Mardi 26 novembre 2019
- Vous me ferez un exposé
sur un auteur du XVIIIème siècle de votre choix,
par groupe de trois, annonça madame Lebourg, notre professeure de littérature
française. Bien évidemment, les groupes ont été créés par mes soins ; je
vais dès à présent les énoncer…
J’implorai immédiatement n’importe quel dieu
compétent qui puisse me venir en aide pour que je ne tombe pas avec…
- Cassandra, Marie et Yann.
Dès que notre professeure eut terminé de
parler, je levai aussitôt la main.
- Oui, Marie ?
- Est-il possible que je
change de groupe, s’il vous plaît, madame ?
- Non, j’ai créé des
groupes équilibrés : si tout le monde commence à vouloir changer, nous
n’en avons pas fini !
- Ça ne me dérange pas
d’être avec Yann mais ça ne matche vraiment pas avec Cassandra ! expliquai-je.
- Vous allez apprendre à
vous entendre ! trancha madame Lebourg.
- Mais c’est impossible
de s’entendre avec elle !! insistai-je. En plus, elle est débile !!
- En plus de l’exposé de
groupe, vous m’écrirez cent lignes pour mardi ! réagit la prof. « Je
dois respecter mes camarades en toutes circonstances » !!
- En quoi ne l’ai-je pas
respectée ?! m’emportai-je malgré la main de Louise sur ma cuisse
m’incitant à me calmer.
- L’insulter devant toute
la classe, ce n’est pas de l’irrespect, pour vous ?! m’houspilla la prof.
- C’est la vérité !
plaidai-je.
- Dehors !! cria-t-elle.
Vous prenez vos affaires et vous sortez !!
- Mais…
- Vous sortez !!
vociféra-t-elle.
Très en colère, je remballai mes affaires dans un
silence complet – toute la classe me regardait ! – et sortis en claquant
la porte derrière moi. Payer encore, à cause de Cassandra, me mettait hors de
moi ! Je pris la décision de rentrer à la maison, peu importe les
conséquences. De toute façon, il y en aurait forcément ; et des mauvaises.
C’est dommage, mes fesses commençaient à ne plus me faire mal…
Sur
le chemin de la maison, j’avais le stress au ventre malgré le fait que j’assumais
ma décision. Je savais que mon père était en télétravail et qu’il allait me
tomber dessus : j’espérais juste qu’il soit en réunion visio pour retarder
la bombe.
Après
m’être déchaussée, j’enlevai mon manteau et lançai mon sac de cours dans un
coin. Puis, j’allai me laver les mains et m’allongeai sur le canapé pour fondre
en larmes.
- Marie,
ça ne va pas ? me demanda Assa en posant une main sur mon épaule.
Je lui fis « non » de la tête.
- Tu veux que je fasse
quelque chose ? Tu veux que j’appelle ton père ?
Je réitérai mon geste.
- Je ne peux pas te
laisser comme ça…
- Laisse-moi, Assa, s’il
te plaît, balbutiai-je entre deux larmes.
Elle poussa un soupir, se recula et resta
immobile quelques secondes avant de monter à l’étage. J’étais persuadée qu’elle
avait alerté mon père.
J’avais raison. Michael descendit
quelques secondes après qu’Assa soit allée le chercher. Il s’avança en silence,
s’assit à mes côtés et m’interrogea doucement :
- Qu’est-ce qui ne va
pas, ma princesse ?
- …
- Marie, dis-moi mon
p’tit cœur. Raconte-moi.
- Tu vas me punir, parvins-je
à articuler.
- Tu n’en sais rien du
tout. Pour le moment, j’ai besoin que tu me parles.
Je soupirai. Fichue pour fichue, autant que je
raconte tout. Après une inspiration, je déballai tout à mon père.
Il m’écouta silencieusement, sans réagir,
jusqu’à la fin.
- … et voilà. J’ai décidé
de rentrer à la maison.
Papa garda le silence. Je sentis qu’il
réfléchissait tandis que je reprenais mes pleurs.
Nous restâmes dans cette ambiance monastique plusieurs
minutes. Michael continuait de réfléchir et moi, de pleurer. Ne supportant plus
le poids du suspense, je finis par craquer :
- C’est à ton tour de
dire quelque chose. Ne reste pas dans ce silence.
- Je réfléchis, ma puce.
Il venait de m’appeler « ma puce ». C’était
bon signe. J’allais peut-être m’en sortir indemne, finalement ! Néanmoins,
je ne voulais pas m’emballer trop vite : Michael n’avait pas encore rendu
sa décision ; et j’ai deux parents.
- Monte dans ta chambre,
finit-il par m’ordonner. J’ai besoin d’être seul.
- Tu vas appeler maman ?
questionnai-je.
- Monte dans ta chambre,
Marie.
J’obéis avant qu’il ne me le demande une deuxième
fois. Je n’avais aucun intérêt à l’énerver. Surtout pas maintenant !
Une
fois dans mon antre, je m’allongeai sur mon lit en prenant bien garde de ne pas
écraser Berlioz qui y était étalé de tout son long. Le regard dans le vide, je
caressai mon chat endormi en attendant ma sentence.
Après
un long quart d’heure, on frappa à la porte de ma chambre.
- Entrez ! dis-je,
le cœur battant à tout rompre.
Papa entra en silence dans la pièce, ferma la
porte derrière lui, appuya ses fesses sur mon bureau pour se tenir face à moi,
et croisa les bras sur sa poitrine bodybuildée. Je m’étais relevée et assise
sur mon lit.
- Bon, j’ai appelé ta
mère, commença-t-il. Je lui expliqué la situation.
Je gardai le silence en retenant mon souffle
tandis que mon père marquait une pause. Puis, il reprit :
- Une chose absolument
non négociable, c’est que tu vas faire tes lignes Il est absolument inadmissible
que tu aies répondu à ta prof de la sorte ! Tes parents biologiques t’ont
mieux élevée que ça, et Scarlett et moi nous efforçons de te transmettre d’autres
valeurs ! L’irrespect et l’insolence ne sont vraiment pas tolérables,
surtout venant de notre fille !
- Pardon papa, dis-je
immédiatement en baissant les yeux.
- Ensuite, en humiliant Cassandra
de la sorte, tu lui as donné du grain à casser !
- A moudre, précisai-je.
- Hein ?
- On dit « du grain
à moudre », pas « à casser ».
- Autant pour moi, je ne
suis pas un expert des expressions françaises, reconnut mon père. Tu fais
vraiment tout pour que votre relation se détériore encore plus qu’à l’heure
actuelle ! Tu aurais très bien pu aller voir ta prof à la fin du cours
pour lui exposer ta demande de façon discrète au lieu de t’exclamer devant la
classe entière !
- Pardon papa,
répétai-je.
- Tu peux demander
pardon, Marie, mais ce qui est fait est fait ! Tu n’as vraiment pas eu un
bon comportement ! Néanmoins, nous connaissons bien ton incapacité totale
à gérer tes émotions et nous savons qu’il était compliqué pour toi de ne pas t’emporter.
Au lieu de répondre un « non » catégorique, madame Lebourg aurait pu
examiner plus amplement ta demande, t’en demander la justification et en parler
avec toi à tête reposée à la fin du cours.
- Je ne suis pas totalement
fautive, alors ! commentai-je, pleine d’espoir.
- Si, Marie !
répondit mon père. Tu es fautive parce que tu es une enfant, et que les enfants
n’ont pas à tenir tête aux adultes !
- Mais j’ai dix-huit ans !
- Aux yeux de la loi, tu
ne seras majeure que dans sept ans, ma fille ! Tu n’es qu’au milieu de l’adolescence !
Donc, tu es considérée comme une enfant !
- C’est injuste…
- Je sais mais c’est
ainsi ! Et tu es une enfant qui a tenu tête à un adulte, contestant sa
décision !
- Mais…
- Marie, stop ! C’est
un comportement que tu réitères en ce moment-même avec moi ; et c’est un
comportement qui doit cesser immédiatement !
- Oui papa, grommelai-je
pour ne pas aggraver mon cas.
- Donc si on récapitule
tes exploits de ce matin, tu as tenu tête à ta professeure de littérature, tu
as humiliée ta camarade devant toute la classe, tu as récolté une punition
écrite et une exclusion de cours, et tu es rentrée à la maison, séchant le
cours suivant.
Devant l’accumulation des bêtises énumérées par
le chef de famille, une boule de stress grosse comme mon poing se forma en
plein milieu de mon estomac. Le suspense se fit insoutenable, d’autant plus que
mon père s’était tu. Après quelques minutes, il ouvrit à nouveau la bouche et m’ordonna :
- Donne-moi ton
téléphone. Tu en es privée jusqu’à la fin de l’année.
- Euh, de quelle année ?
m’inquiétai-je, ayant en tête l’année scolaire.
- 2019, répondit mon
père, ce qui me soulagea quelque peu. Tu pourras le récupérer le 1er
janvier 2020 à minuit une. D’ici là, il va rester dans notre coffre-fort.
- Mais papa, nous ne
sommes que le 26 novembre ! Ça fait une privation de cinq semaines !
- Tu recommences à me
tenir tête, Marie ? me questionna-t-il en prenant une grosse voix.
- Non papa, me
résignai-je.
Je voulais à tout prix laisser mes fesses à l’abri.
C’était, en cet instant précis, mon objectif numéro un. J’avalai donc ma fierté
et ma nature de rebelle d’une traite et me pliai aux ordres de mon père. Je
pris mon téléphone, l’éteignis et le lui remis avec une grande tristesse. Cela
allait être un véritable handicap de ne plus avoir mon téléphone avec moi. Lui
et moi sommes, en temps ordinaire, inséparables. J’eus presque envie de pleurer
lorsque Michael le garda dans sa main. Au revoir petit smartphone. Tu vas
vraiment me manquer.
- En plus de la privation
de téléphone, tu es en sursis, Marie. A partir de maintenant, la moindre
incartade sera sévèrement punie. Jusqu’à vendredi, il est hors de question que
nous laissions passer quoique ce soit ! Tu as donc tout intérêt à te tenir
à carreaux puisque tu démarres mal la semaine !
- Oui papa.
- Et tes lignes sont
doublées. Tu en feras cent pour ta prof, et cent pour ta mère et moi.
- Oui papa.
- Et ce soir après le
dîner, ta mère et moi vérifierons que tu as bien rattrapé tes deux cours de ce
matin.
- D’accord papa.
- Et tu vas écrire une
lettre à madame Lebourg, la priant de t’excuser pour ton insolence.
- Oui papa, répétai-je en
cachant mon agacement.
- Gare à tes fesses, Marie,
si tout ça n’est pas respecté ! Tu sais très bien que nous ne rigolons pas !
- Oui papa.
- Bien. Tu as jusqu’au
déjeuner pour écrire tes lignes. Assieds-toi à ton bureau et commence-les dès
maintenant.
- Mais, je ne dois les
rendre que lundi ! plaidai-je.
Avant même que j’aie le temps d’ouvrir à
nouveau la bouche, Michael m’attrapa par le bras, me leva de mon lit et me
colla une sacrée claque sur la robe.
- Je t’ai ordonnée de
cesser de discuter les décisions des adultes ! Qu’est-ce que tu ne
comprends pas ?! Il me semble pourtant que je parle un français plus que
correct !
Les larmes aux yeux, je bafouillai un « Pardon,
papa » et m’assis à mon bureau pour prendre une feuille et un stylo plume.
- C’est quand même
incroyable qu’il faille toujours te claquer les fesses pour obtenir un résultat !
me réprimandait mon père en me regardant débuter mes lignes. On dirait vraiment
que tu cherches ! Tu pousses le bouchon jusqu’à ce qu’on craque pour ensuite
pleurer et supplier sur nos genoux ! Qu’est-ce que tu cherches, à la fin ?!
Avec le savon que me passait mon père, je ne pus
me retenir de verser quelques larmes. Le voyant, Michael estima sûrement que j’avais
compris – pour le moment – et sortit de la pièce.
Deux
heures plus tard, j’avais copié mes deux cents lignes et rédigé la lettre d’excuses.
Lorsque je me rendis dans le bureau de mon père pour lui montrer le résultat de
mes deux heures de travail, il commenta :
- C’est bien. Descends
dans la salle à manger, ta mère doit être rentrée. Nous allons manger.
- On n’attend pas Louise
et Anaïs ?
- Elles mangent à la fac.
Ta mère souhaitait que nous mangions seuls avec toi.
Moi qui pensais que la sanction avait fini de
tomber, je m’étais fourvoyée. Ne jamais oublier que j’ai deux parents…
Je
descendis les escaliers avec anxiété. Retrouver ma mère me terrifiait. A l’instar
de ma vie passée chez Tom et Dana, mon père s’avère souvent plus compréhensif
que ma mère ; même si Michael et Scarlett échangent souvent leurs rôles de
« gentil flic/méchant flic », ce qui ne m’aide pas vraiment à deviner
leurs réactions avec certitude en cas d’écart de conduite.
- Pourquoi, Marie ?!
me gronda Scarlett en me fonçant dessus dès que je lui fus visible. Pourquoi est-ce
que tu ne passes jamais une journée sans faire une bêtise ?! Je croyais
pourtant que ton père et moi avions mis les choses au clair, vendredi ! Non ?!
Nous n’avons pas été assez clairs ?!
- Si, maman, répondis-je.
- Apparemment pas puisque
tu te comportes comme une enfant mal élevée !
A la fin de sa phrase, ma mère attrapa mon
oreille gauche et m’emmena jusqu’au canapé. Elle m’obligea à me pencher sur l’accoudoir
mais grâce à je ne sais quel dieu (peut-être le même que ce matin !), elle
ne remonta pas ma robe.
- Tu es ma fille, n’est-ce
pas Marie ?! me gronda-t-elle.
- Oui maman, répondis-je
fébrilement.
- Est-ce que j’ai l’air d’une
mère qui a une fille insolente ?!
- Non maman.
Ma réponse déclencha trois bonnes claques sur
mon derrière.
- Est-ce que j’ai l’air d’une
mère qui a une fille irrespectueuse ?!
- …
- Je t’ai posé une
question, Marie !! insista ma mère en m’assénant une autre claque.
- Non maman, réitérai-je.
Trois nouvelles claques tombèrent. J’étais
vraiment contente de garder ma robe et toutes les autres couches de vêtements placées
dessous.
- Est-ce que j’ai l’air d’une
mère qui a une fille qui sèche les cours ?!
- Non maman.
Trois claques encore. Ma mère ne se retenait
pas.
Après la dernière, Scarlett attrapa de nouveau
mon oreille pour me relever de l’accoudoir. Elle attrapa ensuite mon menton et
me gronda :
- Si nous avons encore
quelque chose à te reprocher d’ici vendredi, tu prends une déculottée ! Tu
as compris ?!
- Oui maman.
- Je suis furieuse, Marie !
- Pardon maman.
Pour tenter de l’attendrir, je me jetai dans
ses bras. Cela marcha : ma mère me rendit mon câlin. Elle ne put néanmoins
s’empêcher de commenter : « Tu vas vraiment finir par me rendre folle ! ».
Mon père nous rejoignit au moment où nous
terminions ce câlin. En lâchant ma mère, je pris quand même quelques secondes
pour me frotter les fesses.
Nous
déjeunâmes tous les trois (Assa étant partie au restaurant avec des amies) et
le repas tourna beaucoup autour de ma mère et de son nouveau job. Elle avait en
effet quitté son boulot d’esthéticienne hier et avait réintégré la police ce
matin. Scarlett nous narra alors sa matinée de réintégration.
- Et tes horaires ? s’enquit
Michael.
- Je bosserai du lundi au
mercredi, et un week-end par mois. Cela, s’il n’y a pas d’urgences ; car
je dois toujours avoir mon bipper avec moi, au cas où.
- Tu commences dès cette
aprèm ?
- Non, je commence lundi,
finalement. D’ici là, je suis libre comme l’air !
- Où as-tu rangé ton arme
de service ?
- A son endroit habituel,
inaccessible pour nos filles, assura ma mère.
- Parfait, alors !
Michael demanda par la suite des nouvelles des
collègues de ma mère et je m’ennuyai à mourir, sans pour autant le dire ou le
montrer.
Bien
évidemment, je dus retourner à la fac pour 13h30, afin d’assister aux cours de l’après-midi.
Le premier cours, géographie, est mon cours favori : j’adore monsieur
Friletti, je le trouve passionnant !
Notre
journée d’école terminée, j’en profitai pour aller boire un chocolat chaud à la
cafétéria avec mes sœurs et nos amis. Cassandra profita de ce moment pour venir
me chercher des noises, accompagnée elle-même de ses sœurs (mais sans ses amis
puisqu’elle n’en a pas).
- Salut Webber, dit-elle.
J’ai décidé qu’on ferait notre exposé sur Voltaire. Tu fais les recherches, j’organise
et Yann rédige.
- Euh… Je crois que j’ai
loupé l’épisode où tu nous demandais notre avis ! lança ironiquement Yann.
- Tu ne l’as pas loupé :
il n’existe pas ! décréta Cassandra.
Je me tournai instantanément vers mes sœurs et
leur ordonnai :
- Promettez-moi de me
défendre face à papa et maman ! Parce que là, je vais m’énerver.
- Oui, on te défendra !
acquiesça Anaïs.
- Mais reste calme, Marie !
conseilla Louise.
- Si cette bouffonne
arrête de faire sa loi, je vais très vite me calmer ! dis-je. Mais pas
avant !
- Qui est-ce que tu
traites de bouffonne ?! s’emporta Cassandra en s’approchant de moi.
- Tu crois que j’ai peur ?!
provoquai-je en me levant.
- Sur la tête de ma mère,
j’vais te frapper !! menaça mon ennemie.
- Touche-la et tu auras à
faire à moi ! poursuivit Yann.
- Tu auras à faire à moi
aussi ! continua Marion.
- Pas de problème, j’vous
prends tous un par un !!
Cinq secondes plus tard, une bagarre générale
avait éclaté. Ce n’était pas comme si c’était la première fois que nous nous battions
avec les filles Dubois. C’était presque devenu un rituel mensuel.
Des
surveillants étaient venus stopper cette bagarre ; ils avaient
immédiatement prévenu notre Directeur de licence. Ce dernier avait pris la
décision de convoquer nos parents pour mettre les choses au clair.
Nous
étions douze dans la salle de réunion à attendre que nos parents arrivent :
Cassandra, Calix, Nancy et Rachel Dubois, Yann, Marion, Angélique, Anthony,
Jade, Anaïs, Louise et moi. Aucun de nous n’était vraiment fier : nous étions
tous placés dans des familles où les parents ne laissaient pas de place au
laxisme.
Les
parents d’Anthony et Jade arrivèrent les premiers. Ils fusillèrent leurs
enfants du regard avant de s’asseoir à côté d’eux. Anthony plaida sa cause mais
se fit instantanément rabrouer par son père :
- Tais-toi, parce que tu
vas t’en prendre une ! Je ne veux vraiment rien entendre ! Vous
enchaînez les conneries en ce moment, comme si vous aviez le diable au corps !
Donc si j’entends encore un mot sortir de la bouche de l’un ou de l’autre, vous
en prenez une devant tout le monde ! C’est clair, comme ça ?!
La mère d’Angélique et Marion arriva seule, excusant
son mari encore au travail auprès du Directeur de licence. Elle lança un :
« Vous allez voir quand on va rentrer à la maison ! Vous allez voir ! »
à ses filles – qui baissèrent la tête – avant de s’asseoir.
Ce fut au tour de Michael et Scarlett d’entrer
dans la pièce. Je crus que j’allais me faire pipi dessus. C’était la première
fois qu’ils étaient convoqués à la fac à cause de notre comportement ; et le
moins que l’on puisse dire, c’est que cela ne les enchantait pas du tout !
Je craignais fortement qu’ils nous collent à chacune une fessée devant tout le
monde mais eux aussi garderaient sûrement cela pour la maison. Ils prirent
place à nos côtés. Je vis que Louise se mettait à trembler, ce qui me fit instantanément
de la peine.
Les Dubois arrivèrent enfin. Ils étaient tellement
en colère qu’ils ne jetèrent aucun regard à leurs filles. Cassandra et ses sœurs
ne bronchèrent pas.
Une fois que nous fûmes
tous installés face à lui, le Directeur commença :
- Chers parents, vous voici
convoqués ce soir parce que vos enfants ont eu un comportement inacceptable :
ils ont pris part à une bagarre générale. J’espère grandement qu’avec votre
présence, je réussirai à démêler le vrai du faux avec eux et connaître le fin
mot de l’histoire.
Puis, il s’adressa à nous :
- Très bien, qui veut débuter
le récit des événements ?
Avant que Cassandra n’ait le temps d’ouvrir la
bouche, Yann leva la main. Après avoir été interrogé, il déclara :
- C’est Cassandra qui a
commencé !
- N’importe quoi ! le
coupa la concernée.
- Tu ne coupes pas la parole !
gronda madame Dubois à sa fille, de sa voix aigüe. Tu attends ton tour !
- Cassandra est venue
nous provoquer Marie et moi ! Elle a voulu nous imposer le thème de l’exposé
et son déroulé !
Yann donna tous les détails possibles : la
répartition proposée par Cassandra, notre colère à Yann et moi, les menaces de
Cassandra, nos réponses… Il alla même jusqu’à décrire les coups reçus et donnés
par lui-même.
- Qui confirme la version
de Yann ? demanda le Directeur de licence.
Nous levâmes tous la main, à l’exception de
Cassandra, Nancy, Calix et Rachel.
- Bien, je pense alors
que le débat est clos ! trancha le dirlo. Parents, sachez que pour s’être
battus, vos enfants écopent d’une journée d’exclusion de la fac ; journée
qui se déroulera vendredi. En ce qui concerne la suite, je vous laisse seuls
juges d’ajouter ou non une ou plusieurs sanctions à celle qui vient d’être
prononcée. Vous êtes libres de vous en aller, excepté la famille Dubois, si
vous le permettez.
- Filez à la maison !
nous ordonna notre père de sa grosse voix. Qu’on ne vous entende pas !
Anaïs, Louise et moi ne pipâmes mot. Je jetai un
regard à mes différents amis pour leur souhaiter du courage avant de sortir de
la pièce et de prendre le chemin de la maison.
Lorsque
je poussai la porte d’entrée, je n’étais pas sereine. Nous entrâmes tous les
cinq dans l’immense hall de la maison, nous déchaussâmes et enlevâmes nos
manteaux. C’est alors que maman annonça :
- Je vais préparer le
dîner. Je vous laisse régler cela avec votre père. Je me suis beaucoup trop fâchée
pour aujourd’hui !
Oh, oh. Je me souvenais très
bien d’une réflexion que Victoire m’avait faite peu de temps après mon arrivée
chez les Webber : « Si tu as à faire aux deux, c’est que tu as bien merdé.
Si tu as à faire à Scarlett uniquement, tu as sacrément merdé ! Si tu as à
faire à Michael uniquement, tu es fichue ! ». Depuis ce jour, je m’étais
toujours dit que si les deux me tombaient dessus, c’était que le degré de
gravité n’était pas très élevé (même si la soirée de vendredi avait complètement
démonté cette théorie). Puisque je m’étais déjà battue à la fac et que mes
parents ne m’avaient pas tuée par la suite, je me disais que ce n’était
peut-être pas si grave que ça ; mais cette fois-ci, nous n’aurions à faire
qu’à Michael. Notre ultra-musclé de père avait de quoi impressionner. S’il
était réellement furieux, nous prendrions chacune une fessée qui nous ferait
décoller du sol !
- Allez vous laver les
mains puis vous asseoir sur le canapé.
Cette obsession de la propreté, propre à mes
parents, nous faisait gagner quelques minutes pour ma plus grande satisfaction.
Nous
allâmes alors nous asseoir sur l’immense canapé.
- Je crois vraiment qu’on
va prendre cher, chuchotai-je à mes sœurs.
- Nan, sérieux ?! ironisa
Anaïs.
Papa s’assit sur le fauteuil en face de nous et
croisa les mains. Il nous demanda :
- Avant toute chose, est-ce
que vous allez bien ? S’il y a besoin d’en amener une chez le médecin –
mis à part Marie pour faire vérifier son poignet – c’est maintenant qu’il faut
le dire !
- Je me suis tordue la
cheville et ça me fait mal, avoua Louise.
- Très bien. Qui d’autre ?
- J’ai mal ici, dit Ana
en montrant son visage.
- Un œil au beurre noir
est en train d’apparaître, dit mon père. Nous vous emmènerons chez le médecin
demain, nous allons tenter d’obtenir un rendez-vous.
Il tourna la tête vers maman qui s’affairait en
cuisine. Elle comprit instantanément le message et s’empara de son téléphone
portable. Michael se tourna à nouveau vers nous et nous gronda :
- Bien, on va maintenant
parler de ce qui s’est passé cette après-midi ! Quand allez-vous enfin
cesser de vous quereller avec les filles Dubois ?!
- Quand elles cesseront d’être
débiles ! répondit Anaïs avec une franchise implacable.
- Qui es-tu, toi, Anaïs
Webber, pour juger de l’intelligence de quelqu’un ?! la gronda papa. Es-tu
un être supérieur doté de pouvoirs surnaturels ?!
- Non mais…
- Non, nous sommes bien d’accords !!
dit l’informaticien.
- Mais papa, elles passent
leur temps à nous provoquer !! plaida Louise pour mon plus grand étonnement.
- Je sais, dit-il, mais au
lieu d’aller vous plaindre à un adulte qui leur botterait les fesses, vous préférez
entrer dans leur jeu et vous battre avec elles !! Résultat des courses,
vous vous faîtes tout autant punir qu’elles !! Vous aussi, êtes exclues
vendredi pour vous être battues !! Vous ne pouvez vraiment vous en prendre
qu’à vous-mêmes !!
- Demain à onze heures, annonça
maman, au loin.
- Parfait, comme ça, elles
ne louperont pas de cours, se réjouit papa.
Puis, il reprit à notre encontre :
- Vous avez réagi
exactement comme elles voulaient que vous réagissiez : vous êtes entrées
dans leur jeu, vous vous êtes battues, vos parents ont été convoqués et vous
êtes exclues une journée de l’école ! A part une bonne fessée, je ne vois vraiment
pas ce que vous aviez à y gagner !!
- Oh non, papa, s’il te
plaît ! pria Louise. Je te promets que c’est la dernière fois que vous
serez convoqués à cause de nous !!
- Y’a intérêt à ce que ce
soit la dernière fois, oui ! Je vais d’ailleurs m’en assurer !
- Papa, j’t’en supplie !
priai-je à mon tour.
- Vous croyez vraiment
que je vais laisser passer une bagarre et une convocation dans le bureau de
votre directeur de licence ?! Vous rêvez, là !
Michael tapota alors ses cuisses et m’ordonna
de venir m’y allonger. Je refusai, bien évidemment.
- Qu’est-ce qu’on t’a dit
ce matin, ta mère et moi, sur le fait de tenir tête aux adultes ?! me
gronda fortement mon père. Viens ici tout de suite !!
- Papa, non, s’il te
plaît… suppliai-je en commençant à pleurer.
- Non ?! Tu viens de me dire « non » ?!
Je n’ai pas rêvé ?!
L’architecte en informatique se leva de son fauteuil
et fonça sur moi. Il m’attrapa alors par le bras, remonta ma robe, baissa mon cycliste,
mon collant épais et ma culotte, et me pencha sous son bras pour être certain
que je ne puisse pas m’échapper. Il me flanqua alors une bonne déculottée ;
et comme je l’avais prédit, j’avais l’impression de décoller du sol à chaque
claque ! J’étais déjà sûre d’avoir les fesses écarlates après seulement
dix claques. Je n’en pris pas moins d’une centaine, mon père me faisant payer
autant ma bagarre, que mon comportement irresponsable vis-à-vis de mon poignet,
que la succession de bêtises accomplies par mes soins aujourd’hui. J’étais en
sursis et j’avais recommencé mes bêtises dès cet après-midi : papa n’allait
pas du tout laisser passer cela !
Lorsqu’il
me lâcha, ce fut une véritable délivrance pour moi : je me massai immédiatement
les fesses. Je préférais définitivement avoir à faire à maman plutôt qu’à papa ;
même si Scarlett est redoutable, il faut impérativement fuir les sanctions de
Michael !
Je
fus envoyée au coin le temps que mon père punisse mes sœurs ; n’ayant pas
d’antécédents, elles furent moins sanctionnées que moi ; heureusement pour
elles, d’ailleurs : Louise encaissa très mal cette fessée, elle qui n’en
reçoit que rarement. Quant à Anaïs, avec l’esclandre réalisée hier, les
stigmates de son postérieur avaient dû se réveiller !
Alors
que nous étions toutes les trois face au mur, nos fesses exposées au reste de la
maisonnée, à pleurer toutes les larmes de nos corps, papa n’avait pas l’air d’en
avoir fini avec nous :
- Je ne veux plus entendre
que vous vous êtes bagarrés !! Les bagarres, ce sont pour les jeunes
filles mal élevées !! Est-ce que vous êtes des jeunes filles mal élevées ?!
- Non papa, répondîmes-nous
malgré nos pleurs.
- Si j’entends encore une
fois que vous vous êtes battues à l’école ou ailleurs, ce que vous venez de
prendre ne sera qu’une blague ! C’est compris ?!
- Oui papa, répétâmes-nous.
- De plus, si jamais votre
mère et moi sommes encore convoqués à l’école à cause de votre mauvaise
attitude, vous le regretterez amèrement ! C’est compris, Marie ?!
demanda-t-il en m’assénant une claque sur la fesse gauche.
- Aïe ! Oui, papa !
- C’est compris, Louise ?!
réitéra-t-il en paroles et en geste avec Louise.
- Oui papa,
sanglota-t-elle.
- C’est compris, Anaïs ?!
répéta-t-il encore de la même manière.
- Oui papa !
- Vous n’avez vraiment
plus intérêt à nous faire convoquer !! Vous n’avez plus droit à un seul
faux pas à l’école ! Je veux un comportement impeccable et des notes
excellentes !! Si vous n’avez pas encore décidé de devenir des jeunes
filles modèles, je vous garantis que ça va se faire !! La première qui me
ramène un mot de l’école ou une mauvaise note aura raison de trembler à l’idée
de rentrer à la maison !! C’est compris ?!
- Oui papa.
- Dernière chose :
si au rendez-vous médical de demain, le médecin annonce que vous avez une
blessure quelconque à la suite de cette bagarre, ça ira mal ! Marie, tu n’as
pas intérêt à avoir une nouvelle fois aggravé l’état de ton poignet ! Louise,
j’espère pour toi que tu n’auras aucune blessure à la cheville, pas même une
foulure ! Quant à toi, Anaïs, il y a intérêt à ce que ton œil au beurre
noir n’entraîne aucune conséquence lourde ! En tant que parents, nous
sommes garants de votre santé : il est hors de question que vous vous la
bousilliez à cause de vos bêtises !! Priez pour le rendez-vous de demain,
mes filles ! Priez pour que vous n’ayez rien de grave !!
Rhabillez-vous maintenant, et allez vous laver et vous mettre en pyjama !
Il en sera ainsi pour toute la semaine : je veux vous voir en pyjama avant
le dîner et au lit à vingt heures !! Exécution !!
J’avais presque oublié
qu’avec Michael et Scarlett, le fait de se retrouver en pyjama avant le dîner
constituait une punition.
Nous ne fîmes pas plus
de vagues pendant le dîner qu’au moment du coucher. Il n’en était de toute
façon pas question !
A suivre…
Décidément, Marie est vraiment très impulsive. Ça ne joue pas en sa faveur.
RépondreSupprimerCassandra est une vraie peste, j'espère qu'elle sera bien calmée après cet épisode, curieuse de savoir ce qu'elle pourrait recevoir par sa famille d'accueil
Ça va être très compliqué pour Marie si elle est vraiment obligée de faire équipe avec Cassandra, sa pire ennemie !
RépondreSupprimerVa-t-elle réussir à se contrôler ?
J’avais trop’hate que la suite arriver
RépondreSupprimerMarie en loupe vraiment pas une
Qu’en ai t’il de ses vomissements après les repas?
Vivement la suite 😁
Est-ce que Louise va tenir le secret longtemps au risque d'être elle-mêmemêmepunie pour son silence ?
SupprimerChoix difficile pour elle, partagée entre sa loyauté envers sa soeur ou son inquiètude pour sa santé.