Journal d'une étudiante accueillie. - Chapitre 87 (2ème partie)

 

       En arrivant chez Nolan, je découvris un véritable temple de la domotique : sa maison était entièrement connectée ! Des rideaux à la bouilloire, en passant par chaque ampoule de la maison : l’enceinte intelligente gérait tout par commande vocale. Ce fut un véritable terrain de jeux pour mes frère et sœurs et moi, jusqu’à ce que papa intervienne :

-    Ça suffit, les enfants. Ce n’est pas un jeu.

-    Bien sûr que si ! répondit Manoé, surexcitée. C’est trop bien ! Si seulement je pouvais faire une vidéo pour mes abonnés…

-    Reviens dans le monde réel et trouve une autre occupation, ordonna Scarlett.

-    Si vous avez amené vos maillots de bain comme je vous l’ai proposé, vous pouvez aller profiter de la piscine ! dit Nolan.

-    On est en janvier ! s’exclama Louise.

-    C’est une piscine couverte et chauffée, précisa Nolan. Mais c’est vous qui voyez…

Même si nous avions refusé à la maison, maman avait quand même pris soin d’amener nos maillots de bain ; seul Mayeul n’en avait pas. Il se baigna donc en caleçon.

 

       Nous passâmes la majeure partie de l’après-midi dans la piscine, tandis que Michael et Scarlett passaient du temps avec Nolan.

-    Poussez-vous, je vais sauter ! annonça Anaïs qui se tenait sur le bord de la piscine en se bouchant le nez.

-    Ne fais pas ça, tu vas vider la piscine ! rétorqua Manoé en riant.

Tout le monde s’arrêta net.

-    Mais c’est quoi ton putain de problème, au juste ?! lui aboya Louise. T’es si mal que ça dans ta peau pour passer ton temps à dénigrer les autres ?!

-    C’est bon, c’était juste une blague ! se défendit l’adolescente.

-    Ouais ben elle n’était pas drôle ! intervint Mayeul. Redis un truc comme ça et j’te noie !

-    J’vais l’dire !! annonça Manoé qui s’était soudain transformée en gamine de quatre ans.

Sans réagir, Louise, Mayeul et moi la regardâmes sortir de l’eau, hébétés. Anaïs, qui n’avait donc pas sauté, l’attrapa avant que notre petite sœur atteigne la porte de sortie, et la plaqua contre le mur. Pour ma part, craignant qu’une bagarre éclate et ayant encore le souvenir cuisant du paddle, cet événement suffit à me rendre ma mobilité : je filai en un éclair auprès de mes sœurs.

Anaïs avait plaqué Manoé si fort contre la faïence que sa tête avait cogné.

-    Aïe !! cria Manoé. Je vais le dire !!

-    Tu ne bouges pas de là et tu vas m’écouter ! ordonna Ana sans la lâcher.

-    PA…

Anaïs mit immédiatement sa main sur la bouche de Manoé, l’empêchant de sortir la deuxième syllabe. Alors que nous étions maintenant tous les trois autour du conflit, Louise, Mayeul et moi retînmes notre souffle, appréhendant la suite des événements.

Anaïs ayant sa main gauche plaquée sur la bouche de Manoé, et son avant-bras droit coinçant notre sœur à la gorge, lui gronda :

-    Ferme ta gueule !! Tu ne vas rien dire du tout !! Ton petit règne est terminé !! Jusqu’ici on t’a laissée nous faire punir, insulter papa et maman, dénigrer nos physiques mais c’est terminé, tu m’entends ?! Ter-mi-né !! Je vais te dire comment les choses vont se dérouler dorénavant : on va faire bloc tous les quatre contre toi ! C’est à notre tour de te faire vivre un enfer, et si tu vas raconter quoique ce soit aux parents, ce sera notre parole contre la tienne ! Et à ton avis, à quatre contre un, qui gagnera, hein ?!

Manoé tentait de se défendre comme elle pouvait, mais la crevette qu’elle était ne faisait pas le poids face à l’imposante carrure d’Ana. Cette dernière poursuivit :

-    Donc voilà les solutions qui s’offrent à toi : soit tu deviens un agneau et tout se passera bien pour toi, soit tu continues d’être une hyène sournoise et malveillante, et on te fera la guerre !! Je peux te promettre que tu vas te prendre des trempes par les parents, même quand tu n’auras rien fait ! On va te faire la misère à l’école, juste pour notre bon plaisir, et on va faire le vide autour de toi, histoire que tu sois aussi seule qu’une vieille fille en maison de retraite !! C’est compris ?!

Forcément, Manoé ne put répondre.

-    Les rôles viennent de s’inverser ! reprit Anaïs. Alors si tu veux continuer de jouer à ça : que la partie commence !

Anaïs lâcha enfin Manoé et celle-ci courut voir nos parents. Elle n’avait décidément rien compris à ce qu’Ana venait de lui dire !

A peine notre petite sœur fut-elle sortie de la pièce qu’Ana se tourna vers nous :

-    Ok, c’est le premier round. Il faut qu’on ait tous la même version devant les parents. Laissez-moi parler, vous n’aurez ensuite qu’à aller dans mon sens. Allons dans l’eau et faisons semblant de jouer !

Nous nous exécutâmes.

Lorsque papa arriva accompagné de Manoé, nous jouions tous les quatre au waterpolo.

-    Anaïs Webber ! Viens ici !

-    Qu’est-ce que j’ai fait ? demanda innocemment ma sœur, sans obéir.

-    Tu as brutalisé et menacé ta sœur ! Viens ici, j’te dis !!

-    Mais papa, je n’ai rien fait !! se défendit Ana.

-    Elle n’a rien fait du tout !! ajouta Mayeul.

-    Nous étions en train de jouer et soudain, Manoé est allée vous voir sans aucune raison ! expliquai-je.

-    Alors expliquez-moi pourquoi elle a une bosse qui pousse sur l’arrière du crâne ! nous ordonna Michael.

-    Parce qu’elle s’est cognée contre le rebord de la piscine en voulant faire une galipette dans l’eau ! mentis-je.

Puisqu’Anaïs, Louise et Mayeul continuèrent d’aller dans mon sens, Michael attrapa Manoé par l’oreille et la gronda :

-    On va mettre de la crème sur cette bosse, mais avant je vais t’apprendre à me mentir et à vouloir faire punir tes frère et sœurs !

Nous attendîmes bien évidemment que papa et Manoé se soient éloignés pour éclater de rire.

 

       Notre sœur n’ouvrit plus la bouche de toute la soirée : que ce soit pendant le dîner, ou durant la soirée jeux de société, Manoé se fit très discrète.

Je me blâmais de ne pas avoir pensé avant à une coalition avec mes frère et sœurs. Cela nous aurait évité à tous le paddle d’hier ! Mais, il valait mieux tard que jamais ; et puis je découvrais chez Anaïs un côté sombre qui commençait très fortement à me plaire !! La vengeance était en marche, et allait être terrible !!

 

A suivre…