenais pas. Combien
de propriétés, combien d’entreprises, combien d’argent mon père possédait-il ?!
Tout cela en devenait presque indécent. Nous devions sûrement être millionnaires.
Dans le couloir du premier étage, nous croisâmes une
jeune fille accompagnée d’un homme.
-
Qui sont-ce ? demandai-je.
-
Une jeune fille de votre situation accompagnée
de son précepteur, m’informa Nick. Il y a six places dans cette bâtisse, cinq
sont occupées à plein temps. La sixième est réservée à l’un des enfants de
monsieur Duhamel.
-
Pourquoi n’y-a-t-il pas envoyé Judith, alors ?
-
Votre sœur n’a pas encore son baccalauréat, répondit
Nick. Nous ne prenons en charge que les jeunes majeurs et étudiant à la
faculté.
-
Les parents des autres jeunes payent pour
qu’ils vivent ici ?
-
Oui, miss.
-
Combien payent-ils ? demandai-je.
-
Cinq mille dollars, miss.
-
Le mois ?!
-
La semaine, miss.
-
Ce n’est donc pas pour tout le monde ! m’indignai-je.
-
Miss, je me dois de vous informer que cet
établissement a pour but de contribuer à l’éducation de l’élite de la société.
Vous aurez des cours de bonnes manières et d’élégance, voilà pourquoi ce n’est
pas accessible à tous.
-
Êtes-vous bien rémunérés, au moins ?
- Nous ne nous plaignons pas de notre sort, miss, répondit Anita.
-
Faîtes-le-moi savoir si c’est le cas.
-
Bien, miss.
Nous avançâmes dans le couloir
et atteignîmes la dernière porte.
-
Nous y sommes, voici votre appartement, miss.
Je n’en
croyais pas mes yeux. Mon appartement était peut-être « petit » aux yeux
de mon père mais moi je le trouvais véritablement somptueux. Une cheminée
suspendue au plafond était installée, séparant le salon (avec une énorme télé)
de la salle à manger. Un couloir menait à ma chambre, où une salle de bains
attenante m’était dédiée : baignoire à pieds, toilettes suspendus,
coiffeuse, lavabo entouré de mosaïque… Nick m’apprit que Pierre-Louis aussi avait
sa propre suite, juste en face de la mienne.
-
Je ne vois pas de cuisine, m’étonnai-je.
-
La cuisinière prépare les repas au
rez-de-chaussée, miss, dit Nick. C’est ensuite de mon ressort de vous apporter votre
nourriture sur un plateau.
J’allais vraiment avoir une
vie de princesse, ici ! J’avais finalement bien fait de partir de la
maison !
Je regardais les tableaux qui ornaient le couloir
quand Nick m’appela :
-
Miss Duhamel, pardonnez-moi de vous déranger, je
prends congé, ainsi qu'Anita. Je vous reverrai pour le déjeuner si vous n’avez pas besoin de
moi. Auquel cas, appuyez sur la touche « 1 » du téléphone situé dans
le salon. Je vous souhaite une agréable matinée.
Nick et Anita s’en allèrent et je posai à
nouveau mes yeux sur le tableau que j’observai après l’avoir remercié. J’entendis
soudain un bruit de porte : Pierre-Louis sortait de sa chambre. Il s’approcha
de moi et me dit :
-
Dans le salon, Zoé. Immédiatement.
-
Si je veux ! rétorquai-je, agacée par ce
ton exigeant.
Sans que j’aie le temps de
comprendre ce qui m’arrivait, Pierre-Louis me pencha sous son bras et m’asséna
trois bonnes claques sur les fesses.
Je n’avais jamais reçu des
claques d’un tel calibre. Jamais. Pierre-Louis avait frappé avec une telle
force que j’avais crains de décoller du sol !
-
Votre réponse m’a fortement déplu, Zoé ! Allez-vous
vous rendre dans le salon ou dois-je vous punir à nouveau ?
Sans un mot, je me rendis dans
le salon. Ma vie de princesse ici venait de s’évaporer devant mes yeux. J’étais
dans une prison dorée. Deux domestiques et un appartement digne d’un palace pour
moi presque toute seule ; mais un précepteur qui me ferait vivre un enfer
au moindre faux pas. Je comprenais soudain pourquoi Manon n’était restée que
deux mois.
Je m’assis sur le canapé,
suivie par Pierre-Louis. Il m’attrapa le bras, tira dessus me sortant instantanément
du canapé et me colla une claque aussi violente que les précédentes sur mes
fesses déjà meurtries.
-
Vous ai-je demandé de vous asseoir ?! Répondez !
-
Non, dis-je fébrilement.
Une autre claque tomba.
-
Vous répondrez : « Non, Pierre-Louis
ou oui, Pierre-Louis ! » quand je vous interroge ! Alors ?
Vous ai-je demandé de vous asseoir ?
-
Non, Pierre-Louis, dis-je, les larmes me montant
aux yeux devant tant de dureté. Mais vous m’avez demandé de me rendre dans le
salon…
-
N’argumentez pas ! La prochaine fois que j’entendrai
le mot « mais » dans une tentative de justification de votre part,
vos fesses en pâtiront ! C’est clair ?
-
Oui, Pierre-Louis, répondis-je, la voix
tremblante.
-
Vous rendre dans le salon ne veut pas dire vous
asseoir sur le canapé ! Ce sont deux choses différentes ! Lors d’une
convocation comme celle-ci, tant que je ne vous demande pas de vous asseoir,
vous ne vous asseyez pas, c’est clair ?!
-
Oui, Pierre-Louis, continuai-je en tentant de me
frotter les fesses.
Cela me valut une nouvelle
claque gigantesque qui me déséquilibra.
-
Interdiction de vous frotter le derrière lorsque
vous êtes punie ! Vous devez ressentir la douleur pour éviter la récidive !
Si vous tentez de l’atténuer, vous serez de nouveau punie ! Est-ce clair ?!
-
Oui, Pierre-Louis.
-
Asseyez-vous, maintenant.
J’obéis, me demandant bien où
j’avais atterri.
-
Je vais à présent vous énoncer les règles en
vigueur durant votre séjour parmi nous, commença mon précepteur en faisant les
cent pas devant moi. Vous savez désormais ce que chaque transgression vous
vaudra. Votre femme de chambre vous lèvera une heure de demie avant le début de
vos cours à la faculté de médecine, puisqu’il y a une demi-heure de trajet. Vous
prendrez le petit déjeuner en ma compagnie puis vous vous préparerez avec l’aide
d’Anita. Je serai également à vos côtés dans le trajet jusqu’à la faculté.
Là-bas, vos professeurs sont tenus de m’avertir du moindre incident. Vous aurez
soin de vous tenir convenablement. Notre cuisinière vous aura préparé votre
repas du midi si vous ne rentrez pas déjeuner à la maison.
Une fois
rentrée, Anita vous aidera à vous changer, puis vous ferez vos devoirs jusqu’à
l’heure du dîner. Si ceux-ci sont
terminés et vérifiés par mes soins, vous pourrez bénéficier d’un moment de
détente. Nous dînerons ensemble, puis vous reprendrez vos devoirs ou votre détente,
en fonction. Vous aurez des leçons de code de la route trois fois par semaine. Le
couvre-feu est à dix heures pétantes. Les téléphones portables sont strictement
interdits ; vous aurez accès au téléphone fixe pour appeler votre famille
si vos devoirs sont terminés. Vous devrez avoir une tenue et une coiffure
convenables : Anita vous guidera. Pas de chewing-gums. Pas de gros mots ou
autre vulgarité. Comme vous l’avez constaté, vous n’avez aucunement le droit de
me répondre et toute insolence sera fort dangereuse pour vous. Vous n’avez
évidemment pas le droit de fumer ou de consommer de l’alcool ou des stupéfiants.
Pierre-Louis énonça ensuite le
fonctionnement du week-end puis m’informa que mes cours commençaient dès lundi.
Compte tenu de la semaine de retard prise sur l’ensemble de ma promotion, je
serai condamnée à passer l’après-midi d’aujourd’hui et celui de demain à étudier.
-
Puisqu’il est bientôt midi, nous n’allons pas
tarder à nous mettre à table. J’ai juste le temps pour une sanction préventive.
-
Une quoi ? m’exclamai-je, apeurée.
-
Une sanction préventive, Zoé. Je vais vous donner
une fessée afin que vous sachiez à quoi vous vous exposez en cas de manquement aux
règles.
A peine eus-je le temps de protester
que Pierre-Louis m’attrapait par l’oreille.
A suivre…
Aïe aïe aïe !!! On ne s'attendait pas à ça du tout ! Zoé va avoir beaucoup de mal à se plier à une telle discilpline 😒
RépondreSupprimerJ'en salive à l'avance
RépondreSupprimerSabine
La suite va être compliquée pour Zoé...
RépondreSupprimerVivement la suite, toujours un régal de vous lire😊. Merci!!!
RépondreSupprimerJ'ai hâte de lire la suite!😊
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