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Un joli fantôme du passé. - Chapitre 44

 


Vendredi 17 décembre 2021

 

       Midi. Jenna et moi sortons de l’amphithéâtre, nos cerveaux respectifs en bouillie. Cette session de partiels était tout simplement abominable ! Même si j’avais réussi à remonter ma moyenne, j’avais l’impression d’avoir complètement foiré mes exams. Si je ne validais pas mon semestre, toute ma famille me tuerait. Valentin me tuerait parce qu’il dépense une fortune dans cette université réputée. Romain me tuerait parce qu’il penserait que je ne me suis pas donnée les moyens de réussir. Manon me tuerait parce qu’elle a pris deux semaines de son temps à me faire réviser comme une malade mentale. Jacob me tuerait parce qu’il penserait que je l’ai pris pour un con depuis deux mois.

Bref, il fallait absolument que je valide ce semestre. C’était une question de vie ou de mort.

 

       Il s’en était passé des choses en deux mois : Romain nous avait annoncé sur un coup de tête qu’il prenait son indépendance. Refusant qu’il paie un loyer – car il pense que c’est « jeter l’argent par les fenêtres » - Valentin lui a alors acheté la maison de ses rêves, à une heure et demie de route de la maison. Mon père était allé contre ses principes en offrant cette villa à son fils ! Son déménagement, qui a eu lieu mi-novembre, a fichu un coup au moral de tout le monde.

Comme si la crise d’indépendance de Romain ne suffisait pas, Manon a également fait la sienne : elle a annoncé qu’elle partait début janvier pour une mission humanitaire de six mois avec Médecins sans frontières. Papa essaie toujours de l’en dissuader.

Fin octobre, Judith s’est échappée du Pensionnat où papa l’avait cloîtrée. Depuis, nous n’avons plus de nouvelles et ne savons absolument pas ce qu’elle est devenue.

Quant à Trent, il a décidé, d’un commun accord avec moi, de partir un semestre au Japon pour ses études.

Ces bouleversements très intenses ont vraiment chamboulé toute la famille. Alors que nous entrions dans la période de Noël, j’avais la désagréable sensation que tout le monde avançait dans sa vie, sauf moi.

Il était impératif que je valide ce semestre pour montrer que moi aussi, j'arrivais à faire quelque chose de ma vie.

 

       Je me dirigeais vers la voiture de Jacob lorsqu’Emmett McGregor, un gars de ma promo, m’interpella :

-    Eh, Zo’ ! T’aurais pu me le dire, quand même !

-    Te dire quoi ? l’interrogeai-je.

-    Que t’allais être grande sœur, pardi ! répondit-il, étonné.

-    Qu’est-ce que tu me racontes ? questionnai-je en riant.

-    Ça fait la une des journaux ! rétorqua-t-il en sortant le magazine Business People de son sac.

-    Ah ! réagis-je en éclatant de rire. Si tu crois tout ce qui est raconté dans ces fichus magazines…

-    C’est bien marqué : « Un sixième enfant pour le milliardaire Valentin Duhamel » ! lut Emmett.

-    C’est du pipeau ! insistai-je. Mon père n’est même pas en couple ! Bon, je te laisse, je dois rentrer. Mon cerveau est en bouillie, il faut que je dorme.

-    Ok, grande sœur !

-    Arrête de m’appeler comme ça ! râlai-je. A plus, Em’ !

 

     Je grommelais encore en montant dans la voiture de Jacob. Ce dernier s’inquiéta :

-    J’espère que tu n’as pas loupé ton partiel de ce matin ! La physiologie est ta matière préférée !

-    Non, non, ce n’est pas ça !

-    Qu’est-ce qui se passe, alors ?

-    Le Business people raconte au monde entier que papa va être à nouveau père ! Je déteste qu’on raconte des mensonges sur lui !

-    Ah oui ? s’étonna Jacob sur un drôle de ton. Tiens donc…

-    Tiens donc, quoi ?! réagis-je.

-   Ton père sera sûrement rentré quand nous arriverons chez toi, tu pourras lui en parler.

-    Oncle Jacob : ne me dis pas que ces conneries sont vraies !

-    Parles-en avec ton père, d’accord ?

 

 

-    Comment tu as pu me faire ça ?! explosai-je tandis que mon père ne niait toujours pas cette rumeur. Comment ?! Je te faisais confiance !!

-    Zoé, je n’ai jamais trouvé le temps de te le dire…

-    Tu t’fous d’ma gueule, là ?! Tu n’as jamais trouvé le temps de me le dire ?! Ça fait combien de temps que tu es avec ta pétasse ?!

-    Zoé ! gronda Valentin. Je peux comprendre que tu sois énervée mais surveille ton langage sinon tu vas te ramasser une fessée !

Je tentai de me canaliser au mieux et répétai moins fort mais plus sèchement :

-    Combien de temps ?

-    Bientôt un an, répondit mon père.

-    Et elle est enceinte de combien de mois ?

-    Bientôt trois.

-    Eh ben on peut dire que vous n’avez pas traîné ! Enfin, à le faire ! Parce qu’à me le dire, ça, c’est autre chose…

-    Zoé, tu étais en plein dans tes exams ! Et avant ça, Romain a déménagé, Judith a disparu, Manon s’est engagée dans l’humanitaire et Trent prépare son départ au Japon ! J’ai jugé que tu n’étais pas assez stable pour recevoir une telle nouvelle.

-    Eh bien tu as mal jugé !

-    Je n’ai plus que toi, Zo. J’ai l’impression que tous mes enfants me lâchent… Il ne me reste plus que toi.

-    Ben non, la preuve ! Il t’en reste un en cours de fabrication et bien au chaud ! Lui, il ne va pas te lâcher de sitôt !

-    Zoé, je t’en prie !

-    Ne compte pas sur moi pour jouer les baby-sitters, je te préviens !

-    Je ne te demande rien, Zoé ! Harper et moi nous débrouillerons pour élever correctement ta petite sœur.

-    Ah parce qu’en plus, c’est une fille ?!

-    Peut-être que je me trompe mais j’en suis persuadé. Zoé, je te présente mes excuses pour t’avoir caché tout ça. Je voulais juste attendre le bon moment pour te le dire. Tes frères et sœurs ne sont pas encore au courant…

-    Tu tiltes que tu as bientôt l’âge d’être grand-père ?! Et quel âge a ta copine, d’ailleurs ?

-    Trente-cinq ans, répondit Valentin.

-    Elle n’a que huit ans de plus que Manon !! Nan mais c’est vraiment grave !!

-    J’ai eu Manon très jeune, se défendit mon père.

-    Oui ! Et depuis t’as eu cinq gosses de quatre mères différentes ! fulminai-je. Sacré palmarès, bravo ! On dirait que tu ne peux pas t’empêcher de fourrer ta bite part…

La gifle que me fila mon père m’empêcha de finir ma phrase et me projeta au sol.

-    Tu as le droit d’être en colère et de m’en vouloir car tu as appris par cette satanée presse à scandale que tu avais une belle-mère et bientôt une sœur ! En revanche, je t’interdis de me parler ainsi et de me manquer de respect comme tu le fais ! Ose encore me reparler comme ça, Zoé, et je te jure que je te flanque la volée de ta vie !

Alors que j’étais toujours au sol à me tenir la joue, mon père continuait :

-    Je te signale que sur les quatre mères de mes cinq enfants, la première nous a abandonnés, la deuxième t’a kidnappée, et la troisième ne m’a même pas prévenu que j’allais être père ! J’espère de tout mon cœur qu’Harper est la bonne car je ne supporterais pas un autre échec, tu comprends, Zoé ?! Mes enfants sont la prunelle de mes yeux, ils sont les personnes les plus importantes au monde pour moi, et mon univers tourne autour d’eux ! Y compris Judith, même si c’est très compliqué avec elle ! Tu me déverses ta colère mais tu penses deux minutes à ce que je ressens, moi ?! Ton frère est parti s’installer à quatre-vingts kilomètres d’ici, ta sœur va partir risquer sa vie dans un pays du Tiers Monde, ton autre sœur s’est volatilisée et j’ai actuellement engagé trois détectives privés pour la retrouver ! Quant à Trent, il va poursuivre ses études là où je ne pourrai pas le surveiller ! Et malgré ça, je fais face ! Je fais face parce qu’il n’y a que ça à faire ! Même quand le monde, mon monde, s’écroule, il faut avancer et aller de l’avant ! Parce que j’ai une multinationale à faire tourner, une famille sur laquelle veiller, une relation amoureuse à assurer et un mariage à préparer, parce qu’il est hors de question qu’Harper et moi accueillions ce bébé sans être mariés ! Alors tu m’excuseras d’avoir pensé que tu n’étais pas prête à entendre la nouvelle, mais malgré toute la tristesse, l’inquiétude et la colère que je ressens en moi, j’ai pensé à toi et à la façon dont tu gèrerais les choses ! Je t’aime Zoé, et tout le monde s’en va ! Alors s’il te plaît, ne me laisse pas tomber ! Pas maintenant !

Voyant que les larmes montaient aux yeux de mon père, je me relevai et me jetai dans ses bras.

-    Je suis là papa, le rassurai-je en me blottissant contre sa poitrine. Je suis là et je ne vais nulle part.

Valentin me serra très longtemps dans ses bras, puis il me chuchota à l’oreille :

-    Harper n’emménagera pas ici avant le mariage, c’est-à-dire début juin. D’ici là, nous allons fêter Noël avec la famille au grand complet, puis toi et moi allons pouvoir passer plus de temps ensemble. Pendant ces cinq mois, il n’y aura que toi et moi à la maison. C’est peut-être une occasion que l’Univers nous offre pour pouvoir nous retrouver un peu.

-    Tu travailles beaucoup.

-    Je te promets que durant ces cinq mois, je réduirai mes déplacements au strict nécessaire. Je te le promets, ma Zoé.

 

Mis devant le fait accompli à cause de la presse (qu’il attaque d’ailleurs en justice pour violation de la vie privée), papa annonça la grande nouvelle durant le dîner à Trent, Manon, et Romain qui était venu dîner à la maison comme tous les vendredis soir. Si Trent trouva cela vraiment super, Romain et Manon eurent plus de mal à accepter que la famille s’agrandisse de nouveau.

 

Alors que nous nous couchions, Trent et moi étions contents d’être en vacances et d’avoir enfin du temps à passer tous les deux.

Lorsque je lui racontai ce qui s’était passé avec Valentin, il réagit, choqué :

-    Il a eu raison de te gifler ! Tu as vraiment été horrible avec lui !

-    J’étais en colère, Trent…

-    Ce n’est pas une raison, Honey ! Le pauvre… Il a raison, ça va vous faire du bien ces quelques mois juste tous les deux.

-    Il y aura toujours Jacob lorsque papa partira en déplacement…

-    Certes, mais tu vas verras que tu vas vraiment adorer passer du temps seule avec Valentin.

-    Nous viendrons passer les vacances de février avec toi à Tokyo.

-    J’espère bien !

-    Ça va être très dur d’être séparée de toi tout ce temps. Et si notre couple n’y survivait pas ?

-    Une fois que notre couple aura survécu à ça, on pourra tout surmonter ! me rassura mon homme.

Nous poursuivîmes notre conversation jusque tard dans la nuit, jusqu’à ce que nous nous endormions l’un contre l’autre dans notre grand lit.

 

A suivre…

Commentaires

  1. Oh là !!!
    Que de changements dans la famille !!!
    Et quelle façon brutale pour Zoé d'apprendre ces nouvelles ! Valentin n'a vraiment pas assuré sur ce coup-là !

    Zoé va avoir son père pour elle toute seule pendant quelques temps ... mais pas sûr que ça facilite l'installation de Harper par la suite dans la maison familiale 🤔
    Espérons en tout cas que Zoé ait réussi ses exams 🙏

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