Vendredi 15 novembre 2019
En arrivant à la fac ce matin, Louise et moi tombâmes
sur Anaïs ; nous en profitâmes (ou plutôt, j’en profitai) pour lui
raconter l’horriiible journée passée en compagnie des Dubois.
-
Oh, c’est juste à
cause d’elles ! soupira Anaïs. Quand vous m’avez dit que ça
n’allait pas, j’ai cru que c’était à cause des bulletins !
-
Non, nous avons
plutôt eu des bonnes notes, ce semestre ! dis-je. Normalement, ça devrait
être bon !
-
Ouais, vous
pouvez dire merci à votre superbe ancienne-sœur pour vous avoir sorties de la
galère ! fanfaronna Anaïs.
-
Attends… Pourquoi
tu dis ça ? interrogea Louise, bien que je fusse tout aussi intéressée par
la réponse.
-
Parce que c’est
grâce à moi que vous avez eu des superbes notes ! continua-t-elle. Je sors
avec le technicien informatique depuis un mois ! Toutes vos notes sont
trafiquées !
-
Attends, tu sors
avec lui depuis que je t’ai emmenée le voir pour trafiquer les dossiers la toute
première fois ?! m’emportai-je.
-
Nan, celui-là s’était fait virer après le coup de fil de Tom et Dana, expliqua Anaïs. Celui
qui l’a remplacé, en revanche, est trop canon ! Lui et moi, ça a été le
coup de foudre, direct !
-
ET ÇA T’AURAIT
TROUE LE CUL DE NOUS LE DIRE ?! criai-je.
-
Eh ! Tu
m’cries pas d’ssus, ok ?! se défendit-elle.
-
Tu t’es permise
de trafiquer nos dossiers, et tu voudrais qu’elle arrête de crier ?! s’énerva
Louise.
-
Mais… vous avez
dit que vous aviez des parents hyper sévères, je voulais juste vous aider un
peu… expliqua Anaïs, penaude.
-
SANS NOUS EN
PARLER ?! hurlai-je. MAIS T’ES PAS BIEN OU QUOI ?! QU’EST-CE QUI NE
TOURNE PAS ROND DANS TA TÊTE DE DEBILE MENTALE ?!
-
Tu ne t’es pas
dit un seul instant que si nos parents le découvraient, on était beaucoup plus
mortes qu’à cause des mauvaises notes ?!
-
Ben euh…
-
EN PLUS, ILS NE
NOUS CROIRONT JAMAIS !
-
Du calme, j’vais
aller leur expliquer, moi, à vos parents…
-
J’TE JURE QUE
T’AS INTERÊT A LE FAIRE, SINON JE VIENDRAI TE HANTER POUR LE RESTANT DE TES
JOURS QUAND JE SERAI MORTE !
-
Arrête de hurler,
Marie, tout le monde vous regarde, dit Marion après nous avoir rejoint.
-
PARCE QUE TU
CROIS QUE J’EN AI QUELQUE CHOSE A FAIRE ?! A CAUSE DE CETTE CONNASSE, MES
PARENTS VONT ME BUTER !!
-
Je pensais
vraiment bien faire, dit Anaïs, les larmes aux yeux. Et ils ne sont pas encore
au courant…
-
Les profs ne sont
pas cons, Anaïs ! gronda Louise. Ils vont vite s’apercevoir du décalage
entre les copies et les notes affichées sur l’écran !
-
Ça fait plusieurs
semaines qu’on ne nous rend même plus les copies ! se défendit Anaïs. Elles
sont directement archivées, on a juste un compte-rendu sur nos lacunes !
-
Les profs vont
quand même comparer ! protesta Louise. Nos parents vont être
appelés ! Ça va être la fin pour nous !
-
Tu t’en fous toi,
t’es major de promo ! aboyai-je. Mais tu penses à MOI ?!
-
Mes notes ont été
trafiquées tout autant que toi ! N’est-ce pas Anaïs ?!
Notre
ancienne sœur hocha faiblement la tête d’un air coupable.
-
Tu m’as mis des
19/20 et des 20/20 au lieu des 16/20 et des 17/20, c’est ça ?!
Anaïs
réitéra son hochement de tête.
-
On est dans la
merde, déclarai-je après avoir passé ma main dans mes cheveux bouclés. On est vraiment
dans la merde.
Je passai la journée avec la boule au ventre.
J’imaginai bien Louise dans le même état que moi.
15h, notre dernier cours – histoire – s’apprêtait à
débuter. Nous entrâmes dans l’amphithéâtre, nous assîmes et sortîmes nos
affaires. Alors que je démarrais mon notebook, monsieur Montaire fit une
annonce :
-
J’ai un message à
vous faire passer au nom du corps professoral. Mes collègues et moi-même avons
remarqué, à la rédaction des livrets de notes mensuels, que certains et
certaines d’entre vous avaient falsifié leurs notes en piratant le logiciel.
Vous êtes une vingtaine à être concernés. Nous souhaitons vous informer que tous
les parents des élèves concernés ont été convoqués ou le seront dans le
week-end. Il reviendra aux parents des élèves fautifs de décider d’une
sanction. Bien, nous allons maintenant reprendre notre chapitre sur les Wisigoths…
-
Tu as mis une vingtaine
de personnes dans le coup ?! gronda discrètement Louise.
-
J’me suis fait un
tas de blé ! justifia Anaïs. Mes parents à moi s’en foutent, de toute
façon ! J’peux faire toutes les conneries que je veux !
-
Ma mère s’était
renseignée pour que tu changes de famille d’accueil, dis-je.
-
Ça ne s’est pas
fait, rétorqua sèchement Anaïs.
Je
crus déceler une pointe de tristesse dans sa voix. J’espérais secrètement mais
sincèrement que mes parents la recadrent une bonne fois pour toutes lorsqu’elle
leur expliquera ce qu’elle nous a fait.
En sortant du bâtiment, Louise et
moi eûmes la désagréable surprise de tomber sur nos parents. Nous nous
figeâmes. Scarlett nous fit signe d’avancer avec son index. Accompagnées
d’Anaïs nous avançâmes vers eux tout en veillant à rester à bonne distance de
leurs mains afin qu’elles ne puissent pas atteindre n’importe quelle partie de
nos corps.
-
Papa ?
Maman ? dis-je fébrilement. Que faîtes-vous là ? Papa, tu es censé
être à Paris pour le travail, aujourd’hui !
-
J’ai dû revenir en
urgence après un appel de la fac ! répondit Michael. Nous sortons du
bureau de votre directeur de licence ! Nous avons appris des choses
vraiment intéressantes !
Je
poussai Anaïs dans le dos. Les yeux rivés vers le sol, elle commença :
-
Monsieur Webber,
madame Webber, j’ai quelque chose à vous dire…
Les bras croisés, Michael et Scarlett écoutèrent
l’intégralité du récit d’Anaïs sans ciller. Lorsqu’elle eut terminé, ils lui
demandèrent :
-
J’imagine que tes
parents sont au courant !
-
Mes parents s’en
fichent totalement, répondit Anaïs qui fixait toujours le sol. Marie vous en
avait déjà parlé lorsqu’elle était avec moi en vacances chez Tom et Dana…
-
J’avais demandé
que mes amis te prennent en charge, dit Scarlett. Je me souviens maintenant. Ça
n’a pas pu se faire…
-
Tu ne peux pas
rester en roues libres comme ça, Anaïs ! s’emporta Michael. Tu ne peux pas
faire toutes les bêtises du monde en toute impunité !
Mes
parents se regardèrent durant quelques secondes sans échanger un mot, puis ma
mère annonça :
-
Je vais appeler
ta famille d’accueil, ainsi que le gestionnaire. A partir de dimanche soir, tu
viens chez nous. Nous devons parler en famille – et avec le gestionnaire – sur
le caractère permanent ou temporaire de ta présence chez nous, mais à partir de
dimanche soir, tu dors à la maison. A ta place, je redouterais vraiment d’être
dimanche soir car nous n’allons clairement pas laisser passer ce que tu as
fait. Nous t’attendons donc dimanche, à 18h30, chez nous. File.
Anaïs
ne se le fit pas dire deux fois.
-
Quant à vous
deux, on parlera également dimanche soir de vos bulletins. En attendant,
pouvez-vous venir à la maison une heure plus tôt ? A 17h30 au lieu de
18h30 ? Afin que nous puissions parler d’Anaïs…
Louise
et moi acquiesçâmes.
-
Ok, dit Michael.
Bon week-end les filles. Passez le bonjour de notre part à vos familles.
Mes
parents nous serrèrent tour à tour dans leurs bras puis prirent le chemin de la
maison, main dans la main. Quant à moi, je fis un énorme bisou à Louise et
courus dans les bras de Mathieu qui m’attendait, assis sur un banc.
-
Ils te voulaient
quoi, tes parents ? me demanda-t-il lorsque j’arrivai à sa hauteur.
-
Embrasse-moi,
allons dans la voiture, et je te raconterai tout.
Dimanche 17 novembre 2019.
Ce week-end était idyllique :
Puisque c’était l'anniversaire (vingt ans !) de mon chéri, nous avons fait une grosse fête
dans la salle municipale hier soir. Puisque nous nous sommes couchés tard, cela
ne faisait qu’une heure et demie que nous étions éveillés Mathieu et moi
lorsqu’il me déposa devant la maison des Webber.
-
Tu crois qu’ils
accepteraient de te donner une heure en plus le week-end prochain ?
demanda mon amoureux.
-
Il suffit de leur
demander, je ne pense pas qu’ils soient contre, dis-je.
-
Tu me tiendras au
courant, alors ! dit Mathieu avant de m’embrasser. Aller, il est temps que
tu ailles te faire tuer pour ton bulletin, et que je retourne au trou.
-
Ah oui !
m’exclamai-je. C’est vrai que tu es au trou en ce moment !
-
Oui, il me reste
encore une semaine à tirer…
-
Oh, mon pauvre
loulou…
-
J’préfère quand
même ça à ta situation ! C’est vraiment trop la honte de prendre des
fessées déculottées comme une gamine de cinq ans…
-
Peut-être, mais ce
n’est qu’un mauvais moment à passer ! me défendis-je. Tu ne restes pas
enfermé dans une pièce sombre avec un lit de paille et un sceau…
-
Oui enfin, vu
l’état de tes fesses certains week-ends…
-
Oui mais j’peux
circuler comme je veux dans la maison, faire ce que je veux comme je veux. Je
ne m’ennuie jamais !
-
T’as quand même
des règles hyper contraignantes !
-
Pas plus qu’à
l’armée ! protestai-je.
-
C’est vrai.
-
Et puis je
préfère prendre une fessée plutôt que d’être obligée de faire mes besoins dans
un sceau pendant deux semaines.
-
T’as raison,
admit Mathieu. Mais tu sais pourquoi je continue d’aller à la caserne ?
-
Parce que tu n’as
pas le choix ?
-
Si, j’ai le
choix ! Je pourrais aller à la fac !
Nous
éclatâmes de rire en chœur. Mathieu a toujours détesté l’école.
-
Il est 17h32, ma
puce, me dit mon petit ami. N’aggrave pas ton cas.
-
Ok, j’y vais. Je
t’aime.
-
Je t’aime.
Après
un dernier baiser, je sortis de la voiture, fermai la portière et entrai chez
moi.
-
C’est moi !
annonçai-je avant de refermer la porte d’entrée derrière moi.
-
Nous sommes dans
la salle à manger, ma chérie ! me répondit mon père.
J’enlevai
mes chaussures, mis mes chaussons, accrochai mon manteau au porte-manteau et rejoignis
ma famille dans la pièce à vivre. Je me lavai les mains dans la cuisine ouverte
et les embrassai tour à tour, puis saluai un vieil homme dégarni en
costume-cravate, qui portait aux pieds des chaussons de prêt à fourrure bleue.
-
Assieds-toi ma
chérie, nous t’attendions pour commencer, me dit ma mère. Ton week-end s’est
bien passé ?
-
Oui, très bien,
répondis-je.
-
Parfait, tu nous
raconteras ça pendant le dîner, poursuivit Scarlett.
-
Daryl n’est pas
là ? interrogeai-je, surprise.
-
Sa tante de Lyon
est malade, il est parti s’en occuper quelques jours, me répondit ma mère. Je
te présente monsieur Duchemin, il fait partie des personnes qui attribuent les
familles d’accueil aux étudiants du département.
-
Bonjour, dis-je
en lui serrant la main depuis ma place.
-
Bonjour Marie,
répondit-il. C’est un honneur de te connaître. Tom et Dana n’ont dit que du
bien de toi, ainsi que Michael et Scarlett.
-
Pourquoi ?
interrogeai-je. Y’a un questionnaire de satisfaction d’enfants ?
-
Nous effectuons
un suivi des familles d’accueil afin de savoir si elles se plaisent dans leur
rôle, si elles ont des questions, si elles ont besoin de parler…
-
Ah d’accord,
dis-je. Et, c’est bon ? Mes parents vont bien ?
-
Tes parents vont
très bien, ma grande, me répondit monsieur Duchemin avec un sourire plutôt laid. Ils sont parfaitement
heureux dans leur rôle de parents.
Je
souris poliment.
-
Bien, dit
Michael, nous voulions que vous reveniez une heure plus tôt pour vous parler
d’Anaïs, les filles. Vous la connaissez bien, vous avez vécu avec elle de
nombreuses semaines… Comment vous la trouvez, en ce moment ?
-
On la trouve
facilement, répondis-je pour blaguer. A la fac, tous les matins.
-
Marie ! me
reprit Scarlett pendant que mon père se retenait de rire. Tu as très bien
compris la question ! Ce n’est pas le moment de rire !
-
Elle fait bêtise
sur bêtise en espérant que ses parents la remarquent, expliqua Louise. Mais ils ne
font rien. Ils ne la cadrent pas, ils s’en contrefichent d’elle. Ce n’est pas
une bonne famille pour elle ! Elle a de très mauvaises notes et elle sèche
beaucoup les cours. Elle et sa sœur n’ont absolument aucun cadre et elle va
sûrement rater ses études.
La
réplique de Louise jeta un froid. Je le brisai en demandant au monsieur
dégarni :
-
Qui s’occupe de
sélectionner les familles d’accueil ?
-
Ce sont mes
collègues du bureau d’à côté.
-
Eh bien, ils ont
merdé ! dis-je.
-
Marie !
gronda Michael. Pas de gros mots !
-
Ben c’est vrai,
quoi !
-
Tu peux le dire
autrement ! continua mon père.
-
Il est vrai qu’il
y a eu un dysfonctionnement dans la sélection des parents d’Anaïs, admit
Duchemin.
-
Est-ce que vous
verriez un inconvénient à ce qu’on prenne définitivement Anaïs à la
maison ? demanda Scarlett en ayant l’air de marcher sur des œufs. Si vous
n’êtes pas d’accord, nous ne la prendrons que temporairement, jusqu’à ce qu’on
lui trouve une nouvelle famille.
-
Vous nous avez
promis qu’on resterait tous les quatre, dis-je avant que Berlioz saute sur mes
genoux et se mette à ronronner.
-
Oui, c’est vrai,
répondit Scarlett. Et cela nous coûterait en termes de temps et d’organisation
de prendre un nouvel enfant. Cependant, nous sommes prêts à le faire
puisqu’Anaïs était votre sœur chez Tom et Dana. Vous avez l’habitude de
fonctionner ensemble. De plus, nous ne voulons pas la laisser à la dérive.
-
Si vous me
promettez que vous n’allez recueillir qu’elle et que vous ne récupèrerez pas
tous les étudiants errants de la ville…
-
Nous allons faire
plus que te le promettre, ma princesse, dit Michael. Nous allons te le jurer sur tout ce
que tu veux. Anaïs sera la dernière. Nous acceptons de la prendre pour elle et
pour vous, mais ensuite nous verrouillerons de nouveau notre famille pour ne plus
accueillir personne. C’est aussi pour cela que monsieur Duchemin est là :
il a le contrat de verrouillage dans sa sacoche. Votre mère et moi sommes prêts
à le signer dès maintenant.
Louise
et moi nous regardâmes. Je lui dis :
-
C’est pas top les
chiffres impairs. Y’en a toujours un qui est délaissé. Et toi et moi sommes
déjà fusionnelles, j’ai peur qu’Anaïs…
-
On peut
s’éclipser quelques instants ? demanda Louise.
La
permission des adultes obtenue, Louise et moi nous isolâmes dans le sellier.
Après dix bonnes minutes de discussion, nous réapparûmes à table. Louise prit
la parole :
-
Pour le bien
d’Anaïs, nous acceptons qu’elle intègre notre famille. Néanmoins, nous avons
des conditions.
-
Nous vous
écoutons, dit Michael.
-
Premièrement,
Anaïs prendra ma chambre, dit Louise. Marie et moi partagerons sa chambre car
nous voulons dormir dans la même pièce. La chambre de Marie est bien plus
grande que la mienne.
-
Accordé, dit
Scarlett après avoir échangé un regard profond avec Michael. Mais ne vous
plaignez pas d’avoir été punies après avoir discuté jusqu’à pas d’heure !
-
Nous respecterons
les règles, dit Louise – j’en étais beaucoup moins sûre qu’elle. Deuxièmement, on
garde nos après-midis juste avec vous. Nous sommes d’accords pour les partager
avec Anaïs et faire une semaine sur trois.
-
Accordé, continua
Michael après un nouvel échange de regard avec sa femme.
-
Dernièrement, on
ne veut pas que cela change quoique ce soit à l’amour que vous nous portez,
termina Louise.
-
Mais ça ne va pas
la tête ? s’étonna Scarlett. Notre cœur va s’agrandir mais vous garderez
toujours la même place, voyons !
-
Alors c’est
d’accord, dîmes Louise et moi en chœur.
Monsieur
Duchemin sortit un paquet de quatre feuilles de sa sacoche et le posa sur la
table devant lui. Puis, il déclara tout en écrivant :
-
Je note donc que
vous êtes désormais les tuteurs légaux de Marie Webber, née le 30/12/00, de
Louise Webber, née le 17/01/00 et d’Anaïs Webber, née le 11/10/01. Je coche la
case dans laquelle il est stipulé que votre famille n’acceptera plus d’enfant
et ce, jusqu’au départ de vos trois filles du domicile familial. Ce contrat
pourra être modifié à votre demande. Veuillez parapher chaque feuille puis
signer ici, et ici.
Mes
parents s’exécutèrent, puis monsieur Duchemin leur serra la main et leur
présenta ses félicitations.
-
Bien, je n’ai
donc plus rien à faire ici. Bonne soirée à vous.
Duchemin
sortit de la maison et nous nous retrouvâmes tous les quatre. Je demandai à
alors à mes parents :
-
Les parents
actuels d’Anaïs sont d’accords avec l’idée de la perdre ?
-
Malheureusement,
dit Scarlett après avoir soupiré, monsieur Duchemin a découvert qu’ils étaient
famille d’accueil uniquement pour les revenus que cela engendrait. Ils ont donc
été radiés.
-
Mais où va aller
Pauline – la sœur d’Anaïs ? demanda Louise.
-
Elle rejoint la
famille Brignou, répondit mon père.
-
Ils acceptent de
prendre un cinquième enfant ?! m’étonnai-je. Elle va devoir vouvouyer ses
parents ! Et elle va pouvoir assister à une fête tous les mercredis !
-
Ah ! dit ma
mère. Elle n’aura donc pas besoin de sortir en douce, elle ! Elle sera déjà sur
place !
Louise
et moi baissâmes les yeux au sol.
-
Aller, montons déménager
et aménager vos chambres. On va remonter l’ancien lit de Victoire pour Anaïs.
Nous nous y mîmes à quatre – bien que je n’étais pas
d’une très grande aide avec mon plâtre – et trois quarts d’heure plus
tard, lorsqu’Anaïs sonna à la porte, Louise avait aménagé quatre-vingts
pourcents de ses affaires dans ma chambre.
Alors
que Scarlett se précipitait au rez-de-chaussée pour aller ouvrir à sa nouvelle
fille, j’en profitai pour demander à Michael s’ils n’étaient pas trop en colère
pour les bulletins.
-
Nous en parlerons
après le repas, m’avait-il répondu.
Une
boule se forma dans mon ventre.
-
Et donc là, c’est
le sellier, dit Scarlett en terminant de faire visiter la maison à Anaïs. Les
règles de la maison sont inscrites derrière la porte, si tu veux y jeter un
coup d’œil.
Notre
ancienne-nouvelle sœur avait légèrement blêmi en sortant du sellier après
lecture de ces nouvelles règles. Elle osa tout de même demander :
-
Il n’y a pas de
planning pour les tâches ménagères ? Il y en avait un dans mon ancienne
famille même si on ne le respectait jamais.
-
Nous vous
demandons de temps en temps de nous aider à mettre ou débarrasser la table,
répondit Scarlett. Et nous exigeons que vous mettiez votre linge sale dans le
panier prévu à cet effet. Sinon, nous préférons que vous vous concentriez
uniquement sur vos études.
-
D’accord,
répondit Anaïs.
-
Es-tu au courant
de ton transfert définitif chez nous ? demanda Michael.
-
Oui, répondit
Anaïs. Y’a un monsieur qui m’a appelé quand j’étais dans la voiture avec mon
père biologique pour venir ici.
-
Bien, tu
t’installes donc ici définitivement, reprit mon père. Tu sais déjà très bien
que les choses vont changer par rapport à ton ancienne famille. Tu vas sûrement
avoir beaucoup de mal à t’y habituer mais nous serons là si tu as besoin de
réconfort. En revanche, tu sais déjà aussi que tu vas passer une soirée très
désagréable puisque nous t’avons prévenue vendredi. Tes récents agissements
sont loin d’être tolérables. Cela, combiné à ton bulletin catastrophique, nous
avons largement de quoi nous mettre en colère.
Anaïs
baissa la tête. Elle qui était si contente de nous retrouver et qui nous avait
sauté au cou à son arrivée, commençait sûrement à regretter d’être là. Ou du
moins, à regretter de s’être tant défoulée niveau bêtises ces deux dernières
semaines.
-
Nous en parlerons
après le dîner, dit Scarlett. Pour l’instant, apprenons à faire connaissance
autour d’un petit apéritif ! Nous avons appelé Tom et Dana pour qu’ils
nous parlent un peu de toi mais c’est tellement mieux de s’informer directement
à la source !
Maman
sourit à Anaïs, qui le lui rendit.
Alors
que mes parents s’éloignaient dans la cuisine pour préparer l’apéro, Anaïs nous
chuchota à Louise et moi :
-
Vous avez vu
comme je suis grosse ? Scarlett est une brindille, à côté de moi !
Elle ne pourra jamais me maîtriser pour m’en coller une !
Il
est vrai qu’Anaïs est beaucoup plus ronde que moi.
-
Détrompe-toi, lui
dis-je néanmoins. Elle maîtriserait n’importe qui, toi la première. Tu risques
d’être surprise ! Et lorsque tu es sur ses genoux, ou sur ceux de mon
père, tu ne peux plus du tout en bouger s’ils ne l’ont pas décidé. Crois-moi
Anou, fais le maximum pour te tenir à carreaux. Déjà ce soir quand tu te
coucheras, tu ne pourras pas tenir allongée sur le dos…
-
Oui, tu m’en
avais déjà parlé…
-
Cependant, ici tu
seras aimée comme jamais, dit Louise. Michael et Scarlett nous aiment
énormément.
-
On s’installe au
salon ? demanda Michael, tenant un bol de gâteaux apéro dans chaque main.
Michael et Scarlett posèrent beaucoup de questions à
Anaïs pour apprendre à la connaître : ses goûts, ses passions, ses envies,
ses rêves… Moi, j’étais plutôt contente qu’Anaïs entre dans la famille. Je
n’aurais plus le rôle de l’enfant dissipée, opposée à Louise-l’enfant-sage.
Anaïs est aussi désobéissante que moi, ce qui me fera un peu de soutien. Je
pensai néanmoins que ses nouveaux parents l’avaient déjà bien cernée et qu’elle
n’aurait pas beaucoup de marge de manœuvre.
En aidant à mettre la table, je me
cognai contre le bar dans un moment d’inattention. Heureusement,. Mon plâtre
accusa la plupart du choc, ce qui ne fit résonner que partiellement ma douleur
au poignet. Cela suffit néanmoins à me faire pousser un juron de douleur et à
lâcher les cinq assiettes qui s’éclatèrent au sol. Mes parents, affolés,
accoururent immédiatement vers moi en me
demandant si ça allait. Je tentai de les rassurer au maximum : j’en avais
tellement assez d’avoir un plâtre que je rêvais de l’enlever le plus rapidement
possible. Je ne voulais pas que mes parents racontent au médecin que j’avais
toujours des douleurs aiguës, même si dans ce cas précis, la douleur était
légitime puisque je m’étais cognée.
-
Anaïs, tu peux ramasser
les assiettes cassées, s’il te plaît ? demanda Michael pendant qu’il
examinait mon plâtre à la recherche d’une fissure ou d’un défaut qui aurait pu
le fragiliser.
-
Non, répondit
Ana. Ce n’est pas moi qui les ai fait tomber, je ne vois pas pourquoi je
devrais les ramasser !
Michael
se figea et se tourna vers elle. Il lui expliqua ensuite fermement :
-
Dans cette
famille, on se fiche de qui a fait quoi. On s’aide les uns les autres. Tu fais
désormais partie de cette famille et je te demande de rendre service à ta sœur
en ramassant les assiettes cassées.
Anaïs
soupira d’agacement puis demanda où était le balai.
-
Dans le sellier,
répondit Scarlett. Et la prochaine fois que tu soupires de la sorte, ma main
atterrira très violemment sur ton derrière !
-
Mais c’est bon,
là ! répondit ma sœur en jetant sa main en l’air. J’ai rien fait !
Papa
n’attendit pas deux secondes pour réagir : à peine Louise et moi eûmes
échangé un regard compatissant pour Anaïs, Michael attrapa cette dernière par
le bras et lui décolla trois claques déséquilibrantes dont lui seul a le
secret.
-
Ne t’avise plus
de nous répondre sur ce ton, Anaïs ! Tu vas déjà passer une bien sale
soirée, n’aggrave pas ton cas ! Va chercher le balai, maintenant, et fais
ce que je t’ai demandé !
Anaïs
fondit en larmes. Je pense qu’elle ne s’attendait pas à des claques de ce
calibre. Je me revis trois semaines en arrière, à mon arrivée dans cette
famille : moi aussi, j’avais été étonnée et terrifiée par l’ampleur des
claques données par mes parents.
Elle
partit en direction du sellier en se frottant le derrière, tandis que notre
père continuait de la gronder :
-
Ce n’est pas
parce que tout t’était permis dans ton ancienne famille que ça va être la même
chose ici ! Tu vas apprendre à filer droit ! Je te le
garantis ! S’il y a bien quelque chose que je ne supporte pas, ce sont les
enfants qui répondent ! Pour qui tu te prends, hein ?! Je vais te
remettre d’équerre, moi, tu vas voir ! Tu en as grandement besoin !
Connaissant
Anaïs presque par cœur, je savais qu’elle mourrait d’envie de répondre à son
nouveau père et de l’envoyer se faire cuire un œuf ; heureusement, ce
qu’elle venait de prendre la dissuada.
Durant le repas, Anaïs boudait, ce
qui avait le don d’entretenir la colère de papa. Maman essayait de discuter
avec Louise et moi comme si de rien était pour détendre l’atmosphère.
Seulement, lorsqu’elle posa le gratin de chou-fleur sur la table et que
j’exprimai le fait que je détestais le chou, mon père répondit :
-
Tu vas quand même
en manger !
-
Mais je n’aime
pas ça, dis-je avec une petite voix.
-
Tu ne sortiras
pas de table tant que tu n’auras pas goûté ! C’est clair ?!
-
Mais…
-
Y’a pas de
« mais », Marie ! Le débat est clos !
-
Merci beaucoup
d’avoir mis papa en colère ! lançai-je à Anaïs. Maintenant, il est
relou !
-
Qu’est-ce que tu
viens de dire ?! me gronda l’informaticien en se levant d’un coup.
-
Mike,
assieds-toi, tempéra ma mère. Je sais qu’Anaïs t’a mis en rogne mais Louise et
Marie n’y sont pour rien.
Mon
père se rassit, la colère campant néanmoins toujours sur son visage. Scarlett
reprit :
-
Il est vrai que Marie n’aime pas le
chou-fleur, je l’avais oublié. Marie chérie, je te demande juste de goûter un
petit bout pour faire honneur au plat que j’ai cuisiné. C’est tout ce que je te
demande.
-
Mais maman, je
n’aime vraiment pas ça !
-
Je sais, ma
chérie. Mais c’est de la simple politesse. Lorsque tu es invitée à manger chez
d’autres personnes, il faut faire honneur au plat, que tu aimes ou non, par
respect pour la personne qui a mis du temps et du cœur à cuisiner.
-
Mais là, on est à
la maison ! protestai-je.
-
Excellente
analyse de la situation, ironisa Michael. Mais tu dois quand même le respect à
ta mère. Elle a mis du temps et du cœur à préparer ce plat, donc tu goûtes.
-
Mais je n’aime
pas ! insistai-je. Je ne vais pas me forcer !
-
Marie, comme ton
père te l’a dit, tu ne sortiras pas de table avant d’avoir goûté au plat. La
politesse, ça s’apprend à la maison.
-
Mais c’est
injuste ! persévérai-je.
- Marie, stop ! dit Scarlett en haussant le ton. Tu arrêtes immédiatement ton caprice !
Le repas terminé, la table débarrassée, Michael et
Scarlett nous demandèrent d’aller nous asseoir toutes les trois dans le canapé.
La tension monta d’un cran. J’avais une énorme boule dans le ventre et
j’imaginais très bien mes sœurs dans le même état.
Michael
et Scarlett étaient assis dans les deux fauteuils qui nous faisaient face. Il y
eut un court silence, puis maman s’avança au bord de son fauteuil, désigna ses
genoux et ordonna à Anaïs : « Viens ici ! ».
-
Euh, quoi ?
bégaya ma sœur.
-
Viens ici, j’ai
dit ! répéta notre mère.
-
Mais… Je ne vais
pas me faire punir devant Louise et Marie, quand même ! protesta-t-elle.
-
Bien sûr que
si ! dit Scarlett. C’est à elles que tu as causé du tort, non ? C’est
à elles que tu as joué un mauvais tour en falsifiant leurs résultats scolaires
sans qu’elles soient au courant, n’est-ce pas ? Donc elles vont
légitimement assister à la fessée déculottée que je vais te donner dans
quelques secondes. Viens ici, maintenant ! Je ne le répèterai pas sans
conséquences, Anaïs ! Tu es prévenue !
-
M…mais…euh… On
peut… on peut en parler, non ? s’informa mon ex-nouvelle sœur en se
liquéfiant complètement. Je…je m’excuse, d’accord ? Je…
Scarlett
se leva d’un coup, fonça sur Anaïs, posa sa main sur son épaule et la bascula
sur le côté, si bien qu’Anaïs tomba sur moi. Je ressentis donc malgré moi les
cinq secousses correspondant aux claques reçues par les fesses de mon
ex-nouvelle sœur. Maman retourna s’asseoir dans son fauteuil et réitéra :
-
Viens ici. Plus
tu attendras, plus tu aggraveras ton cas. C’est vraiment la dernière chose à
faire, Anaïs !
Anou
pleurait déjà. Elle se leva et avança vers notre mère en la suppliant du regard,
espérant que cela change quelque chose à son sort. Mais non. Ma mère attrapa le
poignet d’Anaïs dès qu’elle le put et la tira d’un coup énergique pour la
basculer sur ses genoux et finir le travail plus vite que ma sœur ne l’aurait
fait.
Anaïs
était en jupe. Une jupe en velours avec un collant de laine en dessous.
Grossière erreur. Moi-même je ne mettais plus que des jeans depuis que
j’habitais chez les Webber ; lorsque je mets des jupes ou des robes, c’est
parce que je suis absolument certaine de ne rien avoir à me reprocher !
Maman
n’eut aucune pitié pour sa nouvelle fille et la déculotta immédiatement.
Lorsqu’Anaïs protesta à s’en casser la voix, Scarlett lui répondit :
-
Si tu étais venue
t’allonger sur mes genoux tout de suite, ça se serait passé autrement. Mais puisque tu
as mis du temps à m’obéir, tant pis pour toi.
Et
elle lui donna la fessée. Une longue et cuisante fessée qu’Anaïs accusait en
hurlant tout ce qu’elle pouvait. Il y avait tellement longtemps qu’elle n’en
avait plus reçu, et celles de Tom et Dana n’étaient pas aussi costaudes ;
Anaïs les redoutaient déjà. Autant dire qu’avec Michael et Scarlett, elle
tremblerait à la moindre incartade !
-
Pitié !
hurlait-elle. Pitié ! J’t’en supplie, maman ! J’t’en suppliiiiiiie !
Scarlett
se stoppa. Anaïs entreprit de se dégager mais maman la retint fermement en
faisant un bruit de négation avec sa bouche :
-
Tu n’es pas près
de bouger ! Je me suis juste arrêtée car nous allons discuter un peu. Tu
vas me raconter dans les moindres détails comment tu t’y es prise pour monter
un business d’une telle ampleur à l’intérieur de ta promo ! Tu n’as pas
intérêt à oublier quoique ce soit sinon tes fesses vont très vite le
payer ! C’est compris ?!
-
Oui !
Elle
prit une claque sur chaque fesse.
-
Oui, qui ?!
gronda l’esthéticienne.
-
Oui, maman !
sanglota Anaïs.
Anaïs passa trois bons quarts d’heure sur les genoux
de notre mère, dont deux à recevoir de très bonnes claques.
A chaque fois que ma mère s’arrêtait pour interroger sa nouvelle fille, elle
recommençait à la fesser durement en entendant la réponse.
Anaïs
avait donc séduit le nouveau technicien informatique (alors qu’elle ne l’aime
même pas !) et l’avait manipulé pour pouvoir obtenir tout ce qu’elle
voulait de lui, gratuitement. Mis à part pour Louise et moi – trop
aimable ! – elle facturait trente euros à chaque élève qui lui demandait
une modification ; finalement, elle avait réussi à empocher près de deux
mille euros.
-
Ces deux mille
euros, tu vas les payer ma fille ! dit Michael en relevant le menton d’Anaïs
pour la forcer à le regarder alors qu’elle était toujours en travers des genoux
de sa femme. Et tu vas les payer avec les intérêts ! Tu vas prendre une
claque par euro récolté sur le dos des autres ! Et j’en ajoute cent pour
avoir le compte rond ! Tu prendras cent cinquante claques tous les matins
pendant quatorze jours ! Je te les donnerai personnellement et je peux te
dire que tu t’en rappelleras ! Plus jamais tu t’arnaqueras les
autres !
Anaïs
doubla ses pleurs, bien que je fusse persuadée que c’était impossible. Elle
réussit néanmoins à bégayer :
-
Vous…al…lez…me…tuer…
-
Non, nous allons
t’éduquer ma grande ! répliqua Scarlett. Nous avons déjà commencé, et nous
ne pouvons pas te promettre que ce ne sera pas aussi douloureux à chaque fois !
-
Mais si tu te
tiens à carreaux, enchaîna Michael, je m’en tiendrai uniquement à ta punition
de quatorze jours ! Sinon, tu vas devoir apprendre à rester debout et à
dormir sur le ventre !
Scarlett
remit une série de claques à Anaïs avant de la lâcher.
-
Va au coin !
lui ordonna-t-elle. Nous te laissons un peu de répit avant d’étudier ton
bulletin !
-
Oh non… sanglota
Anaïs.
-
Oh si !
répliqua papa en lui tendant du sopalin.
Anaïs
pleurait à en avoir des spasmes, et elle avait tellement de larmes et de morve
sur le visage que ça lui donnait l’allure d’un crapaud rouge humide et
visqueux.
Alors qu’Anaïs était au coin, Louise
et moi sentîmes l’attention se tourner vers nous, ce qui ne sentait pas bon du
tout. Michael attrapa son MacBook et alluma la télé sans mot dire. L’écran de
la télé afficha le site intranet de notre fac. Papa cliqua sur « Espace
parents », puis se connecta à l’aide de ses identifiants préenregistrés.
Il cliqua ensuite sur le profil de « Louise Webber » et alla dans la
rubrique « Relevés de notes ». Enfin, il sélectionna « novembre 2019 »
et le bulletin de ma sœur s’afficha :
Bulletin – mois d’octobre
& novembre 2019
WEBBER Louise
(née VASSEUR) – née le 17 janvier 2000
Licence
Lettres-Humanités 1ère année
-
Qu’en penses-tu,
Louise ? demanda froidement Michael après que nous ayons tous – sauf Anaïs
– étudié l’écran.
-
Je ne sais pas,
répondit-elle.
-
Hormis les trois matières
qui sont entrées dans le programme début octobre, il y a sept matières,
continua papa. En orange, ce sont celles où tes résultats ont baissé. En vert,
ce sont celles où tes résultats se sont stabilisés ou ont augmenté. Pour ce qui
est de ta moyenne générale, la première est calculée sans les trois nouvelles
matières, la deuxième est calculée avec les trois nouvelles matières. Donc ?
Qu’en penses-tu ?
-
Je…je pense que
je n’ai pas bien travaillé, murmura Louise d’une voix quasi-inaudible.
-
Pardon ?! demanda papa en haussant le ton. Je ne t’ai pas entendue !
-
Je pense que je
n’ai pas bien travaillé, répéta ma sœur un peu plus fort.
Ses
yeux se remplirent de larmes, ce qui me fit énormément de peine.
-
Tu n’as pas assez
travaillé, Louise, la reprit Michael. Qu’est-ce qui a changé depuis le
dernier bulletin ? A ton avis, pourquoi tes résultats ont-ils
baissés ?!
-
Je…je ne sais pas,
dit-elle tandis qu’une larme coula sur sa joue.
-
Tu n’as pas été
plus dissipée qu’avant, par hasard ? demanda Scarlett. Tom et Dana nous
ont dit que vous travailliez beaucoup chez eux. Vu tes excellents résultats,
nous avons voulu te laisser libre de t’organiser, ce qui a été une
erreur ; nous avons donc une part de responsabilité là-dedans.
-
Elle n’est pas
descendue à treize de moyenne, non plus ! intervins-je.
-
Non Marie, me dit
ma mère, mais ta sœur a perdu un point sur sa moyenne générale par rapport au
mois dernier, et elle n’a même pas eu les encouragements, alors qu’elle a eu
les félicitations en septembre ! Ce que je vois, c’est qu’elle s’est
beaucoup trop relâchée !
Louise
pleurait, à présent. Je pris sa main dans la mienne pour lui envoyer tout le
réconfort dont j’étais capable.
-
Louise,
regarde-moi, lui dit ma mère avant que ma sœur obéisse. Puisque nous sommes en
partie fautifs, tu ne seras pas punie pour ces résultats en baisse. En
revanche, nous avons réfléchi ce week-end, et votre père et moi avons décidé
d’instaurer des créneaux pour les devoirs. Tous les soirs, de 17h15 à
19h, et le jeudi de 10h à 12h, et de 14h à 17h sauf lorsque c’est votre
après-midi avec nous.
-
Mais…les
activités extrascolaires débutent au retour des vacances de Noël !
protestai-je. On voulait s’inscrire à plein de choses…
-
Cela dépendra du
prochain bulletin, Marie ! trancha ma mère. Pour le moment, vu vos
résultats à toutes les trois, c’est hors de question.
-
Mais…
-
Tu te tais !
gronda Scarlett. Ce n’est pas toi qui décides, Marie ! J’ai dit que cela
dépendrait du prochain bulletin donc cela dépendra du prochain bulletin !
Point, final !
Je
me mis à bouder bien que je ne sois pas en position de le faire. M’ignorant,
l’esthéticienne se tourna à nouveau vers Louise et lui dit :
-
Si tes notes
continuent de baisser ainsi, gare à tes fesses ! Tu entends ?!
-
Oui, maman,
répondit-elle avec une voix claire maintenant que ses larmes ne coulaient plus.
-
Et tu as
également intérêt à nous ramener de bien meilleures notes en histoire !
Nous laissons passer cette moyenne médiocre uniquement parce que ton
comportement est irréprochable !
-
D’accord maman.
-
Tu peux y aller,
dit mon père. Va te laver et préparer tes affaires pour demain.
Louise
ne se le fit pas dire deux fois et lâcha ma main pour partir en direction de sa
chambre. Anaïs était toujours au coin et je me retrouvai seule, assise sur le
canapé, face à mes parents.
-
Anaïs !
appela Michael. Viens t’asseoir sur le canapé. Inutile de te rhabiller.
Oh.
Ils me réservaient pour la fin. Je savais que ce n’était pas du tout bon signe.
Bulletin – mois d’octobre & novembre 2019
LETELLIER Anaïs (née POLTROV) – née le 11 octobre 2001
Licence Lettres-Humanités 1ère année
-
Mais… J’étais
encore chez les Letellier quand y’a eu tout ça ! se défendit Anaïs qui
recommençait à sangloter. La preuve, ils n’ont pas encore fait le changement de
nom de famille !
-
Certes mais tu es
chez nous, maintenant, jeune fille ! gronda Michael. Ils ont quand même eu
le temps de faire les démarches pour que nous accédions à ton dossier ! Et
il n’est clairement pas brillant ! Une fois rectifiées toutes les petites
magouilles que tu as demandées à ton « petit copain », tu te
retrouves avec une moyenne totalement insuffisante et un avertissement
travail !
-
Je vais tout vous
expliquer…
-
Ah, parce que tu
crois qu’après lecture de ce bulletin, nous avons envie d’entendre une
quelconque explication ?!
Papa
se leva, fonça sur Anaïs, lui attrapa le poignet et la sortit du canapé en
tirant dessus. Ayant bien compris ce qui allait lui arriver, ma nouvelle sœur
supplia papa avant même de se retrouver debout, et mit automatiquement sa main
libre sur son derrière pour se protéger. Evidemment, notre bodybuildé de père
dégagea facilement la main protectrice d’Anaïs et asséna à sa fille cinq
claques qui résonnèrent dans toute la maison. Anaïs se tortillait, tant de
douleur que pour tenter d’échapper à de nouvelles claques.
-
Tu crois vraiment
que nous avons besoin d’une explication, Anaïs ?! gronda papa avant de
lui mettre cinq autres claques. Qu’est-ce que c’est que ces résultats ?! –
cinq nouvelles claques – et ces appréciations ?! Certains profs disent que
tu es dissipée, – une claque – que tu fais le pitre, - une autre claque – que
tu es désobéissante et perturbatrice ! – cinq nouvelles claques. Tu vas
vraiment filer droit, ma fille ! – une nouvelle claque – Et tu vas le
faire dès maintenant ! C’est compris ?!
-
Ou…i, pap…a…
pleura ma sœur.
Elle
n’en pouvait plus et je la comprenais bien. Elle avait les fesses cramoisies,
les cuisses écarlates qui portaient par endroit la marque de la main de notre
père, et je croyais même voir apparaître un minuscule bleu en haut de sa fesse
gauche. Elle reprit cinq ultimes claques après lesquelles mon père lui fit
promettre à haute voix d’être sage à l’école et à la maison, et de se remettre
à travailler à l’école. Puis, il la libéra, pour le plus grand soulagement de
ma sœur.
Une qui n’était pas encore soulagée,
c’était bien moi. J’étais désormais seule avec mes parents au rez-de-chaussée.
Même les chats étaient à l’étage. C’étaient mes parents contre moi.
Bizarrement, je savais d’avance qui allait perdre.
Papa
fit deux-trois clics avec sa souris et mon bulletin se retrouva affiché sur
l’écran.
Bulletin – mois d’octobre & novembre 2019
WEBBER Marie (née LEBERTIER) – née le 30 décembre 2000
Licence Lettres-Humanités 1ère année
-
Qu’en penses-tu,
Marie ? me demanda mon père.
-
Ce n’est pas trop
mal, répondis-je les yeux rivés au sol. Ça aurait pu être pire.
-
Tu te fiches de
nous, là ?! s’emporta ma mère. Non seulement tes résultats ont beaucoup
baissé mais en plus, tu as maintenu ton avertissement comportement ! Cela
veut dire que tu ne te tiens toujours pas correctement en cours !
-
Mais…
-
Tu te tais !
me cria mon père. Tu sais ce que nous a dit ton directeur de licence lors du
rendez-vous de vendredi, Marie ?! Il nous a dit que si tu cumulais trois
avertissements comportement d’affilés, tu passerais automatiquement en conseil
de discipline ! Est-ce que tu comprends ça ?!
-
Oui papa,
répondis-je.
Ça
sentait vraiment le roussi pour mon derrière. Il allait falloir que je joue la
carte émotion pour espérer m’en sortir indemne…
-
Je suis vraiment
désolée, papa, maman… dis-je en sortant mon arme spéciale « larmes de
crocodile ». Vous faîtes tout pour moi et moi, j’vous déçois sans arrêt…
Scarlett
s’approcha de moi, attrapa mon visage plongea ses yeux bleus dans mes yeux
noirs. Après quelques secondes de silence, elle dit :
-
C’est bien ce que
je pensais ! Tu joues la comédie pour éviter de prendre une fessée !
Nous commençons à te connaître, Marie ! Pas de bol, ça n’a clairement pas
fonctionné ! Et pour la peine, c’est une déculottée debout que tu vas
prendre !
Je
me mis à prier mes parents avec la même force qu’Anaïs quelques minutes
auparavant mais rien n’y fit : mon père me déculotta en plein milieu du
salon, me pencha sous son bras et m’administra une fessée aussi cuisante que
longue. Lorsqu’il s’arrêta, je croyais que mon calvaire était terminé ;
mais papa se contenta de me sermonner :
-
Tu as plutôt
intérêt à être sage à l’école et à nous ramener de bonnes notes, Marie ! Si
nous apprenons qu’un seul de tes professeurs s’est plaint de toi, je te promets
que tu vas t’en souvenir ! Pareil pour les notes en-dessous de seize !
Tu le sais déjà, d’ailleurs ! Ces dernières semaines, tu n’as pas reçu ce
que tu devais prendre grâce au trafic d’Anaïs mais pour les prochaines notes,
nous ne te louperons pas ! C’est compris ?!
-
Oui…pa…p…a…
-
Les
avertissements comportement, c’est terminé, Marie ! gronda-t-il avant de
reprendre la fessée.
Il reprit la claquée. Je
gigotais tellement que parfois, mes pieds ne touchaient même plus le sol à
force de battre des jambes.
Quand,
de très longues minutes plus tard, mon calvaire prit fin, ma mère me
menaça :
-
Si tu continues
de ne pas être sage en cours, c’est la brosse à cheveux qui viendra frapper tes
fesses, en plus de nos mains !
Incapable
de parler, je fis un petit hochement de tête pour montrer que j’avais bien
compris le message.
-
Nous ne
plaisantons pas, Marie ! continua mon père. Chaque fois que tu rentreras
avec un mauvais comportement ou une mauvaise note, attends-toi à une très bonne
fessée ! Je te garantis que tu le regretteras !
Mes
parents y étaient allés très fort pour ce soir et je pouvais dire sans
exagération que j’étais calmée. Je n’avais plus du tout envie de mal me
comporter ou de négliger mon travail scolaire.
Lorsqu’ils m’envoyèrent à mon tour me coucher, je n’en
menais pas large du tout. Mes sœurs et moi restâmes silencieuses, mis à part
pour dire bonne nuit à nos parents et entre nous.
Je m’endormis rapidement…sur le ventre.
A suivre…
Quel chapitre ! C'est incroyable, on en apprend tellement...
RépondreSupprimerHâte de suivre les aventures
Quand-même quelques bêtises et bonnes fessées à l'horizon j'espère !
RépondreSupprimerJ'imagine que Marie va avoir du mal à laisser Anaïs prendre sa place ! Peut-être quelques conflits et quelques punitions ?
RépondreSupprimerÇa promet pour la rencontre parents/profs .!
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