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Journal d'une étudiante accueillie. - Chapitre 89.



 Lundi 13 janvier 2020.

 

       Je passai une nuit épouvantable. Non seulement la fièvre n’était pas décidée à me quitter, mais en plus j’avais sacrément mal au ventre ! A chaque fois que je m’endormais et que je bougeais dans mon sommeil, cette douleur au ventre me réveillait !

 

       Lorsque mon réveil sonna, je pris mon courage à deux mains, tentai de faire abstraction de la maladie et descendis au rez-de-chaussée.

 

       Je me rendis dans la salle à manger pour le petit déjeuner : papa et maman étaient déjà attablés. Scarlett avait préparé des pancakes et ceux-ci étaient encore tout chauds.

-    Bonjour ma princesse, dit Michael en me voyant arriver. Comment vas-tu ?

-    Ça va, répondis-je en tentant d’ignorer mes légers vertiges dus à ma violente douleur au ventre.

Scarlett vint m’embrasser sur le front et déclara :

-    Tu as encore de la fièvre. Hors de question que tu ailles à l’école aujourd’hui. Je t’emmène chez le médecin.

-    Mais maman, j’ai trop de cours importants aujourd’hui ! protestai-je d’une voix faible. Notamment anglais, sciences du langage et grammaire avancée ! Et j’ai latin, aussi ! Si je loupe une journée, je vais prendre du retard !

-    Si tu vas à l’école aujourd’hui tu vas avoir bien du mal à te concentrer, me raisonna ma mère. Tu risques de t’endormir en classe. Et puis il est impossible d’apprendre correctement quand on est patraque Tes sœurs te ramèneront les cours et tu travailleras pour compenser ce retard. Mange un peu et prends ton médicament. Ensuite, nous partirons pour le cabinet médical, c’est sans rendez-vous ce matin. Plus tôt on sera arrivés, plus tôt nous passerons.

Tandis que j’avalais mon médicament à l’aide d’un peu de jus de fruits, mes frère et sœurs nous rejoignirent à table.

 

-    Ça fait bizarre d’être… à six, dit Louise d’un ton gêné.

-    Nous savons qu’il y a eu beaucoup de chamboulements ces derniers temps, admit papa. Nous souhaitons vraiment stabiliser tout ça. Nous allons faire notre maximum pour éviter que vous soyez à nouveau déstabilisés. Et pour renforcer la cohésion familiale et se changer un peu les idées, nous partirons en week-end vendredi.

-    Où ça ? demandai-je, très intéressée.

-    Où vous le souhaitez, du moment que c’est à moins de trois heures d’avion, répondit papa. Hors de question que nous passions notre week-end dans les transports !

-    Je voudrais aller à Dublin ! formulai-je.

-    Oh oui, ce serait trop cool ! appuya Louise.

-    Non, il faut aller vers la chaleur ! intervint Anaïs. Je rêve d’aller à Barcelone !

-    Et Rome, ça ne vous tente pas ? proposa Mayeul.

-    L’Irlande, c’est génial ! repris-je. Oh s’il vous plaît, je veux trop aller à Dublin !!

-    Oui, moi aussi !! renchérit Louise.

-    Mais l’Espagne, c’est mieux ! soutint Ana.

-    L’Italie, ce n’est pas mal non plus… murmura Mayeul.

-    Mais…

-    Stop ! intervint Scarlett en haussant le ton, ce qui fit résonner mon mal de crâne. Je vous propose un deal : celui ou celle de vous quatre qui sera le plus irréprochable choisira la destination de notre week-end vendredi matin.

-    C’est injuste ! râla Anaïs. On sait tous que ce sera Mayeul ou Louise !

-    A toi de mettre toutes les chances de ton côté, lui lança Michael.

-    Je suis bien contente de rester à la maison aujourd’hui, alors ! dis-je doucement.

-    Comment ça tu restes à la maison ?! s’enquit Ana. Moi aussi je veux rester ici !

-    Ta sœur est malade ! répondit Scarlett. Je vais l’emmener chez le médecin. C’est papa qui vous déposera à l’école.

-    Moi aussi j’aurais bien aimé être malade… grommela Ana.

-    Tâche de bien écouter en classe afin d’aider Louise à prendre les cours pour Marie, recommanda maman.

 

Une demi-heure plus tard, ma mère et moi partions pour le centre-ville, là où se trouvait le cabinet de notre médecin traitant.

Scarlett et moi nous installâmes dans la salle d’attente. Il y avait trois personnes devant nous ; cela me laissa le temps d’être terrassée par la fièvre et de m’endormir contre ma mère.

 

-    Suivant ! entendis-je, me réveillant en sursaut.

-    Viens ma chérie, me chuchota doucement Scarlett à l’oreille. C’est à notre tour.

Je réunis le peu d’énergie qu’il me restait pour me lever et marcher jusque dans le cabinet du médecin.

-    Bonjour madame Webber, dit le docteur Montreynault en consultant mon dossier sur son ordinateur. Bonjour Marie. Que puis-je faire pour vous ?

-    Marie a de la fièvre depuis hier soir, dit ma mère.

-    Est-ce que tu as des douleurs ? me demanda le médecin.

-    J’ai mal à la tête et…

Je ne pus poursuivre ma phrase. L’appréhension se fit star en moi.

-    Et ? s’enquit le docteur.

-   

-    Parle, Marie ! s’exclama ma mère, inquiète.

-    … et au ventre, poursuivis-je.

-    Punaise, pourquoi ne nous as-tu rien dit ?! me gronda Scarlett.

-    J’ai tellement de petites douleurs au quotidien, justifiai-je, je me suis dit que si je ne disais rien, ça passerait comme d’habitude…

-    Marie, tu as de la fièvre !

-    Calmez-vous madame Webber, dit le médecin. Il se peut qu’il n’y ait aucun lien.

-    Elle est tombée dans un ruisseau hier après-midi lors d’une balade à vélo, narra ma mère. Est-ce qu’elle aurait pu attraper une bactérie quelconque ?

-    Je vais d’abord l’examiner et ensuite nous verrons.

Ce toubib me fit vraiment mal avec son fichu examen. Il réveilla la douleur qui sommeillait en moi : celle-ci était maintenant bien difficile à gérer !

-    Bien, dit le médecin. Je suis persuadé que Marie fait une appendicite.

-    Une appendicite ?! s’affola Scarlett. Mais, si c’était le cas, elle devrait avoir mal à droite, non ?

-    Avec sa malformation intestinale, l’appendice de Marie se situe à gauche, expliqua le docteur Montreynault. Je vais écrire un courrier pour l’hôpital. Vous devez vous y rendre dès maintenant. Ils feront une prise de sang et une échographie pour confirmer le diagnostic. Si j’ai raison, tu seras opérée dès aujourd'hui, Marie.

-    Mais… Elle peut avoir des complications, non ?! questionna Scarlett.

-    Des complications ? s’étonna le toubib.

-    Avec sa malformation, pardi ! répondit maman.

-    Même avec la maladie de votre fille, c’est une opération qui reste bénigne. Elle restera à l’hôpital jusqu’à demain soir et sera exemptée d’école pour la semaine. Tout ira bien, madame Webber. Néanmoins, vous devez tout de suite filer à l’hôpital.

Le médecin nous remit le courrier et nous nous rendîmes donc au centre hospitalier se trouvant à un quart d’heure de la maison. Scarlett était affolée, prête à pleurer. Moi, j’étais juste dépitée.

-    Entre la fracture de ton poignet, votre accident de vélo, la cheville de Louise et ta maladie chronique… Y’a-t-il une semaine où nous allons cesser de nous inquiéter ?! Si j’avais su qu’être parent consisterait à être inquiet à longueur de temps…

-    Tu regrettes ? lui demandai-je, pliée en deux dans la voiture menant à l’hôpital.

-    Bien sûr que non ! se reprit-elle. Non, ma chérie. Je suis juste très inquiète. Mais tout va bien se passer. Papa va nous rejoindre à l’hôpital, et ça va aller.

-    Pense à prévenir ma famille biologique, dis-je.

-    C’est déjà fait. Ta mère m’a demandé de la tenir au courant de chaque étape.

 

Lorsque Michael nous rejoignit, le diagnostic était tombé : je faisais bien une appendicite. Malheur ! J’étais obligée de passer sur le billard et cela m’angoissait tellement que je me mis à pleurer.

Michael et Scarlett ne parvenaient pas à me rassurer ; et même le coup de fil à ma mère biologique ne m’apaisa pas : j’étais persuadée que j’allais mourir. Avec la chance que j’avais, quelque chose allait forcément mal se passer !

 

Dix-huit heures. Avant mon entrée au bloc, ma mère dût me retirer son téléphone des mains car, ayant consulté toutes les possibles aggravations d’une appendicite, j’étais à deux doigts de rédiger mon testament.

-    Marie, tout va bien se passer ! me répéta une énième fois mon père. Tout va bien, ma princesse !

-    Je pourrais faire un abcès ! Une péritonite ! Attraper une infection nosocomiale ! Faire une septicémie !

L’infirmière finit par me donner un calmant avant de m’emmener au bloc opératoire.

 



       Il était aux alentours de vingt-deux heures trente lorsque j’ouvris les yeux. Immédiatement, mon regard se posa sur ma mère biologique qui se trouvait à mon chevet. Michael et Scarlett étaient également présents dans la pièce. Tous trois se rapprochèrent immédiatement du lit. Ma mère biologique m’embrassa, les larmes aux yeux, avant de me demander :

-    Comment te sens-tu mon petit bébé ?

-    Ça va, répondis-je. Il ne faut pas que tu restes, tu n’as pas le droit d’être là !

-    Michael et Scarlett m’ont autorisée à venir et heureusement : je tournais en cage à la maison tellement j’étais inquiète ! Je voulais juste m’assurer que tu allais bien avant de rentrer. Toute la famille était inquiète pour toi !

-    Tu me manques, maman ! gémis-je, au bord des larmes.

-    Toi aussi, mon amour ! Mais souviens-toi que rien ne pourra jamais séparer nos cœurs, pas même ce fichu gouvernement ! Et puis, tes parents d’accueil sont des gens bien. Je leur fais confiance à mille pourcents !

Je voulus enlacer ma mère mais il m’était encore douloureux de bouger : ce fut alors elle qui vint à moi. Nous nous serrâmes fort dans les bras avant qu’elle ne parte. Après m’avoir enlevé l’appendice, j’avais l’impression qu’on m’enlevait un bout de mon cœur. Je ne m’étais pas rendue compte ô combien il était dur pour moi d’être loin de mes parents, de mon petit frère et de Mathieu !

 

       Ma mère biologique partie, j’échangeai quelques mots avec mes parents d’accueil qui m’informèrent que l’opération s’était bien passée et que tout allait parfaitement bien. Michael me dit que lui et sa femme allaient passer la nuit avec moi, dans ma chambre.

-    Vous avez le droit ? m’enquis-je.

-    Bien sûr ! répondit papa. En pédiatrie, les parents ont le droit de dormir avec leurs enfants !

-    En pédiatrie ? pensai-je.

Ah. Bah oui. J’étais redevenue une enfant aux yeux de la loi !

-    Mais Louise, Ana et Mayeul sont…

-    Oncle Caleb prend soin d’eux ce soir, et ce sera au tour d'oncle Nolan demain, m’expliqua Scarlett. Si tout va bien, tu devrais avoir l’autorisation du médecin pour sortir dans la soirée. On mangera ce que tu voudras, demain soir !

-    Et on pourra aller à Dublin ce week-end ? me renseignai-je.

-    Hélas, tu n’as pas le droit de prendre l’avion avant deux semaines, répondit papa. Mais promis, nous irons y passer un week-end dès que tu seras rétablie.

-    D’accord, acceptai-je.

-    Marie chérie, déclara ma mère, rends-nous service dorénavant et dis-nous lorsque tu as mal quelque part, principalement au ventre !

-    Ce n’était qu’une petite douleur et je ne voulais pas vous déranger…

-    Ma puce, ce qui nous dérange c’est lorsque tu ne nous parles pas ! m’informa papa. Et ce n’était pas qu’une petite douleur puisque le chirurgien a dit que tu devais sacrément douiller depuis hier soir !

-    Non vraiment, ce n’était rien de bien méchant…

-    Marie, si jamais tu omets à nouveau volontairement de nous dire que tu as mal quelque part, nous ne serons pas aussi compréhensifs, malgré l’inquiétude ! menaça papa. Je t’assure que tu prendras une bonne fessée ! C’est notre boulot de prendre soin de toi, alors laisse-nous faire notre travail. D’accord ?

-    D’accord.

-    Aller, repose-toi ma petite guerrière, dit tendrement ma mère. Ton corps et toi avez bien besoin de récupérer !

 

A suivre...

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