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Nouvelle rentrée, nouvelle vie ! - Chapitre 50

 


Mardi 12 novembre 2019

 

       Alors que Mathilde et moi faisions nos lits après notre réveil, l’une des deux nouvelles Gouvernantes du dortoir n°2 entra dans notre chambre sans frapper.

-    Bonjour Mesdemoiselles, dit-elle avant d’inspecter notre chambre. Je vois que tout est en ordre, ici ! C’est bien. Habillez-vous et tressez vos cheveux avant de vous rendre au réfectoire.

-    Il faut que nous nous fassions des tresses ? demanda Mathilde qui pensait sûrement avoir mal entendu.

-    Parfaitement, Mademoiselle Mathilde. Monsieur George a instauré ce décret pas plus tard que ce matin. Toutes les pensionnaires ayant les cheveux assez longs pour être tressés doivent se coiffer ainsi. Une ou deux nattes, peu importe.

-    Nan mais c’est n’importe quoi ! protesta Mathilde lorsque Madame Lodine fut sortie de notre chambre. Ils veulent nous imposer nos coiffures ?! Et puis quoi encore ?!

-    Tu peux me faire deux tresses, s’il te plaît ? demandai-je sagement à ma meilleure amie.

-    Tu ne dis rien ?! s’offusqua-t-elle.

-    J’ai trop mal aux fesses pour dire quoique ce soit, avouai-je. Bon alors, tu peux me coiffer, s’il te plaît ?

Avec mes longs cheveux descendant jusqu’au milieu de mon dos – peut-être plus loin, je ne les ai pas coupés depuis la rentrée ! – Mathilde n’eut aucun mal à me coiffer rapidement. Puis, je la coiffai à mon tour d’une unique tresse tombant sur sa nuque.

 

 

       Ce fut la mort dans l’âme que je me rendis en cours d’anglais. Moi qui adorais le mardi matin car cela signifiait quatre heures de cours d’affilées avec Madame Kelly, j’étais dépitée. Dorénavant, ce serait Monsieur Curtis qui assurerait les cours d’anglais. Un prof choisi par Monsieur Georges. Cela ne pouvait rien apporter de bon.

 

-    Asseyez-vous ! nous ordonna-t-il en entrant dans la classe.

Monsieur Curtis était un homme noir auquel j’aurais donné une quarantaine d’années. Plutôt grand, ayant une carrure de sportif, je fus instantanément persuadée que ce professeur courait des marathons tous les dimanches. Monsieur Curtis était brun, les cheveux frisés et courts, et portait petit un bouc s’étendant de son philtrum à son menton. Il était habillé d’une chemise bordeaux qui faisait joliment ressortir sa couleur de peau. Nous fixant de ses yeux marron foncé cachés derrière ses lunettes noires et carrées, il déclara :

-    Bonjour à toutes, je suis Monsieur Curtis, votre nouveau professeur d’anglais et de littérature anglaise. J’ai jeté un œil à l’excellent travail que vous avez commencé avec Madame Kelly et que je souhaite poursuivre. Avant de commencer…

Il s’interrompit soudainement et fixa fermement Lucille.

-    Vous vous permettez de discuter pendant que je parle ?! gronda-t-il à ma camarade.

-    Pardon, Monsieur. dit Lucille.

-    Vous obtiendrez mon pardon en allant au coin ! annonça Monsieur Curtis.

Lucille resta bouche bée. Le professeur regarda une feuille sur son bureau puis reprit :

-    Mademoiselle… Lucille, c’est ça ?

-    Ou…oui, Monsieur, bredouilla-t-elle.

-    Je vous ai demandé d’aller au coin et je déteste me répéter ! tonna l’anglophone.

-    Mais Monsieur, je…

Lucille n’eut pas le temps de finir sa phrase : Monsieur Curtis descendit de l’estrade pour lui foncer dessus. Il la sortit de sa chaise d’une main et lui claqua cinq fois le derrière par-dessus sa jupe. Les cinq claques résonnèrent dans toute la classe. Un silence de mort nous frappa toutes tandis que le professeur emmenait lui-même Lucille au coin.

-    Mains sur la tête ! ordonna-t-il. Si je vous vois bouger, vous recevrez une fessée déculottée de ma part !

Tandis que Lucille s’exécutait, Monsieur Curtis remonta sur l’estrade. J’étais totalement dépitée. Madame Kelly me manquait déjà beaucoup !

-    Avant de commencer le cours, reprit le nouveau prof, je dois vous rendre ces copies de la part de votre ancienne professeure.

Oh. Avec les nouvelles règles en vigueur, nous nous demandions bien qui finirait au coin avec le bonnet d’âne et les fesses écarlates ! Je me surpris à commencer à trembler. Je suis très bonne élève mais les accidents arrivent à tout le monde !

-    Les copies sont classées de la meilleure à la moins bonne note, annonça Monsieur Curtis. Je commence par Clémence, vingt sur vingt. Excellent travail !

Ouf ! Je fus la première de la classe à être soulagée ! Après avoir rangé ma copie dans mon cartable, je posai ma main sur la cuisse de Mathilde, assise à côté de moi. La pauvre n’était qu’appréhension.

Les copies se succédaient : Hélène, Emma, Louise, Yéline, Valentine, Capucine, Astrid, Charline… Mais toujours pas de Mathilde à l’horizon. Nous passions désormais en-dessous de la moyenne. Si Mathilde n’écopait pas de la pire note, elle recevrait quand même une fessée de la part de notre père-référent, c’était certain !

-    Mathilde, quatre sur vingt ! annonça le professeur en rendant l’avant-dernière copie. Je me passe de commentaires, vous règlerez cela avec vos parents-référents.

La dernière copie était celle de Laëtitia. Elle avait obtenu deux sur vingt.

-    Monsieur, s’il vous plaît ! plaida-t-elle en commençant à pleurer.

Monsieur Curtis n’en n’entendit rien : il sortit Laëtitia de sa table et l’emmena sur l’estrade. Puis, l’anglophone dégagea sa propre chaise pour la mettre à la vue de tous, s’assit dessus et bascula Laëtitia sur ses genoux.

La pauvre reçut une déculottée devant toute la classe qui aurait dissuadé n’importe quelle élève de cet établissement !

Conformément au nouveau règlement, Monsieur Curtis confisqua la jupe et la culotte de Laëtitia et l’envoya au coin coiffée du bonnet d’âne. Elle devait garder les mains derrière le dos et ne pas bouger, tout comme Lucille ; mais Lucille n’avait pas les fesses exposées à toute la classe, elle !

Forcément, Monsieur Curtis put nous dispenser son cours dans un silence magistral.

 

       Après la récréation du matin, comme si le sort s’acharnait contre moi, j’eus des ennuis. Tandis que nous devions copier la biographie de Jane Austen, Monsieur Curtis n’aimât pas beaucoup que je prête mon cahier à Mathilde, qui peinait à tenir le rythme de copie. Je fus envoyée au coin.

Mes mains sur la tête et mon visage face à l’angle du mur, je pestais contre cette injustice : voilà qu’on ne pouvait plus aider nos camarades, maintenant ! J’étais dépitée et folle de colère ; mais je ne pouvais pas me permettre de protester. Mes fesses ne le supporteraient pas. Et si Côme et Titine apprenaient que j’avais fait des miennes dès le lendemain de leur passage… Je n’ose même pas imaginer ce qui m’arriverait. Rien que le fait que je sois au coin devait leur être caché à tout prix !

       J’étais toujours punie lorsque l’on frappa à la porte, comme pour ajouter de la malchance à mon malheur.

-    Entrez ! lança Monsieur Curtis.

-    Bonjour à toutes, dit une voix que je reconnus comme étant celle de Monsieur George.

Ô misère ! J’étais fichue !

-    Asseyez-vous, dit l’Anglais alors que toutes mes camarades s’étaient levées à son entrée dans la classe, comme il était coutume de le faire pour chaque adulte. Je voulais savoir comment se passait votre première matinée, Monsieur Curtis ?

-    A merveille, répondit ce dernier.

-    Bien, bien, dit le sadique.

Je fermai les yeux, attendant que ça me tombe dessus. Pas loupé.

-    Tiens, tiens ! Vous êtes au coin, Mademoiselle Clémence !

J’eus envie de lui répondre : « Non, je me détends en faisant un poker ! », mais tout ce qui sortit de ma bouche fut un :

-    Oui Monsieur.

-    Puis-je savoir pourquoi ? me questionna le Dirlo des dirlos.

-    J’ai prêté mon cahier à ma voisine pour qu’elle rattrape son retard dans la prise de notes, dis-je avec toute la dignité qu’il me restait.

-    Vous méritez donc votre sanction, rétorqua Monsieur George. Méfiez-vous, Mademoiselle Clémence. Je croyais que votre fratrie avait mis les choses au clair avec vous hier mais ça ne semble point être le cas. Si je vous vois encore punie aujourd’hui, je vous administrerai moi-même une bonne fessée. C’est entendu ?

-    Oui Monsieur, dis-je les dents serrées.

-    Fort bien.

Heureusement que mon regard était resté fixé sur l’angle du mur, sinon Monsieur George aurait pu y déceler toute la haine que j’éprouvais pour lui. J’aurais voulu qu’il s’étouffe avec sa salive.

J’entendis cette espèce de sadique faire le tour de la classe et distribuer des remarques comme : « Tenez-vous droite, Mademoiselle Eva ! » ou « Tenez votre stylo correctement, Mademoiselle Noémie ! ». J’exécrais cette personne du plus profond de mon âme. Vivement la fin de la semaine pour qu’il dégage !

-    Bien ! finit par annoncer l’Anglais. Je suis heureux de constater que tout se passe pour le mieux, Monsieur Curtis. Je vais donc retourner à la réunion que j’ai organisée ce matin avec l’ensemble de la Direction. Bon cours !

Et il sortit de la pièce. J’aurais vraiment aimé que derrière la porte de la classe se trouve une cuve de magma brûlant pour que cet abruti nage en enfer pour l’éternité.

Je me confesserai à un prêtre plus tard.

 

       Monsieur Curtis me libéra du coin après un quart d’heure de punition. Je dus laisser un espace vide sur mon cahier pour rattraper le cours que je n’avais pas copié. Je m’en occuperais en salle des devoirs ce soir pour m’assurer que Mathilde ne serait pas punie si elle me prêtait son cahier !

 

       Forcément, peu avant le repas du midi, Monsieur John et sa tolérance zéro me tombèrent dessus.

-    Viens ici, Clémence ! me gronda-t-il.

-    Mais Monsieur, je n’ai rien fait ! plaidai-je.

-    Tu te fiches de moi ? J’ai reçu une notification sur ma tablette. Monsieur Curtis t’a envoyée au coin !

Mathilde plaida alors ma cause auprès de notre père-référent, me sauvant la mise pour ce midi. Monsieur John dit néanmoins :

-    Je vais mener mon enquête pour vérifier vos dires. Si vous m’avez menti, gare à vos fesses !

Je ne pris pas la menace au sérieux, sachant très bien que Mathilde et moi avions dit la vérité.

 

       J’avais tellement faim ce midi - et chose inespérée, le menu était composé de saucisses avec des frites ! – que je mis du temps à m’apercevoir qu’aucun membre de la Direction n’était là ; seuls les professeurs et les Gouvernantes déjeunaient sur l’estrade.

-    Pourquoi les S.G, les D.-A. et Monsieur Éric ne sont pas là ?

-    Oui, c’est étrange ! dit Mathilde. Monsieur John est venu nous voir il y a un quart d’heure ! Il est aussitôt reparti !

-    Ils n’ont plus le droit de manger au réfectoire, nous informa Florentine.

-    Comment tu sais ça, toi ? me renseignai-je.

-    J’ai entendu mes parents-référents en parler entre eux, répondit-elle. Ça fait partie de la nouvelle politique du Pensionnat. Le but est qu’on voit la Direction le moins possible car moins on les verra, plus on aura peur d’eux ! Monsieur George veut qu’on les voie uniquement lorsqu’on a fait de grosses bêtises…

-    Mais qui va assurer la surveillance du réfectoire ? Et de la récré ?

-    Ce sont les Gouvernantes, expliqua Florentine. On ne verra plus les membres de la Direction à moins qu’on ait vraiment quelque chose à se reprocher. Et de leur côté, la Direction a pour ordre d’avoir une tolérance zéro avec nous : si on se retrouve dans un de leurs bureaux, pas sûr qu’on en sorte vivantes !

-    Tu dis n’importe quoi ! contesta Naomy.

-    Ah oui ? s’étonna Florentine. Alors comment expliques-tu que ce matin, Lucille et Clémence n’aient pas été menacées d’être envoyées chez l’un des Surveillants Généraux ? Encore vendredi, on leur aurait dit : « Si vous bougez au coin, vous irez chez le Surveillant Général ! ». Mais là, le prof a menacé de s’occuper lui-même d’elles. A aucun moment le nom de Monsieur Matthieu ou de Madame Philomène n’a été prononcé.

-    C’est Monsieur George qui m’a directement menacée, rappelai-je.

-    Oui, rétorqua Florentine, mais encore une fois, il n’a pas prononcé le nom de Monsieur Matthieu, ou celui de Madame Philomène…

Elle n’avait pas tort. C’était louche, tout ça !

-    Vu que Monsieur John est votre père-référent, dit Naomy, demandez-lui !

-    On lui demandera, affirmai-je.

 

Heureusement pour moi, mes cours de piano, de philosophie et de violon se passèrent bien. Il faut dire que malgré les remarques acerbes de Monsieur Alexandre, les nombreux devoirs donnés par Monsieur Yves et les réflexions de Madame Eabha, j’avais fait profil bas.

En entrant en salle des devoirs, je pensais au fait que voir Manu me manquait. Monsieur George avait supprimé l’accès au psychologue la semaine dernière, et il avait fini par le renvoyer définitivement. Selon lui, le psy ne servait à rien : on disciplinait l’esprit en tapant sur les fesses. Il n’y avait rien d’autre à ajouter ! En apprenant cela, je repensais à mon magma brûlant en imaginant l’Anglais nager dedans, y croiser Hitler et Staline, et tous les plus grands monstres que l’Histoire ait connus.

Je m’attaquai à mes devoirs après avoir rattrapé mes notes de littérature anglaise. La nouvelle Gouvernante, Madame Marie-Claire, surveillait la salle et avait la main très leste ; un silence monastique régnait dans la pièce. Ce n’était pas le moment pour moi de me la mettre à dos : Madame Marie-Claire était une des nouvelles Gouvernantes du dortoir n°2 !

 

Au dîner, mes amies et moi dûmes dresser le sombre constat que Florentine avait raison. Nous n’avions vu aucun membre de la Direction de toute la journée. Nous savions que Monsieur Éric était parti dans l’après-midi pour Lille, assister à sa formation à deux balles ; mais ni Monsieur John, ni Monsieur Lionel, ni Monsieur Matthieu, ni Madame Philomène n’avaient fait leur apparition durant la journée. C’était comme s’ils étaient absents, eux aussi.

En conséquence, nous ne connaissions absolument rien de Madame Philomène, ce qui attisait un mélange d’appréhension et de curiosité chez l’ensemble des pensionnaires. De plus, il m’était extrêmement difficile de savoir mon Matthieu dans l’établissement sans pouvoir l’approcher, lui parler, le toucher, l’embrasser… Rien qu’à imaginer nos corps serrés l’un contre l’autre, mon cœur fit des bonds dans ma poitrine. Son retour s’avérait être un véritable supplice.

 

Ne tenant plus, j’allai frapper à la porte de son bureau après le dîner ; mais je n’entendis pas « Entrez ! ». Je collai alors mon oreille à la porte pour pouvoir entendre ce qu’il s’y passait. Pas besoin d’avoir l’ouïe d’un chat pour comprendre que mon Matthieu était en train de sanctionner une élève. Les claques tombaient et même à travers la porte, on pouvait les entendre distinctement. J’entendis ensuite : « Votre famille est dépassée par votre attitude, Abigaëlle, mais c’est loin d’être notre cas ! Je vais vous apprendre à désobéir à votre professeur de mathématiques, Mademoiselle ! ». Et d’autres claques tombèrent. Les pleurs de ma camarade étaient si bruyants que je pensais que Matthieu était en train de la torturer. Je me devais d’essayer d’intervenir ! Je posai alors ma main sur la poignée de la porte et entrepris d’appuyer lorsque j’entendis une voix ferme me demander :

-    Je peux savoir ce que vous faîtes ?

Je jetai un regard effrayé en direction de la voix que je venais d’entendre. C’était la fameuse Madame Philomène.

-    Bonjour Madame, dis-je en rassemblant tout mon courage. Je voulais voir Monsieur Matthieu…

-    Vous vouliez espionner Monsieur Matthieu, vous voulez dire ? me gronda-t-elle sans pour autant hausser le ton. Je vous ai vu coller votre oreille à sa porte pour entendre ce qui se passait.

Madame Philomène me fonça dessus et m’attrapa par l’oreille.

-    Non seulement vous n’avez pas l’autorisation de vous promener dans les couloirs car à cette heure-ci vous devriez être dans votre dortoir ; mais le couloir de la Direction est réservé aux élèves convoquées. Or, vous n’avez pas été convoquée, Mademoiselle Clémence.

Comment savait-elle qui j’étais ?

-    Madame, je n’ai pas fait exprès ! me défendis-je en tentant de dégager mon oreille de ses horribles doigts.

-    Vous n’avez pas fait exprès d’errer dans le couloir de la Direction et d’écouter à la porte du Surveillant Général ? Dans ce cas, je ne vais pas faire exprès de vous donner une fessée.

-    Nan, Madame, s’il vous plaît ! Je ne peux plus en prendre ! Je…

Je ne pus finir ma phrase. Madame Philomène m’avait traînée devant la porte de son bureau et en cherchait la clé dans sa poche lorsque Monsieur John arriva. Je crus que j’allais me pisser dessus. C’en était réellement fini de moi !

-    Qu’a-t-elle fait ? demanda le nouveau Directeur-Adjoint.

-    Elle errait dans les couloirs alors que c’est interdit et elle écoutait à la porte du bureau de Matthieu. répondit Madame Philomène. Bon sang, où ai-je mis ma clé ?

-    Prends ton temps pour retrouver ta clé, Philo, dit Monsieur John. Je vais la gérer.

-    Ça ne m’embête pas de le faire, confessa la Surveillante Générale. Je vais lui flanquer une bonne déculottée sur mes genoux afin de la punir et d’éviter une récidive.

-    C’est ma fille-référente, je m’en occupe, insista-t-il.

-    Oh, dans ce cas d’accord, dit la Surveillante Générale en me lâchant enfin l’oreille.

Je me massai vigoureusement mon outil d’audition. Madame Philomène venait enfin de retrouver sa clé quand Monsieur John sortit la sienne et alla se poster devant la porte de son bureau. Après l’avoir ouverte, il m’ordonna : « Entre. ». J’obéis. Monsieur John referma la porte derrière moi.

 

-    Monsieur, je voulais juste voir Monsieur Matthieu ! plaidai-je. Je ne voulais pas…

-    Tu as toujours une bonne excuse, Clémence ! me gronda le Directeur-Adjoint. A t’écouter, tu ne fais jamais rien de mal, tu es toujours au mauvais endroit au mauvais moment !

-    Mais c’est vrai ! protestai-je.

-    Donc c’est par un malheureux concours de circonstances que tu t’es retrouvée à errer dans un couloir interdit sans convocation, à une heure interdite, en train de faire une chose interdite à savoir écouter à la porte du bureau du Surveillant Général ?

-    Ben…

-    Tu n’as pas intérêt à me dire oui.

Je me tus un instant avant de préciser :

-    Je voulais juste le voir…

-    Nous sommes uniquement quatre à connaître la nature de la relation qui vous unit Matthieu et toi. En dehors de vous deux, il n’y a que Monsieur Éric et moi. Et il faut que ça reste comme ça, Clémence ! Personne ne doit l’apprendre ! Alors je suis désolé si c’est dur pour vous, mais à l’intérieur de ces murs, Monsieur Matthieu est ton Surveillant Général et rien de plus ! Et tu viens donc de commettre deux bêtises qui ne peuvent pas rester impunies !

-    Monsieur, ne me punissez pas, s’il vous plaît ! priai-je. Mes fesses sont totalement hors service…

-    A qui la faute ?

-    Monsieur, s’il vous plaît…

-    Je suis navré Clémence mais tu as dépassé les limites. Tu es sortie de ton dortoir sans autorisation pour aller dans une zone qui est interdite aux élèves. Et en plus, tu écoutes aux portes ! Tu mérites une fessée.

Je pleurais déjà avant que mon père-référent attrape mon poignet. Je me mis alors à le prier plus fort :

-    Monsieur, pitié !!

-    Tu veux que je rappelle Madame Philomène ?

-    Non, dis-je précipitamment.

-    Alors tais-toi, maintenant. Tu as fait des bêtises, Clémence. Tant pis pour toi !

Tout en immobilisant mes bras pour que je ne puisse pas me défendre, mon père-référent m’asséna une vingtaine de claques sur la jupe.

Elles firent mal mais beaucoup moins que ce à quoi je m’attendais ! Ces claques furent douloureuses mais supportables, même sur mes fesses à stigmates.

-    Ne me fais pas regretter d’avoir été gentil, Clémence. M’ordonna-t-il en me lâchant. Je sais que c’est difficile pour toi de te tenir à distance de Matthieu donc je te laisse une dernière et unique chance. A la prochaine incartade, tu finiras sur mes genoux ; et tu as déjà assez tâté de ma main pour savoir à quoi t’attendre. Tu m’as compris ?

-    Oui Monsieur, répondis-je en me frottant tout de même le derrière.

-    Bien.

-    Monsieur, je peux vous poser une question ?

-    Je t’écoute, répondit-il.

Je lui déballai alors tout ce que Florentine nous avait dit ce midi.

-    Est-ce que c’est vrai ? finis-je par demander.

-    Effectivement, soupira Monsieur John. Seuls nos enfants-référents auront la chance – ou la malchance, selon leurs comportements ! – de nous voir régulièrement.

-    Et puisque c’est vous mon père-référent, est-ce que les autres membres de la Direction pourront me punir ?

-    Tu me poses vraiment la question ? s’étonna Monsieur John. La seule raison pour laquelle je t’ai ôtée des mains de Madame Philomène est que je savais que c’était ton manque de Monsieur Matthieu qui t’a poussée à faire des bêtises. Maintenant que nous avons acté que tu allais prendre sur toi concernant ce manque, si un autre membre de la Direction doit te sanctionner, tu recevras un doublon de ma part.

-    C’est injuste ! Tout ça parce que vous êtes mon père-référent…

-    Les autres parents se débrouillent comme ils veulent mais en ce qui me concerne, c’est comme ça que ça fonctionne. Et je crois bien que Côme et Célestine fonctionnent de la même manière. Tu ne devrais pas être trop dépaysée.

-    Mais…

-    Il est grand temps que je te raccompagne dans ton dortoir, maintenant.

 

En arrivant dans ma chambre, Monsieur John et moi découvrîmes Madame Jeanne en train de flanquer une fessée carabinée à la brosse à Mathilde.

-    Que s’est-il passé ? se renseigna Monsieur John.

-    Madame Coralie l’a surprise dans les toilettes avec Yéline et Fatoumata ! expliqua ma mère-référente en continuant d’abattre le dos de la brosse en bois sur les fesses de Mathilde. Elles essayaient de fumer !

Le visage du Directeur-Adjoint changea immédiatement. On pouvait lire une colère noire dans ses yeux.

-    Amène-la-moi dans mon bureau lorsque tu auras terminé de la corriger, commanda Monsieur John. Et je vais tout de suite aller chercher Yéline et Fatoumata !

Avant de sortir de la chambre, mon père-référent s’adressa à moi :

-    Prépare-toi pour aller dormir, Clémence. Que je n’entende plus parler de toi pour ce soir !

 

Lorsque je sortis de la douche, il n’y avait plus personne dans ma chambre. Ma meilleure amie devait être en train de recevoir la volée du siècle dans le bureau de notre père-référent. Une chose était sûre : je ne voudrais pas être à sa place pour tout l’or du monde !

 

A suivre…

La suite !

Commentaires

  1. La terreur règne dans le pensionnat 😟
    Comment les filles vont-elles pouvoir vivre dans de telles conditions ? Cela ne relève plus simplement de la discipline mais est digne d'un régime ''carcéral''.
    Cet abominable anglais a tué tout ce qu'il y avait d'humain 😪😥😢😭
    Qu'il disparaisse au plus vite !!! Et qu'il emporte avec lui sa maudite réforme et ses sbires tortionnaires 🙏
    J'espère que le retour de Mr Éric va ramener un peu de joie de vivre dans l'établissement 🙏🙏🙏

    S'il te plaît Little Princess, sors nous de cet atroce cauchemar ??? 😱

    RépondreSupprimer
  2. Ce qui ce passe à l'internat est vraiment injuste...
    Non seulement les filles sont loin de leur famille, elles prennent déculottées sur déculottées mais en plus elles ne peuvent même plus ce coiffer comme elles veulent c'est vraiment injuste...

    J'espère que ça va finir par devenir un peu plus cool à un moment donné...

    Clémence n'est pas bien ont le sent, elle ne peu pas voir Mathieu Le dirlo est partie quelque temps et en plus ce putain d'anglais a viré le psy... il ne va pas falloir longtemps à Clémence avant de péter un câble et de peut-être ce barrer pour de bon....

    Toutes les personnes qu'elle affectionnait sont partie ou pire elle ne peu pas les voir

    Courage Clémence
    Vous allez trouver une solution

    RépondreSupprimer
  3. Pauvre Clémence. Elle préférait sûrement que Matthieu soit loin plutôt que d’être là et ne pas pouvoir le voir.
    Cet anglais est un vrai dictateur. J’espère que ça redeviendra plus cool quand il sera parti malgré les changements dans le personnel.
    En attendant les filles vont devoir mordre sur leur chique 😕

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