Lundi 13 janvier 2020.
Je
passai une nuit épouvantable. Non seulement la fièvre n’était pas décidée à me
quitter, mais en plus j’avais sacrément mal au ventre ! A chaque fois que
je m’endormais et que je bougeais dans mon sommeil, cette douleur au ventre me
réveillait !
Lorsque
mon réveil sonna, je pris mon courage à deux mains, tentai de faire abstraction
de la maladie et descendis au rez-de-chaussée.
Je me rendis dans la salle à manger pour le petit déjeuner : papa et maman étaient
déjà attablés. Scarlett avait préparé des pancakes et ceux-ci étaient encore
tout chauds.
- Bonjour ma princesse,
dit Michael en me voyant arriver. Comment vas-tu ?
- Ça va, répondis-je en
tentant d’ignorer mes légers vertiges dus à ma violente douleur au ventre.
Scarlett vint m’embrasser sur le front et
déclara :
- Tu as encore de la
fièvre. Hors de question que tu ailles à l’école aujourd’hui. Je t’emmène chez
le médecin.
- Mais maman, j’ai trop
de cours importants aujourd’hui ! protestai-je d’une voix faible. Notamment
anglais, sciences du langage et grammaire avancée ! Et j’ai latin, aussi !
Si je loupe une journée, je vais prendre du retard !
- Si tu vas à l’école
aujourd’hui tu vas avoir bien du mal à te concentrer, me raisonna ma mère. Tu
risques de t’endormir en classe. Et puis il est impossible d’apprendre
correctement quand on est patraque Tes sœurs te ramèneront les cours et tu
travailleras pour compenser ce retard. Mange un peu et prends ton médicament.
Ensuite, nous partirons pour le cabinet médical, c’est sans rendez-vous ce
matin. Plus tôt on sera arrivés, plus tôt nous passerons.
Tandis que j’avalais mon médicament à l’aide d’un
peu de jus de fruits, mes frère et sœurs nous rejoignirent à table.
- Ça fait bizarre d’être…
à six, dit Louise d’un ton gêné.
- Nous savons qu’il y a eu
beaucoup de chamboulements ces derniers temps, admit papa. Nous souhaitons vraiment
stabiliser tout ça. Nous allons faire notre maximum pour éviter que vous soyez
à nouveau déstabilisés. Et pour renforcer la cohésion familiale et se changer
un peu les idées, nous partirons en week-end vendredi.
- Où ça ?
demandai-je, très intéressée.
- Où vous le souhaitez,
du moment que c’est à moins de trois heures d’avion, répondit papa. Hors de
question que nous passions notre week-end dans les transports !
- Je voudrais aller à Dublin !
formulai-je.
- Oh oui, ce serait trop
cool ! appuya Louise.
- Non, il faut aller vers
la chaleur ! intervint Anaïs. Je rêve d’aller à Barcelone !
- Et Rome, ça ne vous
tente pas ? proposa Mayeul.
- L’Irlande, c’est génial !
repris-je. Oh s’il vous plaît, je veux trop aller à Dublin !!
- Oui, moi aussi !!
renchérit Louise.
- Mais l’Espagne, c’est
mieux ! soutint Ana.
- L’Italie, ce n’est pas
mal non plus… murmura Mayeul.
- Mais…
- Stop ! intervint
Scarlett en haussant le ton, ce qui fit résonner mon mal de crâne. Je vous
propose un deal : celui ou celle de vous quatre qui sera le plus irréprochable
choisira la destination de notre week-end vendredi matin.
- C’est injuste !
râla Anaïs. On sait tous que ce sera Mayeul ou Louise !
- A toi de mettre toutes
les chances de ton côté, lui lança Michael.
- Je suis bien contente
de rester à la maison aujourd’hui, alors ! dis-je doucement.
- Comment ça tu restes à
la maison ?! s’enquit Ana. Moi aussi je veux rester ici !
- Ta sœur est malade !
répondit Scarlett. Je vais l’emmener chez le médecin. C’est papa qui vous
déposera à l’école.
- Moi aussi j’aurais bien
aimé être malade… grommela Ana.
- Tâche de bien écouter
en classe afin d’aider Louise à prendre les cours pour Marie, recommanda maman.
Une demi-heure plus
tard, ma mère et moi partions pour le centre-ville, là où se trouvait le
cabinet de notre médecin traitant.
Scarlett et moi nous installâmes dans la salle d’attente.
Il y avait trois personnes devant nous ; cela me laissa le temps d’être terrassée
par la fièvre et de m’endormir contre ma mère.
- Suivant ! entendis-je,
me réveillant en sursaut.
- Viens ma chérie, me
chuchota doucement Scarlett à l’oreille. C’est à notre tour.
Je réunis le peu d’énergie qu’il me restait
pour me lever et marcher jusque dans le cabinet du médecin.
- Bonjour madame Webber,
dit le docteur Montreynault en consultant mon dossier sur son ordinateur.
Bonjour Marie. Que puis-je faire pour vous ?
- Marie a de la fièvre depuis
hier soir, dit ma mère.
- Est-ce que tu as des
douleurs ? me demanda le médecin.
- J’ai mal à la tête et…
Je ne pus poursuivre ma phrase. L’appréhension se
fit star en moi.
- Et ? s’enquit le
docteur.
- …
- Parle, Marie ! s’exclama
ma mère, inquiète.
- … et au ventre,
poursuivis-je.
- Punaise, pourquoi ne
nous as-tu rien dit ?! me gronda Scarlett.
- J’ai tellement de petites
douleurs au quotidien, justifiai-je, je me suis dit que si je ne disais rien,
ça passerait comme d’habitude…
- Marie, tu as de la
fièvre !
- Calmez-vous madame
Webber, dit le médecin. Il se peut qu’il n’y ait aucun lien.
- Elle est tombée dans un
ruisseau hier après-midi lors d’une balade à vélo, narra ma mère. Est-ce qu’elle
aurait pu attraper une bactérie quelconque ?
- Je vais d’abord l’examiner
et ensuite nous verrons.
Ce toubib me fit vraiment mal avec son fichu examen. Il réveilla la douleur qui sommeillait en moi : celle-ci était maintenant bien difficile à gérer !
- Bien, dit le médecin.
Je suis persuadé que Marie fait une appendicite.
- Une appendicite ?!
s’affola Scarlett. Mais, si c’était le cas, elle devrait avoir mal à droite,
non ?
- Avec sa malformation
intestinale, l’appendice de Marie se situe à gauche, expliqua le docteur
Montreynault. Je vais écrire un courrier pour l’hôpital. Vous devez vous y
rendre dès maintenant. Ils feront une prise de sang et une échographie pour
confirmer le diagnostic. Si j’ai raison, tu seras opérée dès aujourd'hui, Marie.
- Mais… Elle peut avoir
des complications, non ?! questionna Scarlett.
- Des complications ?
s’étonna le toubib.
- Avec sa malformation,
pardi ! répondit maman.
- Même avec la maladie de
votre fille, c’est une opération qui reste bénigne. Elle restera à l’hôpital
jusqu’à demain soir et sera exemptée d’école pour la semaine. Tout ira bien, madame
Webber. Néanmoins, vous devez tout de suite filer à l’hôpital.
Le médecin nous remit le courrier et nous nous
rendîmes donc au centre hospitalier se trouvant à un quart d’heure de la
maison. Scarlett était affolée, prête à pleurer. Moi, j’étais juste dépitée.
- Entre la fracture de
ton poignet, votre accident de vélo, la cheville de Louise et ta maladie
chronique… Y’a-t-il une semaine où nous allons cesser de nous inquiéter ?!
Si j’avais su qu’être parent consisterait à être inquiet à longueur de temps…
- Tu regrettes ? lui
demandai-je, pliée en deux dans la voiture menant à l’hôpital.
- Bien sûr que non !
se reprit-elle. Non, ma chérie. Je suis juste très inquiète. Mais tout va bien se
passer. Papa va nous rejoindre à l’hôpital, et ça va aller.
- Pense à prévenir ma
famille biologique, dis-je.
- C’est déjà fait. Ta
mère m’a demandé de la tenir au courant de chaque étape.
Lorsque Michael nous
rejoignit, le diagnostic était tombé : je faisais bien une appendicite.
Malheur ! J’étais obligée de passer sur le billard et cela m’angoissait
tellement que je me mis à pleurer.
Michael et Scarlett ne
parvenaient pas à me rassurer ; et même le coup de fil à ma mère
biologique ne m’apaisa pas : j’étais persuadée que j’allais mourir. Avec
la chance que j’avais, quelque chose allait forcément mal se passer !
Dix-huit heures. Avant
mon entrée au bloc, ma mère dût me retirer son téléphone des mains car, ayant
consulté toutes les possibles aggravations d’une appendicite, j’étais à deux doigts
de rédiger mon testament.
- Marie, tout va bien se
passer ! me répéta une énième fois mon père. Tout va bien, ma princesse !
- Je pourrais faire un abcès ! Une péritonite ! Attraper une infection nosocomiale ! Faire une septicémie !
L’infirmière finit par me donner un calmant
avant de m’emmener au bloc opératoire.
Il
était aux alentours de vingt-deux heures trente lorsque j’ouvris les yeux. Immédiatement,
mon regard se posa sur ma mère biologique qui se trouvait à mon chevet. Michael et
Scarlett étaient également présents dans la pièce. Tous trois se rapprochèrent
immédiatement du lit. Ma mère biologique m’embrassa, les larmes aux yeux, avant
de me demander :
- Comment te sens-tu mon
petit bébé ?
- Ça va, répondis-je. Il
ne faut pas que tu restes, tu n’as pas le droit d’être là !
- Michael et Scarlett m’ont autorisée à venir et heureusement : je tournais en cage à la maison tellement j’étais inquiète ! Je voulais juste m’assurer que tu allais bien avant de rentrer. Toute la famille était inquiète pour toi !
- Tu me manques, maman !
gémis-je, au bord des larmes.
- Toi aussi, mon amour !
Mais souviens-toi que rien ne pourra jamais séparer nos cœurs, pas même ce
fichu gouvernement ! Et puis, tes parents d’accueil sont des gens bien. Je
leur fais confiance à mille pourcents !
Je voulus enlacer ma mère mais il m’était encore douloureux de bouger : ce fut alors elle qui vint à moi. Nous nous serrâmes fort dans les bras avant qu’elle ne parte. Après m’avoir enlevé l’appendice, j’avais l’impression qu’on m’enlevait un bout de mon cœur. Je ne m’étais pas rendue compte ô combien il était dur pour moi d’être loin de mes parents, de mon petit frère et de Mathieu !
Ma
mère biologique partie, j’échangeai quelques mots avec mes parents d’accueil
qui m’informèrent que l’opération s’était bien passée et que tout allait
parfaitement bien. Michael me dit que lui et sa femme allaient passer la nuit
avec moi, dans ma chambre.
- Vous avez le droit ?
m’enquis-je.
- Bien sûr !
répondit papa. En pédiatrie, les parents ont le droit de dormir avec leurs enfants !
- En pédiatrie ?
pensai-je.
Ah. Bah oui. J’étais redevenue une enfant aux yeux
de la loi !
- Mais Louise, Ana et Mayeul
sont…
- Oncle Caleb prend soin
d’eux ce soir, et ce sera au tour d'oncle Nolan demain, m’expliqua Scarlett. Si tout
va bien, tu devrais avoir l’autorisation du médecin pour sortir dans la soirée.
On mangera ce que tu voudras, demain soir !
- Et on pourra aller à
Dublin ce week-end ? me renseignai-je.
- Hélas, tu n’as pas le
droit de prendre l’avion avant deux semaines, répondit papa. Mais promis, nous
irons y passer un week-end dès que tu seras rétablie.
- D’accord, acceptai-je.
- Marie chérie, déclara
ma mère, rends-nous service dorénavant et dis-nous lorsque tu as mal quelque
part, principalement au ventre !
- Ce n’était qu’une
petite douleur et je ne voulais pas vous déranger…
- Ma puce, ce qui nous
dérange c’est lorsque tu ne nous parles pas ! m’informa papa. Et ce n’était
pas qu’une petite douleur puisque le chirurgien a dit que tu devais sacrément
douiller depuis hier soir !
- Non vraiment, ce n’était
rien de bien méchant…
- Marie, si jamais tu omets
à nouveau volontairement de nous dire que tu as mal quelque part, nous ne
serons pas aussi compréhensifs, malgré l’inquiétude ! menaça papa. Je t’assure
que tu prendras une bonne fessée ! C’est notre boulot de prendre soin de
toi, alors laisse-nous faire notre travail. D’accord ?
- D’accord.
- Aller, repose-toi ma
petite guerrière, dit tendrement ma mère. Ton corps et toi avez bien besoin de
récupérer !
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