Dimanche 24 octobre 2021
Presque
trois semaines s’étaient écoulées depuis la pire journée de ma vie ; celle
où Nick m’avait matraqué le derrière avec une telle détermination que je n’avais
pu m’asseoir sans douleur pendant six jours.
Même
si cela va de soi, je précise tout de même que je fus par la suite irréprochable.
Durant ces presque trois semaines menant jusqu’à aujourd’hui, mon précepteur n’a
même pas eu l’occasion d’hausser un peu le ton. Je n’avais plus refumé – préférant
de très loin la frustration à la punition ! – et j’étais une élève
exemplaire, tant sur le travail que sur le comportement.
Mon
petit ami, mon père et ma fratrie continuaient de venir me voir tous les
week-ends ; mais ce dimanche était spécial. Aujourd’hui, Valentin venait
seul pour établir, avec Nick, le bilan de mon mois passé ici. Cette après-midi,
mon père et mon précepteur allaient décider si je rentrais chez moi ou non.
Même
si je m’étais faite des amis – surtout Jenna, qui me rappelait un peu
Ashley ! – la punition de mon père de me placer ici m’avait servie de
leçon : j’avais vraiment envie de rentrer à la maison. Je voulais
retrouver mon foyer, ma chambre, les bras amoureux de Trent… Je voulais pouvoir
serrer mon père dans mes bras lorsque je le découvrais dans la cuisine en me levant
le matin, pouvoir discuter jusqu’à pas d’heure avec Manon de plein de trucs de
filles, pouvoir jouer à la bagarre avec Romain et qu’il finisse inévitablement
par me torturer de chatouilles… J’avais vraiment envie de tout ça.
Tous
trois installés dans le bureau de Nick, papa donna d’abord la parole à mon
précepteur.
- Cela a vraiment été un véritable
bonheur de m’occuper de Zoé. Même si elle m’a testé plusieurs fois – et a fait
face aux conséquences de ces tests -, par la suite, je dois dire qu’elle fut un
vrai petit ange. Vous avez vraiment bien élevé votre fille, monsieur Duhamel.
Vous pouvez être fier d’elle.
Je vis mon père pincer les lèvres ; Nicholas
pensait sûrement que j’avais grandi avec Valentin. Loin de lui l’idée que je ne
connaissais mon père que depuis deux ans.
Nick enchaîna ensuite avec le bilan entièrement
positif de mes études. Mes premières notes s’étaient avérées excellentes, pour
le plus grand plaisir de mon père. Nick termina donc :
- C’est avec une immense
tristesse (car je me suis beaucoup attaché à votre fille) que je recommande
un retour à la maison pour Zoé.
Valentin hocha la tête sans dire mot. Il tourna
ensuite son regard vers moi et me demanda :
- Et toi, Zo ? Qu’en
penses-tu ?
- Je veux rentrer à la
maison, répondis-je sans délai.
Mon père garda le silence quelques instants,
puis avoua :
- Je suis embêté, Zoé.
Effectivement, tous les feux sont au vert pour que je te ramène à la maison ;
mais comment puis-je m’assurer que tu ne feras pas une nouvelle fugue dès que
tu en auras l’occasion ?
- Papa, je te jure que je
serai sage !
- Tu resteras sage, même
quand Nick ne sera plus là pour te menacer d’une fessée ? s’enquit l’homme d’affaires.
- Je sais que toi tu le
feras ! plaidai-je. Manon, Romain et Trent aussi ! Je ne serai pas laissée
à l’abandon !
- Il est sûr que je n’hésiterai
pas à te corriger si tu t’écartes du droit chemin, mais ce qui m’inquiète ce
sont les périodes durant lesquelles je suis en déplacement professionnel. De
plus, Manon et Romain enchaînent pas mal les gardes en ce moment et tu vas régulièrement
te retrouver seule avec Trent qui ne résistera pas longtemps à tes caprices.
Continueras-tu d’être sage sans cette épée de Damoclès au-dessus de la tête ?
- Si je peux me
permettre, vous devriez faire confiance à votre fille, conseilla Nick.
- Zoé a perdu ma
confiance à la suite de sa dernière fugue, confessa mon père en m’arrachant le cœur.
En attendant qu’elle la regagne, je ne suis franchement pas prêt à laisser la
prunelle de mes yeux en roues libres.
- Dans ce cas, poursuivit
Nick, prenez un baby-sitter. Prenez quelqu’un que Zoé pourrait craindre en cas
de désobéissance ; et ce quelqu’un s’occupera de votre fille lorsque vous,
Romain et Manon serez occupés.
- Oui, c’est une idée…
réfléchit mon père.
- Papa, s’il te plaît !
le priai-je. Je veux rentrer à la maison !
Après un moment de silence qui me sembla durer
une éternité, Valentin déclara :
- Voici ce que je propose :
accordons à Zoé une période probatoire d’un mois. Je vais engager quelqu’un
durant mes absences, et je gérerai ma fille lorsque je serai là. Si cette période
se passe correctement, alors on continuera ainsi et tu resteras à la maison.
Sinon, je te ramènerai ici illico presto et demanderai instamment à Nick de te
reprendre en mains.
- C’est une proposition
ou une condamnation ? demandai-je. Ai-je vraiment le droit de refuser ce
que tu viens de « proposer » ?
- Non, trancha Valentin.
Nous allons effectivement nous organiser ainsi.
- Cela me semble être un
bon compromis, commenta Nick.
- Et qui vas-tu me
trouver comme baby-sitter ? demandai-je en tentant de camoufler au mieux
mon irritabilité.
- J’ai un bon ami qui
pourrait s’en charger, répondit mon père en tapotant sur son smartphone. Je l’ai
vu redresser des jeunes filles dix fois plus coriaces que toi ; te garder
sera pour lui une promenade de santé.
- C’est normal que j’aie
l’impression d’avoir six ans ?! grommelai-je.
- C’est tout à fait
normal, rétorqua Valentin. Si tu avais réellement dix-neuf ans, je pourrais te
faire pleinement confiance et enfin te traiter en adulte. Mais tu continues de
te conduire en petite fille en me faisant des fugues à deux balles et en voulant
t’enfuir de la maison dès que quelque chose te contrarie. Alors, je te traite
en petite fille.
- Tu vas me les ressortir
pendant combien de temps, ces histoires de fugues ? interrogeai-je.
- Crois-moi mon bébé, tu n’as pas fini d’en entendre parler ! m’assura l’homme d’affaires avant que je lâche un grognement de mécontentement. Je vais appeler mon ami pour lui demander s’il peut venir dîner avec nous ce soir, poursuivit Valentin. J’ai un avion pour Miami demain midi, j’aimerais qu’il prenne le relais. Pendant que je l’appelle, va chercher tes bagages, Zoé. Nous rentrerons à la maison après mon coup de fil.
J’obéis, grognonne.
L’au
revoir avec Nick fut difficile pour moi. Mine de rien, je m’étais vraiment
attachée à mon précepteur qui s’était pleinement consacré à moi durant un mois
entier.
- Vous êtes le bienvenu à
la maison pour voir les filles, dit Valentin en serrant la main de Nick. Vous
venez quand vous voulez ! Vous le savez, n’est-ce pas ?
- Bien sûr, répondit chaleureusement
Nick.
Puis, il se tourna vers moi et me dit :
- Si jamais je te vois
revenir dans un mois, gare à tes fesses ! C’est compris ?
- Compris, répondis-je
les yeux rivés au sol.
Nick attrapa mon menton et le poussa légèrement
vers le ciel pour m’obliger à le regarder. Puis, il me déclara tendrement :
- Tu as peut-être momentanément
perdu la confiance de ton père, mais tu as toujours la mienne. Ne me déçois
pas, ma p’tite puce. Je compte sur toi. Fais tes devoirs, sois sage à l’école, pas
d’insolence, et surtout : pas de cigarette !! Que je n’apprenne pas
que tu as fait des bêtises, Zoé ! Je compte sur toi.
Alors que je me dirigeai vers la voiture, je me
tournai une derrière fois vers Nick. Puis, dans un élan d’affection, je lâchai les
deux sacs que je portais et courus dans les bras de mon précepteur. Collée à
lui pour un énorme câlin (qu’il me rendit), je lui chuchotai à l’oreille :
- Merci pour tout. Je t’aime.
- Je t’aime aussi ma
puce.
Puis, à contrecœur, je relâchai mon étreinte,
récupérai mes sacs et montai en voiture. Lorsque Valentin démarra, les larmes
me montèrent aux yeux. L’homme d’affaires le devina puisque, sans même avoir
besoin de me regarder, il posa sa main sur ma cuisse en me disant :
- Ça va aller, mon bébé.
On l’invitera très vite à venir passer une journée à la maison. Je t’en fais la
promesse.
A peine la porte d’entrée
fut-elle ouverte que trois personnes me sautèrent dessus : Trent, Manon et
Romain.
- Je suis jaloux, déclara
papa avant que Manon le serre à son tour dans ses bras pour le consoler.
- Pourquoi avez-vous un
tablier ? demandai-je à Romain et Trent lorsqu’ils m’eurent lâchée.
- On a décidé de te cuisiner
ton repas préféré pour célébrer ton retour, avoua Trent.
- Vous…avez cuisiné ?
m’étonnai-je.
- Eh oui, comme quoi,
tout arrive ! ria Manon.
Les garçons m’aidèrent à transporter toutes mes
affaires dans ma chambre, puis papa et Romain nous laissèrent seuls, Trent et
moi.
Mon petit ami me poussa alors sur le lit et
grimpa sur moi en me murmurant suavement :
- Je me suis langui de
toi pendant une sacrée période !
- Je crains de ne pas
avoir la tête à cela ce soir, répondis-je en repoussant doucement mon amoureux
qui se mit à bouder. Mais bientôt, promis.
- Que se passe-t-il pour
que tu n’aies pas envie que je te fasse l’amour ?
- Mon père va engager un
baby-sitter pour s’occuper de nous lorsque Manon, Romain et lui seront trop pris,
narrai-je. Il ne me fait plus confiance pour me tenir à carreaux en son
absence, et il pense que tu me cèderas beaucoup trop.
- Il n’a pas tort, avoua
Trent.
- Mais au fait !
dis-je en me relevant et en posant mes mains sur mes hanches. Mes lasagnes de
légumes ne vont pas se cuisiner toutes seules !
- C’est bon, Romain s’en
occupe ! maugréa Trent.
- Tu ne peux pas le
laisser tomber, lui dis-je. Et puis moi, je dois ranger toutes mes affaires.
Aller, zou ! En cuisine, chef Trent !
- Qu’est-ce qui m’a pris
de vouloir faire ça… râla Trent en sortant de notre chambre.
Enfin seule, j’étais aux anges. Je profitai de
retrouver mes sensations familières, l’odeur de la lessive de mon père, celle
du parfum de Trent, la douceur de la soie de ma taie d’oreiller. Ah… c’était si
bon de rentrer à la maison !
Mes
affaires déballées, je sortis de ma chambre et allai m’installer au bar de la cuisine
pour observer les garçons me préparer un bon repas. Pendant ce temps, Manon
mettait la table.
- Tu pourrais m’aider,
quand même ! me lança-t-elle.
- Je pourrais, dis-je.
- Zoé, viens m’aider à
mettre le couvert, ordonna-t-elle. Tout de suite !
- Oh c’est bon, laisse-moi
respirer un peu ! grommelai-je.
- Manon, peux-tu ajouter
une assiette supplémentaire, s’il te plaît ? demanda mon père en entrant
dans la pièce. Un ami vient dîner avec nous ce soir. Il ne devrait pas tarder à
arriver.
- Un ami ? interrogea
ma sœur. Quel ami ?
- Jacob, répondit
Valentin.
- Jacob Eldmann ?
demanda Manon. Celui que tu as rencontré à Yale ?
- Lui-même, confirma mon
père.
- Mais, aux dernières
nouvelles il était au Canada ! se rappela ma sœur.
- Il est rentré aux
Etats-Unis il y a déjà deux mois, Manon ! râla mon père. J’aimerais bien
que tu écoutes, quand je parle !
- Je ne peux pas me
souvenir de tout ce que tu dis, protesta ma sœur. Et pourquoi vient-il dîner à
la maison ? Il y a une raison particulière ?
- Oui, répondit Valentin.
Il était à la recherche d’un boulot et je viens de lui en trouver un…
- C’est-à-dire ? se
renseigna la médecin.
- S’occuper de ta sœur pendant
que je suis en déplacement, répondit Valentin.
- Tu as du souci à te
faire, Zoé ! me lança ma sœur après avoir ri.
- La ferme ! lui dis-je.
- Répète un peu ça, pour
voir ?! s’énerva Manon.
- Les filles, ça suffit !
gronda le père de famille. Zoé, tu parles autrement à ta sœur.
- En parlant de Zoé,
balança Manon, elle refuse de m’aider à mettre la table.
- Zoé, tu aides ta sœur à
mettre la table ! m’ordonna Valentin alors que son téléphone sonnait. Tu
obéis ! insista-t-il avant de décrocher et de s’isoler dans une autre
pièce.
Je me levai, allai prendre un couteau dans le
tiroir et le posai à droite de l’assiette la plus proche.
- Voilà, je t’ai aidée !
déclarai-je.
Enervée, ma sœur attrapa un torchon qu’elle fit
tourner sur lui-même avant de le faire claquer sur mes fesses.
- Même pas mal !
narguai-je en me rasseyant au bar.
C’était vrai, en plus ! Je n’avais quasiment
rien senti.
- Je vais t’attraper par les
cheveux, tu vas voir si tu ne vas rien sentir ! menaça Manon.
- Je me défendrai, ça
finira en bagarre et papa te punira autant que moi ! dis-je à raison.
Je savais pertinemment que Valentin permettait
à ses aînés de me sanctionner uniquement en son absence.
- Très bien, tu ne me
laisses plus le choix ! conclut ma sœur.
Elle lança alors un très plaintif : « Papaaaaaaaaaaaa ! »,
à peine surjoué. Nous entendîmes de l’autre côté de la porte que notre père coupait
court à son appel.
- Qu’est-ce qu’il y a ?!
gronda-t-il. Je ne peux pas vous laisser deux minutes tout seuls à vos âges ?!
- Zoé refuse de t’obéir
et de m’aider ! se plaignit Manon en prenant une voix de bébé.
- Zoé, qu’est-ce que je t’ai
demandé ?!
- Mais je l’ai aidée !
protestai-je.
- Elle a seulement posé
un couteau ! dénonça ma sœur.
- Je t’ai quand même
aidée, dis-je. Donc, j’ai obéi.
Valentin pénétra dans la cuisine ouverte et s’approcha
de moi. Pensant être dans mon bon droit, je fus on ne peut plus surprise que mon
père me sorte de mon tabouret par le bras et m’assène trois claques sur les
fesses.
- Aïe ! me plaignis-je.
Malgré mon boxer et mon jeggings, j’avais bien
senti la main paternelle !
- Maintenant, tu arrêtes
de te ficher de nous et tu fais ce que je t’ai demandé, Zoé ! Et tu le
fais maintenant, sinon tu vas rapidement faire un tour sur mes genoux ! Ce
n’est pas parce que tu es rentrée que tu dois te croire tout permis !
Je ne savais pas si c’était parce que je n’avais
plus reçu de fessée depuis presque trois semaines ou si c’était parce que mon
père avait augmenté la force de ses claques ; mais ces dernières effacèrent
toute trace de mauvaise foi en moi. Je finis par aider (pour de vrai !) ma
sœur.
Jacob
Eldmann se ramena avec une bouteille de vin. Classique. Lorsqu’il pénétra dans
la maison, je compris pourquoi Manon m’avait dit que j’avais du souci à me
faire : il semblait très impressionnant ! Grand (peut-être un mètre
quatre-vingt-cinq), la peau blanche, Jacob était roux aux yeux bleus. Sous son
pull bleu marine, on devinait aisément une musculature développée et bien entretenue.
- Où est mon filleul
préféré ? demanda-t-il en parcourant la pièce du regard.
- Parrain ! s’exclama
mon frère.
- Parrain ?! m’étonnai-je
sans contrôle.
- Jacob est un ami de
longue date, et c’est le parrain de Romain, précisa Valentin.
- Merci, je viens de
comprendre ! râlai-je.
Jacob lança un regard à Valentin qui voulait
dire : « J’imagine que c’est Zoé ? », et l’homme d’affaires lui rendit un regard qui voulait dire : « Tu as du boulot. ».
- Bonjour Zoé, je suis
ravi de te connaître, dit Jacob en s’approchant de moi pour me faire la bise.
La dernière fois que je t’ai vue, tu n’étais qu’un bébé. Tu as gardé la bouille
de ton père !
- C’est un compliment ?
me renseignai-je, sur la défensive.
- Tu ne trouves pas que
ton père soit bel homme ? me demanda Jacob.
- Vous ne répondez pas à
ma question, rétorquai-je.
- Toi non plus, poursuivit-il.
Je levai le menton en signe de défi. Hum, il me
tardait d’apprendre à connaître mon nouveau baby-sitter.
A suivre…
Oh oh Zoé va vite se retrouver sur les genoux de Jacob !
RépondreSupprimerSa fait du bien de relire t’es magnifique récit après cette longue attente ☺️☺️
RépondreSupprimerComme toujours super histoire j’ai l’impression que zoé ne va pas rester très longtemps dans le cocon familial
Et je pense qu’elle a effectivement dû soucis a se faire avec Jacob vu comment sa commence
Vivement la suite
La sagesse ne dure jamais bien longtemps avec Zoé ! La soirée risque d'être chaude pour son derrière !!!
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