Jeudi 24 octobre 2019.
Je me réveillai aux alentours de cinq
heures du matin. Sortant d’un cauchemar dans lequel j’étais très en retard pour
aller à l’école, Je fus immédiatement envahie d’une grosse panique : et si
j’étais réellement en retard ?! Personne ne m’a réveillée !
Je sortis de mon lit et errai dans
la maison à la recherche de quelqu’un. Ne trouvant personne, les larmes
coulèrent sur mes joues : j’ai une phobie de la solitude depuis ma toute
jeune enfance. Je ne pouvais me résoudre à être seule dans la maison !
En
panique (et toujours à la recherche de quelqu’un !), je frappai à la porte
du bureau de Michael.
-
Entrez !
dit-il.
Entendre
sa voix me soulagea : je n’étais pas seule !
J’ouvris
la porte de cette pièce où je n’étais encore jamais entrée et découvris un
véritable repère d’informaticien. Michael possède un énorme bureau avec pas
moins de trois écrans d’ordinateur. Son fauteuil a l’air d’être le plus
confortable du monde.
-
Coucou ma puce,
me dit-il en se tournant vers moi pour ensuite se lever de son fauteuil.
Papa
s’approcha de moi et vis que je pleurais. Il me prit immédiatement dans ses
bras :
-
Oh là, mais
qu’est-ce qui t’arrive ma pucinette ?
-
Je…Je me suis
réveillée et…et j’étais toute seule…et…j’ai fait un cauchemar et…
-
Mon cœur, tout va
bien. Je suis dans mon bureau en train de travailler et tes sœurs dorment
encore. Maman vient tout juste de partir au travail… Tout va bien, tu n’es pas
seule dans la maison et tu as juste fait un cauchemar.
Michael
avait l’air d’être au courant de ma phobie. J’imaginais très bien que Tom et
Dana lui en aient touché deux mots hier soir.
-
Est…est-ce que je
suis en retard ?
-
En retard pour
quoi ? s’étonna mon père.
-
Pour aller à la
fac, dis-je.
-
Marie, il n’est
que 5h du matin ! Habituellement, tes cours ne commencent jamais avant
8h30 ! Je t’assure que tu ne seras jamais en retard en te levant à 5h !
De plus, si j’avais pensé un seul instant que tu étais en retard, je serais
allé te réveiller et voyant que tu ne te levais pas !
-
Ah…euh…oui,
bégayai-je en tentant de me calmer. Mais du coup, j’ai cours à quelle
heure ?
-
Tu n’as pas cours
aujourd’hui, m’annonça mon père d’accueil. Nous avons reçu votre emploi du
temps définitif tard hier soir, en même temps que notre convocation. Tu n’as
pas cours aujourd’hui, sois tranquille. D’ailleurs, il n’est pas encore l’heure
de te lever. J’aimerais que tu ailles te recoucher, ma pucinette.
Michael
m’accompagna jusqu’à ma chambre. Encore un peu dans les vapes, il me fallut du
temps pour analyser ses paroles.
Je
m’allongeai dans mon lit et me couvrai chaudement avec ma couette. Michael
s’assit à côté de moi et me caressa les cheveux. Je posai ma tête contre son
torse et profitai de ce moment père-fille très agréable.
-
Aller, essaie de
te rendormir, mon cœur. Je reste avec toi jusqu’à ce que ce soit le cas.
Néanmoins,
mon cerveau commençait à se réveiller et j’avais plein de questions :
-
Vu qu’il est 5h,
comment ça se fait que maman est déjà partie au travail ?
-
Elle est en
déplacement à Bruxelles aujourd’hui, me répondit Michael. Elle devait partir
tôt pour pouvoir rentrer tôt.
-
Et toi ?
Pourquoi tu travailles déjà à 5h ?
-
Parce que je suis
toujours très matinal lorsque je fais du télétravail. C’est là que je suis le
plus efficace.
-
Et tu as dit que vous
aviez reçu mon emploi du temps définitif ?
-
C’est exact. Mais
Marie, tu ne veux pas dormir ? On aura la journée pour en reparler…
-
Il est bien, mon
emploi du temps ? demandai-je, ignorant le conseil paternel.
-
Tu n’as pas cours
le mercredi matin, ni le jeudi, dit-il. Pour toi qui es une grosse dormeuse,
c’est plutôt cool !
-
Oui, admis-je. Au
fait, papa, tu as dit que tu avais reçu l’emploi du temps en même temps que la
convocation. Mais quelle convocation ?
-
La convocation
pour la réunion de ce soir, répondit Michael. On en a déjà parlé en début de
semaine…
-
Quelle
réunion ?! m’inquiétai-je en tombant des nues. Je ne suis au courant de
rien…
-
La réunion
parents-profs, Marie !
-
Mais je ne suis
pas au courant, moi !
-
Pourtant, on en a
parlé plusieurs fois depuis lundi, dit Michael.
-
Comment c’est
possible puisque vous n’avez reçu la convocation qu’hier soir ? tiltai-je.
-
Nous avons été
prévenus dimanche soir, m’expliqua papa, peu de temps après votre arrivée à
Louise et toi. La convocation d’hier soir a été envoyée uniquement pour nous informer
des différents créneaux horaires que nous avons avec chaque professeur.
-
Comme les
réunions qu’on fait au collège et au lycée ?!
-
Oui c’est ça.
-
Mais on est à la
fac !
-
Mais tu n’es pas
majeure… me rappela mon père.
-
Ah oui, c’est
vrai.
-
Donc il y a une
réunion parents-profs car tu as des comptes à nous rendre sur ton travail et
ton comportement à l’école.
-
Super…
-
Marie, s’il te
plaît, j’aimerais que tu te rendormes.
-
Elle est à quelle
heure, la réunion ?
-
Pour ta mère et moi,
notre premier rendez-vous est à 17h.
-
Maman sera
rentrée à 17h ?
-
Oui, c’est pour
cela qu’elle est partie très tôt. Maintenant, il faut que tu te rendormes.
-
Et elle finira à
quelle heure, la réunion ?
-
Eh bien nous avons
vingt minutes par prof et il y a sept profs…
-
19h20 ?! m’exclamai-je.
-
Oui, c’est pour
cela que j’aimerais que tu te rendormes, Marie ! insista Michael en
haussant le ton. Vous allez déjà vous coucher un peu plus tard que d’habitude à
cause de cette réunion, je ne veux pas que tu aies du sommeil en retard.
-
On sera avec
vous, à la réunion ? demandai-je.
-
Oui.
-
Mais au fait, j’ai
huit profs, pas sept !
-
Madame Sauvage ne
pourra pas être là. Donc ça fait sept.
-
Mais…
-
Marie Webber !
gronda Michael. Dodo ! Tout de suite !
Voyant
que mon père adoptif se fâchait, je stoppai mes questions et consentis à
essayer de me rendormir. Comme dit, Michael resta avec moi jusqu’à ce que ce
soit le cas.
Lorsque je rouvris à nouveau les yeux, il était déjà dix heures. Je descendis dans la cuisine et pris mon petit déjeuner devant la télé, étant seule. J’en profitai pour consulter mon emploi du temps définitif, déjà affiché sur la porte du frigo.
Bon, y’a pire comme emploi du temps. J’en fus plutôt satisfaite. En revanche, les nouvelles matières ne me plaisaient pas trop. Elles avaient été annoncées et débutées à la rentrée, mais voilà maintenant plusieurs semaines que nous n’avions plus maths, ni sciences du langage, ni PPM2E (PréProfessionnalisation, Métiers de l’Education & de l’Enseignement), ni EFME (Enseignement du Français & des Mathématiques à l’Ecole), ni Physique. Le fait que ces matières reprennent alourdissait notre emploi du temps et je n’en étais pas du tout satisfaite.
J’allai
ensuite prendre un bon bain chaud dans lequel je me prélassais, lisant mon
bouquin du moment. Je n’en sortis qu’une bonne heure plus tard, l’eau commençant
à se refroidir. Je me réfugiai ensuite dans ma chambre, où Louise me rejoignit
pour m’aider à réviser le fameux cours sur Saint-Louis.
-
J’ai besoin d’aide
pour mettre la table, les filles ! appela Michael.
Louise
et moi descendîmes au rez-de-chaussée à l’appel de notre père. Néanmoins, Elsa
et Victoire étaient arrivées avant nous. Nous les aidâmes tout de même, si bien
que le couvert fut dressé en moins de deux. Quelques secondes plus tard, le
four sonna, signe que le gratin préparé par notre mère était prêt. Scarlett est
supra-organisée. Les repas sont toujours faits maison et prêts à l’heure, même
lorsqu’elle n’est pas là. Je suppose qu’elle avait laissé des consignes à Michael
pour ce midi !
Nous
nous mîmes à table et papa posa le plat en son centre. Nous nous servîmes
toutes une par une et dégustâmes les succulentes lasagnes préparées par notre Barbie
de mère.
Après avoir débarrassé la table et m’être
lavée les mains, j’allais remonter dans ma chambre lorsque mon père m’interpella :
-
Marie, tes
médicaments.
Ah
oui, j’avais oublié de prendre mes deux cachets post-repas.
-
Je ne devrais pas
avoir à te le rappeler à chaque fois, me réprimanda Michael en me regardant
avaler mon traitement.
-
Ça tombe bien car
je ne les oublie pas à chaque fois, rétorquai-je d’un air malicieux.
-
Tu as pris ton
médicament ce matin ?
-
Oui, mentis-je
avec aplomb.
Si
j’avais hésité, ça se serait vu tout de suite que je mentais.
-
Très bien, dit l’informaticien
en se dirigeant vers le placard contenant mes médicaments.
-
Qu’est-ce que tu fais ?
m’inquiétai-je.
-
Je vérifie,
dit-il.
-
Tu ne me fais pas
confiance ?! m’indignai-je.
-
Tu sais bien que
non, lâcha mon père. Pas après ce que tu nous as fait avec ton ordonnance.
-
Mais…
Michael
prit la boîte et en sortit la plaquette. Je crus qu’il allait littéralement exploser
de colère.
-
Pourquoi est-ce
qu’il n’y a que deux sachets manquants, Marie ?!
-
Par…parce que ça
ne fait que deux jours que je le prends… me défendis-je.
-
Nous sommes allés
chercher ce fichu médicament mardi et tu as pris un sachet dans la foulée,
relata Michael. Je t’ai vue prendre celui d’hier matin ! Avec aujourd’hui,
il devrait y avoir trois sachets manquants, Marie !
-
Euh…ben…euh…
Piégée.
J’étais piégée. Je ne trouvai qu’une excuse complètement bidon à proférer :
-
J’ai…j’ai attaqué
une autre boîte ce matin.
-
Ah oui ? Et
elle est où, cette boîte ?!
-
Eh bien…euh…
-
Je pense que
cette fameuse boîte sort tout droit de ton imagination, Marie ! On ne risque
pas de la trouver ! Tu continues à me mentir alors que tu es déjà dans de
sales draps !
-
Je…je peux le
prendre tout de suite, dis-je en espérant que cela calme mon père.
-
Tu sais très bien
qu’il faut que tu prennes un sachet dès ton lever, avant ton petit déjeuner !
-
Oui mais il est
vraiment dégueu ! Même quand je le dilue dans du jus de fruits, c’est
dégueu !
-
Ce n’est pas mon
problème, Marie ! C’est de ta santé que je me soucie ! Et tu devrais
t’en soucier aussi et faire l’effort d’avaler ton médicament tous les matins !
C’est un caprice que tu es en train de me faire, là !
-
Mais c’est vraiment
pas bon…
-
C’est bien ce que
je dis ! Un caprice ! Et les jeunes filles capricieuses, moi, je les
mets sur mes genoux pour leur donner une fessée ! Baisse ton pantalon !
Je
mis instinctivement mes mains sur mes fesses pour me protéger et reculai
lentement pour m’écarter de mon père. Je le priai :
-
Nan, papa !
J’t’en prie !
-
Tu ne prends pas
ton médicament, tu me mens, tu es capricieuse… Donne-moi UNE SEULE bonne raison
de ne pas m’occuper immédiatement de tes fesses !
-
Je ne
recommencerai pas…
-
Raison non valable !
Je n’ai plus aucune confiance en ce que tu dis !
-
Oh papa, s’il te plaît…
suppliai-je, les larmes me montant aux yeux. Je te jure que je ne recommencerai
pas !
Michael
prit quelques secondes de réflexion et dit :
-
La prochaine fois
que tu ne prends pas ton médicament, tu paieras pour les deux oublis ! Je
peux te garantir, Marie, que tu n’auras vraiment pas envie de la prendre, cette
fessée-là ! C’est compris ?!
-
Oui papa, dis-je
soulagée.
-
Et à partir de
demain, tous les matins sans exception, tu prendras ton médicament devant moi !
-
Oui papa,
répétai-je.
-
Et puisque tu as
déjà fait des tiennes aujourd’hui, mes entretiens avec tes profs ont intérêt à être
impeccable, Marie ! Vraiment ! Car je te jure que si ce n’est pas le
cas, tes fesses vont le sentir passer !
Michael
se tourna vers mes sœurs qui le regardaient me passer un savon, et les prévint :
-
C’est valable
pour vous aussi ! Pour chaque prof qui donnera un avis négatif sur vous,
ce sera trois minutes que vous passerez sur les genoux de votre mère ou sur les
miens ! Trois minutes de fessée déculottée, les filles ! Y’a intérêt
à ce que ça aille !
Le
père de famille nous jeta une telle angoisse qu’un silence se forma dans la
pièce. Nous avions toutes démarré le calcul : quels profs pourraient nous
être favorables ? Quels profs pourraient nous être défavorables ?
Je
passai instantanément en revue tous mes professeurs :
*
Mr Montaigu – Littérature comparée : je n’ai pas eu d’accrochage
avec lui et j’ai 12,5/20 de moyenne dans sa matière. Ça devrait aller. Avis
favorable supposé.
*
Mme Levillain – Culture littéraire : elle me déteste et
c’est réciproque. Avis défavorable certain.
*
Mme Jones – Anglais : je suis major de la promo et elle m’adore.
Avis favorable certain.
*
Mme Lebourg – Littérature française : ça devrait aller. Avis
favorable supposé.
*
Mr Leloup – Grammaire avancée : j’ai une bonne moyenne
(14/20) et me fais discrète dans son cours. Avis favorable supposé.
*
Mr Friletti – Géographie : alors lui, il m’adore. J’ai 19,75/20
de moyenne, impossible que ça n’aille pas. Avis favorable certain.
*
Mr Montaire – Histoire : le pote de Tom et Dana me hait
jusqu’à la moelle. Avis défavorable certain.
Bon,
normalement cela ne me fera que deux avis défavorables, donc six minutes de fessée.
Néanmoins, six minutes de fessée, c’est interminable ! Surtout de la part
de mes nouveaux parents ! Je ne savais pas comment j’allais pouvoir me sortir
de ce pétrin…
Selon Michael, il y a deux réunions parents-profs par semestre. A la prochaine réunion, les profs seraient au nombre de douze. Presque deux fois plus de chances de se faire punir qu’actuellement. Il allait falloir que je fournisse des efforts surhumains pour bien me tenir et travailler correctement…
Heureusement pour moi, mes sœurs ne
m’en voulurent pas d’avoir mis Michael tellement en rogne qu’il nous avait
imposé ce barème pour la réunion parents-profs.
L’après-midi, notre père nous autorisa à aller faire
un tour au centre commercial entre sœurs, pendant qu’il terminait sa journée de
travail dans son bureau. Sur ce coup-là, Michael était beaucoup plus confiant
que Tom et Dana ! Ils n’auraient jamais accepté que nous allions seules au
centre commercial sans eux ou Héloïse !
La seule condition que papa avait
posée était que nous rentrions à 16h30. Nous étions là à l’heure et notre père
nous en félicita. Maman était rentrée et buvait un café dans le salon. Nous l’embrassâmes
toutes les quatre en guise de bonjour puis prîmes un rapide goûter avant de
nous mettre en marche pour la fac.
En arrivant dans l’entrée de la fac,
nous découvrîmes une dame (que mes sœurs et moi n’avions d’ailleurs jamais vu) se
tenant derrière un comptoir. En nous voyant arriver, elle demanda, avec un
grand sourire :
-
Bonjour ! Puis-je
avoir le nom de famille, s’il vous plaît ?
-
Webber, répondit
Scarlett.
-
Filière
Lettres-Humanités ? demanda la femme du comptoir en vérifiant ses papiers.
-
Exact, continua maman.
-
Alors, j’ai Marie,
Elsa, Louise et Victoire, annonça la dame d’accueil. C’est bien ça ?
-
Oui c’est ça,
confirma notre mère.
-
Très bien, dit la
femme en tendant une feuille à Scarlett. Votre salle d’attente est en B103. Bâtiment
de droite, 1er étage. Monsieur Friletti viendra vous chercher pour
votre premier rendez-vous.
-
D’accord, je vous
remercie, dit Scarlett.
La
vache, c’était bien mieux organisé que dans mon collège et mon lycée !
Nous nous installâmes en salle B103
et retrouvâmes nos camarades de classe accompagnés de leurs parents. Marion,
Angélique et Mégane, nos copines, vinrent nous voir Louise et moi, pendant qu’Elsa
et Victoire allaient voir d’autres potes. Angélique nous demanda :
-
Ça va les filles ?
Pas trop stressées ?
-
A mort,
répondis-je.
-
Je crois que je vais
mourir de stress, dit Louise.
-
Vous commencez
par qui ? demanda Marion.
-
Friletti,
répondis-je. Ça devrait aller…
-
La vache, ils
sont canons vos parents ! nous dit Constance en nous rejoignant. On les
croirait arrivés tout droit d’Hollywood !
-
Peut-être,
dis-je, mais ils ne sont pas commodes. Notre père, s’il te met une fessée, tu
décolles du sol. Et s’il te met une baffe, tu ne te relèves pas.
-
C’est vrai qu’il
a l’air tout en muscles, dit Mégane en observant Michael. Pas un pet de graisse !
-
Et votre mère ?
demanda Constance.
-
Elle est ceinture
noire de trois arts martiaux différents, dit Louise. Faut pas la chercher.
Nos
copines rirent, ce qui nous irrita légèrement.
-
Ouais mais vous
nous avez aussi dit qu’ils sont super attentionnés et sympas quand vous êtes
sages, donc ça va ! dit Marion.
-
Moi mon père, il ne
cherche pas à savoir si je suis sage ou pas, dit Angélique. Il me colle une
fessée tous les soirs. Il dit que c’est pour les conneries que je ferai plus
tard.
Je
jetai un œil aux parents d’Angélique. On aurait dit les Dursley dans Harry
Potter. Je préférais de loin avoir Michael et Scarlett !
-
Vous commencez par
qui, vous ? demanda Louise aux filles.
-
Lebourg, dit
Marion. Normalement, elle m’aime bien.
-
Montaire, continua
Angélique. Comme ça je vais me faire tuer dès le départ.
Une
vague de compassion m’envahit.
-
Monsieur et
madame Webber ? entendis-je.
Je
me tournai et vis mon prof de géographie dans l’encadrement de la porte.
Michael et Scarlett se levèrent. Mes sœurs et moi quittâmes nos amies et les
suivîmes.
Monsieur Friletti nous conduisit
dans une salle de classe déserte. Sept chaises étaient disposées en rond :
six pour nous et une pour lui. Nous nous assîmes – je fis bien attention à m’asseoir
entre deux de mes sœurs, au cas où ! – et l’entretien commença :
-
Bien, nous avons
cinq minutes pour chacune de vos filles, annonça le prof en regardant sa montre.
Je vous propose de procéder par ordre alphabétique.
Monsieur
Friletti commença donc par Elsa, puis Louise avant d’en arriver à moi.
-
Si vous n’avez
plus de question, je propose que nous passions à Marie, dit-il.
Mes
parents acquiescèrent.
-
Alors pour ce qui
est de Marie : ses notes sont excellentes et son comportement en classe est
irréprochable. Honnêtement, si je ne pouvais avoir que des élèves comme Louise
et Marie dans ma classe, cela serait merveilleux !
Ouf,
un avis favorable ! Mais celui-là, j’en étais déjà sûre. Plus que six.
Le deuxième rendez-vous était avec madame Lebourg, littérature française. Elle ne fut pas très tendre avec moi :
-
Marie n’est pas
assez sérieuse dans son travail. Elle prend ses devoirs trop à la légère et
fait le strict minimum. C’est d’ailleurs pour cela qu’elle n’a que 12/20 de
moyenne dans ma matière ! Ce pourrait être une bonne moyenne pour un(e)
élève qui rencontre des difficultés ; mais c’est loin d’être le cas de
Marie. Il faut qu’elle se mette au travail et qu’elle cesse de bâcler ses
devoirs !
-
Vos cours ne sont
pas assez intéressants, me défendis-je.
-
Marie ! me gronda
Scarlett. Veux-tu te taire ?!
Je
me tus, ne souhaitant pas poser plus de problème.
Avis
défavorable. Trois minutes. J’ai envie de pleurer.
Madame Jones, en anglais, se confondit
en compliments sur mon cas. Avis favorable et soulagement pour ma part.
Je fus très déçue par monsieur
Montaigu (littérature comparée) :
-
Marie a une
grosse touffe de poils dans chaque main. Elle n’a pas une moyenne très élevée à
cause de sa fainéantise ! Fait-elle ses devoirs ?
-
Oui, dit Michael.
C’est vrai qu’elle y passe moins de temps que ses sœurs mais nous pensions que
c’est parce qu’elle avait des facilités…
-
Elle les bâcle,
trancha le prof.
Avis
défavorable. Six minutes. Je fais des efforts colossaux pour me retenir de pleurer.
Monsieur Leloup tempéra les choses :
il dit que j’étais capable de mieux mais que dans l’ensemble, il était plutôt
satisfait de mon travail. Avis favorable. Plus que deux.
Madame Levillain me dézingua
purement et simplement :
-
Ses notes sont
plus que médiocres et son comportement est tout bonnement inacceptable. J’espère,
monsieur et madame Webber, que vous allez redresser la barre avec Marie ! De
toute évidence, monsieur et madame Johnson n’étaient pas assez sévères…
-
Ne parlez pas d’eux
comme ça ! m’indignai-je.
-
Marie, je
comprends que cela puisse te faire mal au cœur, me dit Scarlett, mais il y a
des façons beaucoup plus polies et diplomates de s’adresser à sa professeure !
-
Il est certain que
Marie n’est pas assez cadrée à la maison, reprit la prof, sinon elle ne se
permettrait pas cette insolence et cette fainéantise en cours.
Neuf
minutes. Une larme coule lorsque nous sortons de la pièce ; je l’essuie rapidement.
Louise tente de me réconforter. Je suis en train de ramasser ce que j’ai semé.
C’est ma faute.
Comme si ça ne pouvait pas être
pire, le dernier rendez-vous était avec Pascal Montaire, le terrible prof d’histoire.
Il
nous démonta. Que ce soit Elsa, Victoire, moi… Seule Louise s’en sortit indemne,
sans surprise.
-
Marie manque
cruellement d’un cadre, disait-il à mes parents. Bien que Tom et Dana aient fait un excellent travail avec elle, il est clair qu’il ne faut surtout pas relâcher
la bride. J’ai senti Marie s’assagir un peu ces derniers temps, j’ai néanmoins
peur d’un regain d’insolence.
-
Il n’y aura aucun
regain, affirma Michael. N’est-ce pas Marie ?
-
Non papa, dis-je
les yeux rivés vers le sol.
Douze
minutes. Mon derrière serait bientôt hors service.
Nous rentrâmes à la maison comme
nous étions venus : à pied. Seulement, je traînai les pieds derrière ma
famille, pleurant silencieusement toutes les larmes de mon corps. Douze
minutes. J’allais mourir.
En rentrant, Michael et Scarlett
commandèrent des pizzas pour récompenser nos avis favorables. Néanmoins, mis à
part Louise qui avait fait un sans-faute, je n’étais pas la seule à avoir
récolté des minutes sur les genoux de mes parents : Elsa avait gagné trois
minutes, Victoire en avait gagné neuf.
En attendant les pizzas, maman
attrapa Elsa (qui avait eu un avis abominable de la part de Montaire) et papa
attrapa Victoire. Mes parents prirent chacun une chaise de la salle à manger, allongèrent
mes sœurs sur leurs genoux malgré les pleurs et les prières, programmèrent les
minuteurs sur leurs téléphones respectifs, posèrent leurs téléphones à côté d’eux
et commencèrent à punir Elsa et Victoire.
J’avais
énormément de peine pour elles, surtout en sachant que j’étais la prochaine.
Elsa et Victoire gigotaient dans
tous les sens mais Michael et Scarlett les maintenaient tellement fermement qu’elles
ne pouvaient échapper aux claques.
Après une minute, leurs pantalons furent
baissés. Après deux minutes, leurs culottes tombèrent. Mes parents ne relâchaient
pas la cadence et tapaient vraiment fort. J’avais déjà mal aux fesses. La boule
dans mon ventre n’avait jamais été aussi grosse. Ma peur de prendre la fessée n’avait
jamais été aussi grande.
Trois minutes sonnèrent. Elsa fut
libérée (délivréeeee !!! Pardon, j’étais obligée de la faire…).
Elle se rhabilla et partit dans la cuisine pour prendre un morceau de sopalin
et s’essuyer le visage. Quant à maman, elle se leva et se dirigea vers le
fauteuil où j’étais assise.
-
Viens là, Marie.
-
Naaan ! Maman,
s’il te plaît ! J’t’en supplie !
-
Tu te fiches de
moi, là ?! Tu n’as déjà pas pris ton médicament, ce matin ! Ensuite,
ton père t’avait prévenue que la réunion parents-profs avait intérêt à bien
se passer ! Tu trouves qu’elle s’est bien passée ?!
-
Y’a trois profs
qui ont dit que j’étais presque parfaite !
-
Trois profs sur
sept, Marie ! gronda Scarlett en me tirant sur le bras pour me sortir du
canapé. Ce n’est pas la majorité ! La majorité de tes professeurs te
trouve exécrable ! Tu trouves cela normal ?!
-
Non maman.
Je
ne m’excusai pas, voyant que ça ne servirait à rien. Scarlett me colla trois
claques sur le jeans que je sentis aussitôt passer.
-
Je te préviens
Marie : tu as vraiment, vraiment intérêt à te tenir à carreaux à l’école !
Tu vas en prendre des fessées, sinon ! Tous les jours, s’il le faut !
Un bilan comme ça, on ne veut plus jamais en avoir ! Tu as compris ?!
Je
n’avais encore jamais vu ma mère dans une telle colère. Elle s’assit sur le
canapé, me baissa mon jeans et ma culotte et me bascula sur ses genoux. Elle
prit également son téléphone et me dit :
-
Tu es bien
installée, Marie ?! Parce que tu vas y rester un moment, sur mes genoux !
Douze minutes, exactement ! Il paraît que tu manques de discipline, je
vais t’en donner de la discipline !
Scarlett tapa fort, sans relâche sur mes pauvres fesses.
A aucun moment elle ne faiblit, à aucun moment elle ne fit de pause, à aucun
moment elle n’eut pitié de mes supplications, des mes larmes et de mes cris. Je
me rendais maintenant compte que Victoire avait dit vrai : lundi, ma mère m’avait
donné une « petite » fessée. Elle était capable d’être sévère, bien
plus sévère. Elle possédait une force que je ne lui soupçonnais pas.
Vu la fessée que je venais de recevoir de ma mère, je
remerciai le ciel de ne pas avoir eu affaire à mon père.
Demain, il me faudrait un quinze en histoire. Dans
trois semaines, il me faudrait un bulletin impeccable. Dans deux mois, la réunion
parents-profs devra être parfaite.
Mes fesses me brûlaient tellement que je mangeais ma
pizza en dansant discrètement sur ma chaise.
La douche apaisa un peu ma douleur : l’eau chaude
ruisselait sur mes fesses meurtries. J’avais clairement pris ce que Michael et
Scarlett appellent une « bonne » fessée, mais ce qui est à mes yeux
une « énorme » fessée. Il allait falloir que je me calme, pour ne pas
découvrir ce que signifie une « très bonne » fessée pour mes parents.
Après avoir dit bonne nuit à mes sœurs, je me couchai.
Michael et Scarlett vinrent me border.
Demain, il me faudra absolument un 15/20 en histoire.
A suivre…
Quelle sacré semaine pour Marie !
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