Lundi 4 novembre 2019.
- Vous êtes bien sûres de vous, les
filles ? nous demanda Monsieur Éric avant que nous quittions
définitivement ses appartements.
- Absolument sûres ! lui
répondîmes-nous.
- Dans ce cas, vous devez bien avoir en
tête que nous ne nous verrons plus aussi souvent ! nous dit le Directeur.
Vous serez désormais sous la responsabilité de Madame Valérie et c’est à elle
que vous aurez à faire si vous vous comportez mal. Aussi, si vous avez le
malheur d’atterrir dans mon bureau, je ne donnerai pas cher de votre
peau !
Cette menace bien réelle me fit froid dans le dos. Je n’avais pas
pensé au fait qu’avec notre déménagement, Monsieur Éric redeviendrait un
directeur lambda, comme lors de mon arrivée ici ; mais cela ne me fit pas
regretter ma décision pour autant.
- En résumé, tenez-vous correctement et
tâchez de ne pas vous attirer d’ennuis ! dit le Directeur. Ce fut un
plaisir de vous avoir avec moi, les filles.
Monsieur Éric nous serra tour à tour contre lui. Etonnées, nous le
laissâmes faire. Je me surpris même à lui rendre son câlin !
Puis, nous quittâmes les appartements du Directeur pour ne plus y
revenir, et nous rendîmes au réfectoire pour le petit déjeuner.
Après le premier repas
de la journée et avant le début des cours, Eva et Charline furent missionnées
par Madame Valérie pour nous installer dans notre chambre – la numéro six – et
nous expliquer le fonctionnement du dortoir numéro deux, qui n’avait pas beaucoup
changé depuis que nous l’avions quitté.
Nos affaires avaient
déjà été installées dans notre chambre par l’équipe logistique : nous
n’avions plus qu’à les déballer et les arranger à notre sauce.
J’étais en train
d’accrocher au-dessus de mon lit les photos de ma famille quand Madame Valérie
entra dans notre chambre sans frapper.
- Vous deux ! Venez ici ! J’ai
quelques petites choses à vous dire !
Prenant sur nous pour ne pas l’envoyer paître, Mathilde et moi
arrêtâmes ce que nous étions en train de faire pour nous placer devant notre
Surveillante Référente, et l’écouter.
- Ce n’est pas parce que vous arrivez de
chez Monsieur le Directeur qu’il faut vous croire tout permis ! Vous serez
logées à la même enseigne que les autres ; et je peux vous assurer que je
ne vais pas vous lâcher d’une semelle !
- Donc on ne sera pas à la même enseigne
que les autres, du coup ! intervins-je.
- Qu’est-ce que vous dîtes,
Clémence ?!
- Je dis, en toute logique, que si vous
ne nous lâchez pas d’une semelle, on ne sera pas à égalité avec les autres,
répondis-je.
- L’infirmière vous dispense pour
aujourd’hui – et uniquement pour aujourd’hui ! – de recevoir une bonne
fessée mais si vous continuez à faire la maligne, vous aurez de nouveau du mal
à vous asseoir et ce, dès demain !
- Qu’ai-je dit de mal ? demandai-je
dans l’incompréhension.
- Vous faîtes votre intéressante,
Clémence ! Et je vous défends de me répondre !
Madame Valérie sortit de la pièce avant même que je puisse
répliquer. Avant que nous retournions à nos occupations, Mathilde me
chuchota : « Et un point pour toi ! ».
En philosophie,
Monsieur Yves était plutôt fatigué et donc irritable. Chaque bruit était
repris, chaque bavardage était puni. Fort heureusement, j’étais dans le lot des
élèves sages et studieuses : il m’était impossible de faire des miennes,
bien que ma dispense ait pu me pousser à faire des bêtises !
Ma journée se passa
plutôt bien, surtout grâce aux deux heures de littérature avec Monsieur Mickaël
et sa bonne humeur ! Ce professeur est vraiment mon préféré !
Ce fut le soir que l’ambiance
se gâta.
Nous étions rendues dans nos dortoirs après le dîner et Mathilde
vint me voir dans notre chambre alors que je sortais de la douche. Elle
pleurait. Lui mettant une main sur l’épaule, je lui demandai :
- Que se passe-t-il ?
- Si je te le dis, je veux que ce soit à
la responsable des élèves, et non pas à ma meilleure amie.
- Oui, bien sûr ! lui répondis-je. Tu
m’inquiètes ! Je t’écoute.
- Il y a quelques minutes, alors que tu
étais sous la douche, Madame Valérie a trouvé un petit mouton de poussière sous
mon lit. Elle m’a dit que notre chambre n’était pas assez entretenue et que je
devais copier cent fois pour demain « Je dois nettoyer ma chambre pour qu’elle
reste propre. ». On vient tout juste d’arriver ! Ce n’est pas notre
faute s’il y a de la poussière !
Ecoutant Mathilde, mon sang se mit à bouillir et je devins rouge
de colère.
- Attends-moi là, dis-je la mâchoire
serrée.
Je sortis en trompe de la chambre. Avant de passer la porte du dortoir,
Madame Christelle me stoppa :
- Où allez-vous, Mademoiselle ?!
Retournez dans votre chambre immédiatement !
- Barre-toi et laisse-moi passer !!
vociférai-je en la bousculant légèrement.
Je fonçai vers le bureau de Monsieur Éric, fâchée comme rarement
je le fus.
- Entrez ! dit-il après que j’aie
toqué.
Ouvrant la porte, je découvris Monsieur Éric et Monsieur Lionel en
train de discuter, penchés sur un dossier. Je m’emportai :
- Messieurs !! Il va falloir qu’on
parle !!
Ils haussèrent tous les deux les sourcils en croisant les bras sur
leurs poitrines, mais j’ignorai ce fait, continuant :
- Votre foutue Madame Valérie, là !
C’est une connasse !! Elle est injuste avec nous !! Elle a puni
Mathilde pour une poussière en-dessous son lit alors que nous ne sommes arrivées
que ce matin !! Si c’est pour qu’elle soit infecte, injuste et horrible
avec nous, ce n’est pas la peine, d’accord ?! On n’est pas retournées dans
notre ancien dortoir pour subir ça, en fait !! Donc vous allez vous bouger
pour faire quelque chose et vous allez le faire maintenant !!
Un silence pesant s’installa à la fin de ma réplique. Monsieur Éric
et Monsieur Lionel me fixaient d’un air outré. Comprenant que j’étais allée
trop loin, je murmurai un petit : « Euh… S’il vous plaît. ». Monsieur
Éric retint un sourire.
- C’est bon ? demanda le Directeur.
Tu as fini ?
J’hochai timidement la tête. Les deux hommes se regardèrent puis
me regardèrent de nouveau. Le Directeur-Adjoint finit par m’interroger d’une
voix calme mais ferme :
- Pour qui est-ce que tu nous as pris,
au juste ? Tes pions ? Tes larbins ? A qui penses-tu parler ?
- Je… Eh bien…
- Il est grand temps que tu prennes conscience
que tu n’es qu’une élève parmi les autres, poursuivit Monsieur Éric. Tu n’as
aucunement le droit ni de nous parler sur ce ton ni d’insulter notre personnel.
De plus, penses-tu vraiment qu’en entrant en furie dans mon bureau et en nous
hurlant dessus comme si nous étions tes subalternes, cela va plaider en faveur
de ta cause ?
- Malheureusement, poursuivit Monsieur
Lionel, à cause de ton comportement, nous n’avons rien retenu de ta requête. En
revanche, nous avons bien assimilé que tu nous avais aboyé dessus en nous
donnant des ordres et que tu avais insulté une surveillante.
Je baissai la tête. Oui bon, j’y étais peut-être allée un peu
fort. Mais j’étais tellement en colère contre elle ! Je répliquai d’ailleurs :
- Désolée, mais Madame Valérie m’a
vraiment énervée !
- Ce n’est pas notre problème, ça, ma
grande ! répliqua le Directeur. A ton âge, tu devrais savoir te canaliser ! Ta façon de dire les choses n’est pas du tout appropriée et est à revoir.
- En ce qui concerne Madame Valérie,
poursuivit le Directeur-Adjoint, nous avons tout de même compris ton message et
nous allons nous en occuper.
Soudain, la porte du bureau du Directeur s’ouvrit, laissant entrer
Madame Christelle.
- Pardonnez-moi de vous déranger,
Messieurs ! dit-elle, essoufflée. Mademoiselle Clémence ici présente s’est
permise de me bousculer en me hurlant dessus pour que je la laisse sortir du
dortoir en dehors des heures autorisées !
Les deux hommes froncèrent les sourcils. Un orage se profilait
pour moi. Souhaitant m’éclipser, je dis discrètement :
- Bon ben, puisque vous m’avez entendue,
je vais retourner dans ma chambre…
- Reste ici, Clémence ! m’ordonna
fermement le Directeur-Adjoint. Puisque tu es là, nous allons tirer cette histoire au
clair !
- Je suis désolée, j’étais fâchée !
plaidai-je.
- C’est à Madame Christelle que tu dois
présenter tes excuses, m’informa le Directeur. Et la colère ne justifie pas tout !
Tu vois, tes émotions te jouent des tours, Clémence, car au lieu de venir réclamer
calmement justice, tu vas écoper d’une punition pour avoir agressé une
surveillante !
- Mais je viens de dire que j’étais
désolée ! réitérai-je. Madame Christelle, je suis vraiment désolée !
- Tu vas nous écrire deux cents fois
pour mercredi : « Je dois maîtriser ma colère et ne pas agresser ni
insulter une surveillante. », m’annonça Monsieur Lionel. Je veux cent
lignes sur mon bureau pour mercredi soir, dix-neuf heures, et cent lignes sur
le bureau de Monsieur Éric pour le même jour et la même heure.
- Mais c’est injuste !
protestai-je.
- Tu trouves ? demanda Monsieur Éric.
Je nous trouve au contraire plutôt gentils. Tu aurais pu recevoir une bonne
fessée en prime !
- J’en suis dispensée aujourd’hui,
rétorquai-je à voix basse.
- Cette dispense ne vaut pas pour la
Direction, je pense que tu t’en doutes ! me dit le Directeur. Aller, file !
- Et améliore tes manières ! ajouta
le D.-A. avant que je ne quitte le bureau.
Lorsque je racontai mes malheurs à Mathilde,
elle fut désolée pour moi.
Ayant une écriture similaire à la sienne, je l’aidai à faire ses lignes avant de me coucher et après le passage de l'infirmière.
A suivre…
Et bien le retour au dortoir commence bien mal et Clémence s'attire déjà des ennuis !
RépondreSupprimerIl faut dire que Madame Valérie leur tombe dessus sans attendre, elle fait tout pour que le retour des filles se passe mal !
J'espère que Monsieur Éric va intervenir ...
Clémence ne supporte pas l'injustice, elle réagit sans contrôle, ce rôle de représentante ne lui convient absolument pas !!!
Ça promet pour la suite ....
Hello, au moins, Clémence échappe à la fessée. Pourtant, sa cause était juste, mais il va lui falloir apprendre à y mettre les formes. Je ne suis pas d'accord avec Sonia (désolé), le rôle de représentante lui va bien, mais elle a beaucoup de choses à apprendre pour être efficace dans ce rôle. Mais Clémence est intelligente, elle va vite s'y faire... Et alors, les surveillants n'auront qu'à bien se tenir plutôt que de céder eux-mêmes à la facilité de choisir des boucs émissaires.
RépondreSupprimerCe rôle lui convient quand il s'agit de défendre ses camarades victimes d'injustices et bien-sûr qu'il va falloir qu'elle apprenne à se contrôler ... mais je me souviens que sa mission consiste aussi à ''balancer'' comme elle dit, celles qui font des bêtises ! Ça, ça ne lui va pas du tout ... c'est cela qui m'inquiète 🤔
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