- Papa, maman, nous
partons ! annonça Scarlett.
- Où ça ? interrogea
Jack, étonné.
- Vous savez, à notre
réunion entre familles d’accueil ! répondit Scarlett. Je vous en ai parlé
tout à l’heure… D’habitude, ça a lieu le week-end mais cette semaine il y a exceptionnellement
une réunion ce soir.
- Mais… et les filles ?
paniqua Anna-Beth. On ne sait pas s’occuper d’elles, nous !
- Evidemment, puisqu’ils
n’ont même pas élevé leurs propres filles, pensa Michael.
- Assa est là, rassura
Scarlett. Et elles sont couchées de toute façon. Vous n’aurez rien à faire. A
tout à l’heure !
Michael et Scarlett sortirent de la maison à la
hâte et montèrent dans la voiture.
- Mes parents sont
arrivés depuis quelques heures et je ne les supporte déjà plus ! avoua
Scarlett à son mari.
- Pour ma part, je ne les
ai jamais supportés, enchaîna Michael.
- Bon, allons-y. Cette
réunion va nous faire prendre une bouffée d’air !
Ils se rendirent à la
MDFA (Maison Départementale des Familles d’Accueil) où ils n’eurent aucun mal à
se garer. En descendant de voiture, ils aperçurent plusieurs parents d’accueil
avec lesquels ils avaient fait connaissance : les Lagarde, les Nilon, les Benlaoui,
sans oublier les Dubois, auxquels ils demandèrent des nouvelles de la santé du
mari.
- Je vais bien, répondit-il.
Je vais beaucoup mieux, même ! Je suis assez en forme pour botter le
derrière de mes filles !
Plusieurs parents rirent, Michael et Scarlett
inclus.
Ils entrèrent dans l’immense salle de réunion
et y virent les choses habituelles : un vidéo projecteur dirigé vers un grand
mur blanc immaculé, un barman qui préparait des cocktails, plusieurs tables
recouvertes de nappes blanches et remplies de mini-fours tous plus appétissants
les uns que les autres, et une centaine de chaises rangées en lignes, tournée
vers le mur projeté.
- Tom ? Dana ?
s’étonna Michael. Comme cela fait plaisir de vous voir !
- Vous n’avez pas changé
de département ? demanda Scarlett, intriguée mais ravie de les voir.
- Administrativement
parlant, nous sommes toujours rattachés à notre ancien département, expliqua
Dana après avoir embrassé le couple.
- Ça doit vous faire de
la route ! les plaignit Michael.
- Quand c’est le week-end,
ça va, rassura Tom. Mais il est vrai que ce soir, nous avons dû nous organiser
avec les enfants et ce n’était pas simple. D’autant plus que Tess a encore fait
des siennes à la fac…
- Rien de grave ? s’inquiéta
l’informaticien.
- Non, rassurez-vous !
répondit Dana. Un petit recadrage et ce fut réglé. Parlez-nous plutôt de vous !
Comment vont les filles ? Nous avons hâte de savoir. Nous avons appris
que vous avez adopté Anaïs ! C’est magnifique ! Quelle joie !
- Dana, laisse-les respirer
avant d’enchaîner les questions ! tempéra l’ingénieur.
- Par qui souhaitez-vous
que l’on commence ? demanda Scarlett après avoir récupéré une coupe de
champagne sur le plateau d’un serveur.
- Marie, répondit précipitamment Tom.
- Ah, Marie… soupira
Michael. Elle nous donne bien du fil à retordre ces derniers temps ! Elle
est même allée jusqu’au commissariat de police pour porter plainte contre nous
parce qu’elle reçoit trop de fessées !
Tom et Dana furent bouches bées.
- C’est une blague ?
demanda Tom. Dîtes-moi que c’est une blague !
- Malheureusement non,
poursuivit Michael. Elle nous a réveillés en pleine nuit, en larmes, en s’excusant
de toute son âme… Elle nous fait vraiment les quatre cents coups. De plus, ses
notes ont baissé. Elle se laisse beaucoup trop aller. Nous avons l’impression
que plus on serre la vis, pire c’est. En ce moment, il n’y a pas un jour où elle
ne reçoit pas une fessée. Dieu sait, en plus, que nous sommes loin d’y aller de
main morte. Nous devons vous avouer que nous sommes un peu démunis avec Marie - même si nous ne lui montrons pas - et nous espérons avoir des réponses ce soir.
- Elle vous craint
toujours, au moins ? demanda Dana.
- Oh oui, ça pour nous
craindre, elle nous craint ! répondit Scarlett. Mais ça n’a pas l’air de l’arrêter…
- Et son bras ? se
renseigna Tom.
- Toujours dans le
plâtre, répondit Michael. Mais si ses résultats sont bons et qu’elle est raisonnable,
elle pourra obtenir une attelle la semaine prochaine.
- Demander à Marie d’être
raisonnable, dit Tom. Il serait plus facile à un aveugle de voir !
- Elle a intérêt à être
raisonnable, trancha Scarlett. Elle n’aura pas le choix.
- C’est vraiment une chipie !
s’énerva Tom.
- Le pire, c’est qu’elle
est la plus attachante des trois ! dit Michael.
- Moi aussi, elle était
ma préférée, se souvint l’ingénieur d’un ton nostalgique.
- Bon, et Louise ? se
renseigna la juge d’instruction.
- Louise… Louise est un
amour, répondit Scarlett. Elle est malheureusement un peu trop influencée par
ses sœurs, ce qui lui joue parfois des tours… Mais elle est vraiment très sage.
C’est un réel plaisir d’être sa mère !
- Elle est toujours major
de promo ? demanda Dana.
- Toujours !
acquiesça Michael.
- Et Anaïs, alors ? questionna
Tom. Elle s’adapte bien chez vous ?
- Non, c’est très difficile
pour elle, répondit l’informaticien. En plus, elle a fait une énorme bêtise
pour laquelle nous la punissons sévèrement… et elle le vit très mal. Ce matin,
elle m’a dit que nous étions des tyrans et qu’elle ne supportait plus tant de
sévérité.
- C’est du Anou tout
craché ! convint Tom.
- Mesdames et messieurs, annonça
le référent départemental d’une voix forte, chères familles d’accueil, je vous
demande de bien vouloir venir vous installer pour regarder le topo du jour :
« comment gérer un ado rebel ».
- Ah ! dit Michael.
Nous allons sûrement avoir des réponses !
A la suite du topo visuel,
les couples se retrouvèrent en groupes de parole composés de huit parents et d’un
animateur. Scarlett et Michael intégrèrent le groupe de l’animateur David, avec
trois autres couples : les Benlaoui, les Dubois, et les Hoffman. Une fois
que chacun se fut présenté, David demanda :
- Ceux qui ont un ou une
ado rebel(le) en ce moment à la maison peuvent se manifester en levant la main.
Tous les couples se manifestèrent, ce qui
rassura Michael et Scarlett sur leur capacité à être parents. Chacun leur tour,
les couples exposèrent les frasques de leur(s) enfant(s) ; Michael et
Scarlett en profitèrent pour parler d’Anaïs, puis pour passer un long moment sur
Marie. Après s’être attardé sur la situation de tous les couples, David tenta d’éclairer
Michael et Scarlett.
- Comme il a été dit dans
le topo, je pense que le fait de recevoir une fessée est devenu banal pour vos
filles, dit-il. Quelque soit la bêtise qu’elles vont faire, elles vont recevoir
une fessée.
- Plus ou moins sévère, précisa
Michael.
- Certes, dit David, mais
la sanction reste la même. Comme pour les autres couples, je pense qu’il faut
revenir à une sacralisation de la punition. Il faut que vous finissiez la sanction
que vous avez entreprise avec Anaïs sinon elle croira que vous ne tenez pas parole ;
mais pour le reste, à partir de demain, tentez de mettre un autre système en
place.
- Lequel, par exemple ?
demanda Scarlett.
- Par exemple, afficher à
la maison un « tableau de comportement » sur lequel vous notez leurs
agissements. Une bêtise est égale à une croix. A chaque fois qu’elles écopent d’une
croix, elles prennent deux ou trois bonnes claques sur le pantalon. Au bout de
trois croix, elles prennent une très bonne fessée. Il faut qu’elle soit assez
bonne pour qu’elles craignent d’en recevoir une autre. N’ayez pas peur d’être
très sévères : le but est qu’elles aient peur d’obtenir à nouveau trois
croix. Et bien sûr, pour ne pas les décourager, il faut instaurer le système
inverse, c’est-à-dire que chaque bonne action enlève une croix ou donne lieu à
une petite récompense, et au bout de trois bonnes actions, elles ont une grosse
récompense.
- Attendez, vous voulez qu’on
récompense nos enfants pour des choses qu’il est normal de faire ? s’indigna
monsieur Benlaoui. Comme débarrasser la table ou ramener des bonnes notes ?
- Je vous propose cela
pour que vous n’ayez pas un système uniquement répressif, pour que vos enfants
n’aient pas l’impression d’être au bagne, expliqua David.
- Leurs bonnes actions
sont récompensées par l’amour et l’affection que nous leur donnons, dit madame
Hoffman. Sans parler du confort matériel ; ce qui est totalement normal
pour un parent. Ce qui est totalement normal pour un enfant, c’est de se tenir
correctement. Pour notre part, il n’y aura qu’un système répressif à la maison.
Si nos fils se tiennent correctement – ce qui est la normalité -, la récompense
sera la normalité : une vie de famille douce et harmonieuse. S’ils ne se
tiennent pas correctement, ils auront une correction, point.
Après s’être échangés un long regard, Michael et
Scarlett approuvèrent l’avis de madame Hoffman. Michael dit ensuite :
- Nous allons essayer d’instaurer
ce système de croix car nous admettons que nous sévissons peut-être trop
souvent et trop durement, ce qui peut à la longue perdre son sens pour les
filles. Nous instaurerons ces croix dès demain matin en leur expliquant les
tenants et les aboutissants. Nous verrons bien si cela fonctionne avec Anaïs et
Marie.
- Si je peux me
permettre d'insister, dit David, il serait bien de leur laisser la possibilité de pouvoir
enlever ou effacer une croix si elles se comportent bien pendant un certain
temps… Par exemple, si Marie chez les Webber, ou Timéo chez les Hoffman ne font
aucune bêtise pendant… disons deux jours, une croix sera enlevée. Il faut leur
laisser la possibilité de s’améliorer, d’avoir une échappatoire. Lorsque la vraie
bonne fessée tombera au bout de trois croix, si votre enfant ne se souvient
même plus des deux premières bêtises, quel est l’intérêt ?
- On peut tenter de faire
ça, oui, dit Scarlett. De toute façon, chez nous, c’est quasiment impossible que
Marie se tienne sage deux jours d’affilés !
Cette réplique de Scarlett fit rire tout le groupe.
Madame Hoffman ajouta d’ailleurs qu’il en était de même pour Timéo !
En
rentrant à la maison, Michael et Scarlett découvrirent avec soulagement qu’Anna-Beth
et Jack étaient partis se coucher. Ils étaient donc seuls si on ignorait Berlioz
et Toulouse jouant avec une bobine de laine.
Après
s’être servis un thé, le couple se pencha sur les termes du contrat qu’il passerait avec les filles. Michael et Scarlett fabriquèrent un grand tableau blanc et en définirent
les termes. Ils affichèrent le tableau et ses règles sur le mur de la cuisine
et allèrent se coucher, espérant de tout cœur que ce plan fonctionnerait,
malgré la présence des grands-parents !
A suivre…
Un grand merci pour ce bonus surprise
RépondreSupprimerEspérons que ce système encouragera les filles à devenir plus sages ...
Je suis très impatiente de découvrir ce tableau !
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